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. Des Visages, Des Figures
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Chakal D. Bibi
~ Chakal Touffu ~


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MessagePosté le: Mar 11 Mai 2010, 7:19 pm    Sujet du message: Des Visages, Des Figures Répondre en citant

Alors voila, j'ai débarqué samedi à Cape Town, Afrique du Sud, et je me suis dit que ça pourrait être sympa de tenir un petit journal de bord. Et puis, bon, c'pas bien original me suis-je dis ensuite. Alors je me suis redit que ça pourrait être de tourner le truc en roman. Et puis je me suis encore redit que ce serait cool si ce roman, il partait royalement en couille Very Happy Very Happy

Alors voila ^^ Une histoire vraie presque authentique. Je vous sers le prologue et le premier chapitre. Je suis en train d'écrire le deuxième.

N'hésitez pas bien entendu (et c'est vraiment le bienvenu) à me faire part de vos avis, critiques, conseils, idées etc. (par exemple si vous voulez, par le biais de votre avatar CN entrer dans l'histoire...)

Enjoy Wink

Des Visages, Des Figures


Prologue


Juste devant s’étend le désert infini de la Réalité. Cette Réalité est un chemin de terre, poussiéreux et bouffé par les nids de poules.
Ce chemin en a vu des vertes et des pas mûres depuis que l’Univers a pété un grand coup et pondu notre système solaire au beau milieu du néant absolu. Là où il n’y avait absolument que dalle jaillit soudainement la Vie. Et de la Vie a découlé un sacré paquet de saloperies et de bizarreries diverses.

Mais si on prend le temps de se poser un peu à l’entrée du chemin pour se fumer une cancerette, s’envoyer une pinte, se payer une partie de ça va ça vient avec une belle inconnue ou simplement causer de tout et de rien, on aperçoit une petite route escarpée. Une petite route qui se transforme progressivement, et ça tu le sauras seulement si tu prend la peine de t’y aventurer, en une longue et large autoroute. On l’appelle « L’autoroute du Clair de Lune » car chaque fois qu’Artémis pointe le bout durci de ses seins, elle est complètement pleine.

Sur cette autoroute bien particulière absolument tout peut arriver. Les gens sont des animaux, mythiques, classiques, familiers ou détestables. Ils errent tous, sans vraiment de but sinon celui d’échapper aux réalités qui les bouleversent tant et les effraie plus que la faim dans le monde, la bombe atomique, le SIDA ou le droit des femmes.

Toutes ces choses qui bordent la route dégueulasse de la Réalité disparaissent ici pour laisser place à tout ce que l’on veut. Tous les désirs, les fantasmes germent ici des Ames qui ne vivent plus vraiment et qui laissent découvrir la noirceur de leur Légende.

Une bien longue et futile réflexion pour introduire cette nouvelle (ou ce roman ou cette aventure ou cette histoire ou ce que tu veux je m’en tamponne) qui relate le temps passé loin du « Home Sweet Home ».

Cette nouvelle commence sur le chemin de la Réalité mais se laisse aller à quelques divergences vers l’autoroute du Clair de Lune. Cela rend le tout plus intéressant. On peut appeler ça une blague, une arnaque ou un gros mensonge. Mais comme le dit si bien un philosophe du 21e Siècle « Un mensonge est juste une belle histoire gâchée par la vérité ».

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Dernière édition par Chakal D. Bibi le Mar 01 Juin 2010, 2:08 pm; édité 2 fois
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Chakal D. Bibi
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MessagePosté le: Mar 11 Mai 2010, 7:20 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Chapitre 1, Samedi : Herbet et les deux clowns


Ce matin du 7 mai je ne m’attendais absolument pas à être envoyé en mission. En plus j’avais une sacrée gueule de bois. La veille, c'est-à-dire le 6 mai, je m’étais fait jeter proprement et sans fioritures par ma blonde. Je me suis retrouvé à la rue alors je me suis payé un hotel en ville, au frais du contribuable.

