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. La Chronique : Naruto va trop vite ! (2)

 
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Le Vieux
Étudiant à l'académie


Inscrit le: 21 Nov 2007
Messages: 51

MessagePosté le: Lun 11 Fév 2008, 3:21 pm    Sujet du message: La Chronique : Naruto va trop vite ! (2) Répondre en citant

Sur ton cou large et rond, sur tes épaules grasses,
Ta tête se pavane avec d'étranges grâces ;
D'un air placide et triomphant
Tu passes ton chemin, majestueuse enfant.


Le Salut,

1. Prenons notre temps. Flânons autour de Naruto. La lenteur, encore une fois.

Lors de la dernière chronique, je proposais deux types de lenteur : une lenteur-attente que seuls mesurent nos désirs et une lenteur-vitesse qui n’était rien d’autre qu’un rapport à une autre vitesse. Ces deux types de lenteur ne sont pas entièrement superposables même si, généralement, elles fonctionnent ensemble (ce train est lent s’il va moins vite que d’habitude et s’il nous retarde).

2. Mais pourquoi l’anime est-il lent ? Il est lent par rapport au manga. Tel combat que le manga règle en 17 pages et donc que certains fans, les acharnés de l’intrigue, lisent en 8 secondes chrono (record à battre) s’éternise en de longues minutes dans sa version anime ; 20 minutes autrement dit, en gros, 0,1 image/seconde théorique si le manga (100/120 images par chapitre) était directement adapté en anime ; c’est lent, en effet, très lent.

En fin de compte, la lenteur de l’anime s’expliquerait pour des raisons commerciales : c’est l’objectif de sortir un épisode par semaine sans pour autant rattraper le manga qui conduit Studio Pierrot à se satisfaire de ce rythme d’escargot. Un épisode par mois, pour quatre chapitres donc, et nous aurions un Shippuuden un peu plus vif.

3. Mais cette remarque vaut seulement pour les fans qui fréquentent à la fois l’anime et le manga. Or l’impression de lenteur est ressentie également par ceux qui ne s’intéressent qu’au premier (c’est-à-dire en dehors de toute comparaison). Pourquoi ? La raison principale en est que la différence de rythme narratif de l’un à l’autre est entièrement investie en une esthétique de la tortue.

Esthétique de la tortue ? Je parle de ces « Sasu-ke » ou de ces « Gaa-ra », répétés et allongés, la psalmodie des suppliantes face au spectacle de leur héros souffrant/hésitant/fuyant. Je parle de ces gros plans sur les regards et de cette attention pour le détail le plus futile ; une tuile qui tremble ? Un pigeon s’envole au loin ? Tout est digne d’une seconde. Je parle encore de la répétition, le copier-coller des plans ; combien de fois cette image du Rasengan vibrionnant dans la main de Naruto ? Dans l’anime, prodige physique et philosophique, la même eau peut passer deux fois sous un pont, parfois trois.

Tout cela s’explique aisément : il faut combler l’écart entre le chapitre et l’épisode, boucher les trous. Mais cette esthétique semble venir de plus loin. Elle rappelle d’abord les interminables combats de DBZ. Encore un pas et nous voilà au milieu de trois desesperados, dans un cimetière américain avec, en fond sonore, une musique qui ressemble étrangement au rire d’une hyène. N’y a-t-il pas en effet une sorte de proximité formelle entre l’anime et le western spaghetti ? Gros plans, répétitions, souci du détail, sentiment d’un allongement gratuit des durées ne caractérisent-ils pas l’un et l’autre ?

4. Le western spaghetti comme modèle de l'anime ? Dans le western spaghetti, la lenteur a surtout une fonction critique : il s’agit de théâtraliser les codes du western « classique » (le tragique, le suspens, le réalisme) pour en montrer l’artificialité. Dans les duels par exemple, le coup de feu est l’objet d’une attente insoutenable alors qu’il ne dure jamais plus d’un quart de seconde ; on s’impatiente pour un événement qui n’aura pas lieu. Le duel dans les spaghettis : une blague. La lenteur est un jeu avec l’attente du spectateur.

Peut-on également considérer le rythme de l’anime comme une sorte de plaisanterie ? Non ou alors involontaire. A la différence du western spaghetti, dans les épisodes, la lenteur ne repousse pas l’événement : elle l’allonge, le répète, et le multiplie. Elle vise à contenter l’objet de notre désir. Chaque coup est aperçu selon plusieurs angles de vue, chaque situation est mille fois expliquée ; il n’y a pas de mystère. Nous en avons pour notre argent.

5. De nouveau, il serait possible de voir à travers ce souci de satisfaction de la cible, l’indice d’une logique commerciale qui altère les qualités artistiques du Shippuuden. Alors que l’anime pourrait profiter du temps supplémentaire pour faire preuve de créativité (esthétique), une rationalité marketing l’en empêche (une envie de rentabilité aussi car la créativité coûte plus cher que la reproduction mécanique du manga sous-traitée en Corée ou ailleurs).

Mais la différence entre la lenteur du western spaghetti et celle de l’anime m’inspire une autre conclusion. Dans les premiers, la caméra joue, s’amuse avec le temps ; elle flâne. Chaque seconde est oisive, affranchie de toute signification immédiate. Dans le second, je l’ai dit, tout semble expressif : chaque seconde est l’occasion d’une explication ou d’une intensification. Cette nuance entre une seconde utile et une autre qui ne l’est pas, c’est ce qui distingue la lenteur qui fait perdre du temps de celle qui, s’affranchissant des délais, horloge, calendrier, agenda, tic tac, tic tac, nous en donne.

Vive la lenteur si elle est vaine !

Le Vieux

Le no sms



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Où l'on s'appesantit sur le concept de vitesse, page philosophique sans fulgurance mais bien utile :
=> Ici
Où l'on cite et pour la suite, il faudra voir le livre (c'est un roman, une jolie histoire) :
"La vitesse est la forme d'extase dont la révolution technique a fait cadeau à l'homme. Contrairement au motocycliste, le coureur à pied est toujours présent dans son corps, obligé sans cesse de penser à ses ampoules, à son essoufflement (...) Tout change quand l'homme délègue la faculté de vitesse à une machine : dès lors, son propre corps se trouve hors du jeu et il s'adonne à une vitesse qui est incorporelle, immatérielle, vitesse pure, vitesse en elle-même, vitesse extase.
Curieuse alliance : la froide impersonnalité de la technique et les flammes de l'extase. Je me rappelle de cette Américaine qui, il y a trente ans, mine sévère et enthousiaste, sorte d'apparatchik de l'érotisme, ma donné une leçon (glacialement théorique), sur la libération sexuelle; le mot qui revenait le plus souvent était le mot orgasme (...) le culte de l'orgasme : l'utilitarisme puritain projeté dans la vie sexuelle; l'efficacité contre l'oisiveté; la réduction du coït à un obstacle qu'il faut dépasser le plus vite pour arriver à une explosion extatique, seul vrai but de l'amour et de l'univers." (Milan Kundera, La Lenteur, Paris, Gallimard, 1995, pp. 10-11)
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