C’est un des aspects les plus intéressants de mon job. Je peux me payer du bon temps dans tous les rades, restaus, bordels et strip-clubs de la ville sans débourser un sous de ma poche, seulement de la vôtre. Tous mes whiskys, mes steaks, mes putes et mes lap-dances, ca part en note de frais. Et puis après j’ai juste à dire à mes patrons que j’étais en mission. Encore faudrait-il qu’il me questionne au sujet de ces notes de frais. Ils s’en tamponnent aussi longtemps que je fais du bon boulot. Et c’est exactement ce que je fais. Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours été le meilleur, ou peu s’en faut.

A l’école j’excellais dans tous les domaines, sauf en français, en math, en histoire, en anglais, en sciences physiques, en chimie et en sport. Par contre j’arrivais toujours à gruger par des moyens pas toujours recommandables et à me faufiler durant les cours pour aller me promener au grand air et prendre du bon temps avec la Jolie Môme qu’était la fille du père Noel.

Après le lycée j’ai fait pas mal de petits boulots pas toujours très honnêtes. De la classique vente de thé au trafique de pandas en passant par l’assassinat. Kennedy c’était moi. Lennon aussi. Je peux pas blairer les hippies. Par contre pour Reagan j’y suis pour rien. Ils avaient envoyé un bleu sur ce coup-là. Si c’avait été moi, je peux vous dire qu’un paquet de siphonnés seraient resté à l’asile.

Enfin bref, je vais pas commencer à déballer ma vie, après tout elle est secrète alors si vous vouliez bien oublier ce que vous venez de lire ce serait sympa. Je disais donc que ce matin du 7 mai, j’ai tiré une tronche de 10 pieds de longs quand mes patrons m’ont envoyé dans les terres du Sud, à Cape Town, pour infiltrer un labo de drogues clandestins. Ils aiment pas beaucoup les camés mes boss. En fait, c’est une façade pour pouvoir éliminer la concurrence et imposer leur opium sur tout les marchés. D’après eux l’opium est le seul psychotrope dont la noblesse autorise sa consommation. C’est aussi l’avis du Taulier, le mec qui gère la moitié de la planète depuis la 3e Guerre même si mes boss ne sont pas vraiment reliés à lui. Ils m’annoncent donc que je pars en mission là bas pour quelques mois.

Je raccroche le téléphone et me tire le cul du lit pour faire ma valise. J’enfile un costume rapidement, fourre quelques affaires dans un sac et je suis parti pour Charles de Gaulle. J’attrape un vol sur une compagnie quelconque et constate, une fois dans l’avion, que je fais une escale à Abu-Dhabi. Et merde. Je sens que le voyage va être long.

Dans l’avion je suis assis à côté d’un mec, qui a du naitre l’année des évènements de Mars. Il est pas très grand, mal rasé et doit peser dans les 65 kilos. Quand on fait ce boulot depuis plusieurs décennies comme moi, on se met à reconnaitre automatiquement ce genre de détail. Ca devient un mécanisme, on y réfléchit même plus. C’est comme se brosser les dents ou se torcher le cul.

On discute un peu et on fait connaissance. Il s’appelle Herbert et part pour Tokyo où l’attend une gonzesse. Dans la vie il est chasseur de nibards. C’est comme un chasseur de tête mais lui ne dégotte pas des petits génies sortis d’Harvard. Le boulot d’Herbert consiste à trouver de belles nanas un peu partout dans le monde et de les ramener au pays à son patron pour en faire des prostiputes. Il m’explique à quel point il est important de nos jours d’offrir aux clients une large variété de gonzesses, comme les capotes, à usage unique, et que son rôle est vital pour la bonne pérennité du marché. Je le crois sur parole.

Je n’ai jamais été client pour ce genre de choses mais bon, ainsi va le monde et je ne les condamnes pas pour autant. Après tout, depuis la légalisation des prostiputes par le Taulier, le taux de viol a diminuer de 53,8%. C’est plutôt pas mal. Le tabou a aussi été levé sur le porno sur internet et maintenant vous pouvez télécharger autant de films zarbis avec des bridées qui se chient dessus, des latinos qui enculent des poneys ou des finlandais faisant des allers retours dans des vagins fraichement décédés et même des italiens se taper des enfants au cul imberbe.
Toutes ces pratiques sont légales, du moment que tous les protagonistes des films sont consentants.

On continue à discuter tranquillement de tout cela quand un mec étrange se lève. Un grand blond aux yeux bleus, le genre saloperie bornée du milieu du 20e siècle, et sort un flingue de nulle part. Il gueule des trucs incompréhensibles d’une voix gutturales. Surement un bosh. Derrière nous rugit une autre voix du même genre mais en plus excitée et aigrette. Un petit brun moustachu sautille partout comme une monitrice d’aérobic en exigeant le calme. C’est plutôt lui qui aurait bien besoin d’un fixe. Ces empaffés semblent avoir en tête de détourner l’avion sur Shangaï, fief du Taulier, et de massacrer un maximum de bridés en se crashant sur le centre ville. Tout cela a un petit goût de 11/09 mâchouillé et recraché.

Personne à bord, sinon le petit moustachu, ne semble s’énerver. Tout le monde fait montre d’un étrange calme. Trop calme. Et il semblerait que cela emmerde carrément le petit moustachu qui se rend maintenant compte que son bordel n’impressionne personne. Mais faudrait voir à se réveiller quand même, ces mecs veulent nous buter. Et puis merde, si personne ne se bouge, je vais devoir le faire. C’est quand même con, on survole actuellement le Zimbabwe, on est presque arrivé. Le voyage aurait pu se passer sans encombres mais non ! Il a fallu que ces deux tarés prennent le même vol que moi. Enfoirés. Je me lève discrètement et me dirige vers le moustachu. Je lui attrape la tête par derrière et la lui retourne. Sa nuque craque comme une brindille morte et le bruit interpelle son collègue qui fait volte face et m’arrose de dragées aussitôt qu’il a saisi la situation. Je garde le corps du petit moustachu comme bouclier et le repousse sur le grand blond. Je me jette alors sur lui, agrippe son arme et la retourne contre lui. Les passagers des rangées 17, 18 et 19 côté allé se retrouve copieusement arrosé d’un mélange de sang, d’os et de cervelle. Là c’est sur, va falloir changer les sièges. Personne, à part les passagers susnommés, n’a bronché quand la tête du grand blond a éclaté. On dirait un grand tas de camés sous morphine. Le camé se fout de tout, il vit dans son monde et le reste l’importe peu. Faut croire que je suis dans un avion rempli de camés. Malgré la répression du Taulier, le nombre de junky a augmenter de façon exponentielle depuis la 3e Guerre.

Les trois dernières heures de vol se passent sans encombres et nous atterrissons comme prévu à l’aéroport de Cape Town vers 8h30 du matin, ce samedi 8 mai. La première chose qui m’a frappé en descendant de l’avion, ce sont les gorilles du service de sécurité. Il semblerait que mes frasques aient fait sensation et ces braves armoires à glace m’expliquent à coup de tatanes bien senties qu’ici on aimait pas trop les gars dans mon genre. Je m’en prend plein la gueule et le bide pour pas un rond. Ils tapent si fort que je me retrouve à dégobiller le poulet et le riz servis dans l’avion, le tout arrosé de sang et de quelques dents. Ils me laissent là, baignant dans mes fluides, avec un simple avertissement pour cette fois. Voila qui promet un séjour agréable.

Le premier jour, je me démerde pour trouver un logement qui passerait inaperçu. Le genre de piaule avec un plumard où s’écrouler en fin de soirée et c’est marre. Pas besoin d’attirer l’attention en allant me pageoter dans un hôtel grand luxe. Je me retrouve donc avec mon sac sur le dos, un vieux jean, une veste élimée, toujours dans l’idée de rester discret. Je suis agent secret après tout. Mais n’allez pas le gueuler sur les toits. Bref, j’arrive donc sur Long Street et entre dans un backpackers appelé le Penthouse.

Je dois bien reconnaitre qu’au début, c’était plutôt étrange comme endroit. Toutes sortes de gens venu de toutes sortes de pays vivaient en cohabitation et en paix. Surement grâce au thé. Nom de dieu, cet endroit est encore plus enfumé que les poumons d’un cancéreux en phase terminale. Ils s’inondent tous le rassoudok de thé local, une forte odeur et un goût…Spécial. Pour pas dire carrément gerbant. Une demoiselle venue de la Scandinavie et nommée Janie m’offre un thé-roulé de sa confection. Je l’accepte. « A Rome, fais comme les romains », « Carpe fuckin’ diem » etc. Ils s’envoient aussi des « Boum Boumers ». Je ne connaissais pas la pratique sous ce nom. Ils versent des shooters d’absinthe verte diluée avec un peu de sucre roux, les laissent tomber dans une infusion de leur thé et boivent le tout cul sec. Mon vieux, ça te met une sacrée claque dans la façade toute karashô. L’absinthe te brûle tellement que tu découvres des parties de ton anatomie dont tu ne soupçonnais même pas l’existence. Le thé-infusé quand à lui calme les brulures et te procure une certaine extase lorsque, mêlé aux vapeurs de la Fée Verte, il s’infiltre dans les sillons de ta Légende.

Ensemble, nous faisons un voyage étrange et nous nous éloignons de plus en plus du sentier de la Réalité pour rejoindre petit à petit, pas à pas, l’autoroute du Clair de Lune. La nuit est belle ce soir, les étoiles brillent de milles feux et la Lune est pleine, comme on le dit.
Nous marchons quelques temps le long de l’autoroute. Le voyage dure à peine quelques heures mais il semble s’être étalé sur plusieurs semaines tant nous avons vu de choses incroyables comme des Gnomes s’envolant dans les cieux, un Poisson allant cahin-caha hors du lit de sa rivière, une Môme vendant sa vertu pour quelques pièces en or à un Clébard bavant. Répugnant.

Le lendemain matin je me réveil. Comme la veille avec une sale tronche. Ce voyage nocturne m’a lessivé. Je renfile ma tenue de camouflage, un futal cargo noire et une chemisette blanche tout à fait disgracieuse et vais prendre un petit déjeuner avant de sortir pour explorer un peu la ville.

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Dernière édition par Chakal D. Bibi le Mer 02 Juin 2010, 11:30 am; édité 2 fois
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Chakal D. Bibi
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MessagePosté le: Ven 14 Mai 2010, 11:11 am    Sujet du message: Répondre en citant

Chapitre 2 OUT !!!

Chapitre 2 : Dimanche, Madoulo et Mathilda


La première chose à laquelle je m’atèle en quittant le backpackers est la localisation de ce fameux labo de crack. D’après le boss, ce serait relativement proche du centre ville, du côté de Shortmarket Street. Assez facile à trouver finalement, je n’ai qu’à prendre à gauche en sortant, ensuite deuxième rue à gauche, première à droite et je gravis la rue vers les montagnes cachées par de biens sombres nuages ce matin-là pour trouver ce que je cherchais.

Bah merde.

C’est presque trop facile. Je trouve le labo en moins d’une demi-heure et maintenant il me faut occuper les deux jours que je pensais consacrer à mon travail de localisation. Je vais donc aller me poser dans un bar. Sur la route, je demande à un autochtone :

“ Hi my friend, I’m kind of lost over there ! ”

Et à lui de me répondre avec une voix posée et auréolé d’un accent étrange (qui me rappelait celui de Mike l’Arnaque, un black que j’ai rencontré au café des Poètes et qui revendait des camelotes comme la Friteuse Incassable ou le Tapis Volant des Nuits d’Orient) :

“ Good morning, don’t worry man. What kind of way could I show you ?”
“Well, show me the way to the next Whiskey Bar !”

Le brave homme m’indique une route droit vers Wale Street, près de la cathédrale St Georges. Si je n’étais pas un païen impie jusqu’au fond des couilles, je serai bien aller y faire un tour. Mais j’ai toujours peur de tomber en cendres en passant le pas de la porte.
Je contourne donc un morceau d’histoire et m’en vais poser mes fesses sur le tabouret d’un sombre troquet. Dans l’arrière salle, un électrophone usé et très kitch passe les chansons de Bob Marley, un chanteur reggae décédé vers -53 avant l’arrivée du Taulier.

Je commande un verre de ce bon vieux Jack l’Eventreur, sec. Et puis je jette un œil autour de moi. Le bois des murs est constellé de trous et de portraits en noir et blanc de visages anciens, partis depuis un bail déjà. Se côtoient Nelson Mandela, Gandhi, Martin Luther King…Un gosse devant un char sur la place de Tien An Men. Si un gars du Taulier passait par là et voyait cette photo sur le mur, le proprio se prendrait très certainement une volée de plombs payés par le contribuable en plein dans le buffet.

Des tables de bois vermoulu tiennent tant bien que mal sur leur quatre pattes, supportant le poids des poivrots scotchés là, avec toute leur misère faisant ployer leurs épaules.
La serveuse est d’une rare mocheté. Une poitrine bien trop grosse pendait entre un ventre gonflé disgracieux et un visage élimé, balafré, enflé. Quand elle renverse un verre à cause de la maladresse d’un des piliers de comptoir, elle se prend la Volée du patron en pleine tronche et va se photocopier la silhouette sur la pierre érodée qui sert de bar.

Voici donc le pourquoi du comment.

A mes côtés se trouve un gars pas beaucoup plus grand que ça, cachant ses yeux sous la visière d’une casquette de base-ball rapiécée. Sous un épais blouson de cuir noir, du genre de ceux que portent les motards en Harley, de l’autre côté de l’océan Ataulierique, il cache des bras squelettiques.
Je lui paye un verre. Du coup, il lève les yeux sur moi (ou alors peut être s’est-il lasser de fixer le fond de sa choppe vide, va savoir) et me dit qu’il s’appelle Madoulo. Et puis il me dit que dans la vie il est empâteur.

Pour (sur)vivre, il déterre les cadavres enterrés dans le grand parc de Kirstenbosh. Et puis il m’explique comment il transforme ces cadavres en pâté qu’il vend sur le marché. Ca fait maintenant 30 ans qu’il fait ça. Dans sa famille, ils sont empâteurs de père en fils depuis son père qui était un honnête poissonnier jusqu’à ce que le cancer du scrotum l’emporte. Il a été le premier pâté de Madoulo, son fer de lance.

Par la suite, il s’est fait embaucher comme corbillard. Plutôt pratique pour dénicher la chair fraiche, la meilleure me dit-il. Le cadavre garde le meilleur de son goût jusqu’à 7 heures après son décès et 3 jours sous terre. Car, m’explique-t-il, les produits dont sont enduits les cercueils de nos jours servent de conservateurs. Et depuis que l’embaumement a été cataloguée comme une pratique satanique, plus de soucis de nocivité ou de toxicité. Du moins en principe.

Le grand malheur de la profession est aujourd’hui l’arrivée massive de cadavre de camés. Madoulo me dit que la viande de droguée est inutilisable. Avec les saloperies que les fabricants foutent dans la came, la barbac’ devient comme gâtée.

Je passe une bonne partie de la journée dans ce rad à descendre des pintes en compagnie de ce cher Madoulo qui me berce de ces morbides anecdotes de boulot. Et puis l’alcool aidant, je me sens aspiré dans un tourbillon épileptique signalant à mon esprit désabusé qu’il est grand temps de mettre les voiles et retourner voir au backpackers si je ne pouvais pas glaner quelques infos supplémentaires.

Quand je repense à l’histoire de Madoulo, je me dis que le monde est devenu bien étrange…Ou alors il a toujours été mais on a fermé les yeux…

Retour dans la rue.

Il pleut.

On est en Mai, c’est la fin de l’automne et il pleut,
Putain de chierie !

Je cours pour rejoindre le backpeckers. Je cours dans le caniveau, entre les bridés qui roulent comme des tarés et des blacks qui s’entassent sur le trottoir. Y’a des trucs qui, étrangement, ne changent que très subtilement.

Je finis par regagner le Penthouse et m’abrite sous le haut-vent d’un fort mauvais goût pour reprendre un peu mon souffle.
Je croise une charmante demoiselle.

Elle est…Elle est…
Vraiment, elle…
Elle est…

blonde, sexy en plus. Des talons hauts de 25cm, une courte robe noire fendue, des lèvres pulpeuses

En la voyant, j’ai éclaté la boucle de ma ceinture !

Je lui dis qu’elle me fait bander, elle est troublée.
Je lui dis que je voudrais la baiser comme un animal, elle ne le prend pas mal.
Je lui dis encore ce genre de conneries et puis elle rit,
Et puis elle me dit qu’elle veut voir mon lit et que c’est R3.000 pour la nuit,
Je lui dit :
« Ok, allons-y ! »

Elle s’appelle Mathilda.

Je la fait monter les marches pour s’échauffer et se mettre en jambe avant de s’attaquer à l’ascension du Rideau Ondulée pour ensuite atteindre, après six autres avant lui, le tant désiré
7e Ciel.

A peine le seuil de la porte de ma chambre franchie, elle m’ôte mes trois milles billets et mes vêtements.
Je lui renvois l’ascenseur en la déshabillant à mon tour. En bon gentleman, c’est la moindre des choses. Je prend pas vraiment la peine de déziper sa robe fendue en bas, devant, derrière, ni même de déclipser d’un geste habile le simili-soutien-gorge tirant plus sur le bout de sparadrap que sur la lingerie fine. J’arrache tout.

Et puis, oh ! Surprise ! Sur ses seins proéminents je découvre le visage de la fille du Borgne, un vieux fou cinglé et frustré aux singulièrement dangereuses paroles qui faisait de la Comédie (anciennement « Politique ») y’a un bail déjà.

-y’a pas mal de bricoles qui ont changées depuis l’arrivé du Taulier

Le Borgne était le genre de grand malade assoiffé de puissance mais, tout comme il ne faut surtout pas nourrir un gremlin après minuit, il semblait inconcevable de lui lâcher un gramme de pouvoir.
C’aurait été celui-ci le IVe Reich, pas celui du cinglé à l’origine de la 3e Guerre Mondiale et de l’accession au pouvoir de l’envahisseur bridé.

C’est pas pour me justifier mais j’ai plutôt bien fait de le plomber dans son seul œil valide ce gaillard-là. Je l’ai même fait gratos, d’ailleurs. J’ai reversé mes gains à une assoc’-.

Après avoir escalader une heure ou deux (47min18scs en réalité), je m’endors vidé. L’impression de m’être fait chopper l’engin par un aspirateur. Et quand je me réveil, je constate avec amertume que la belle s’est fait la malle.
Elle m’a dépouillé du reste de mon lard-feuille et s’est barré par la fenêtre de la salle de bain.

Elle m’aura bien baisé une dernière fois.

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Dernière édition par Chakal D. Bibi le Sam 29 Mai 2010, 8:09 pm; édité 2 fois
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MessagePosté le: Dim 16 Mai 2010, 12:20 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Hop, hop, hop !!!

Chapitre 3 OUT !!! Plus rapide que n'importe laquelle des publications manga Cool

chapeau bas chapeau bas chapeau bas

Chapitre 3 : Lundi, Eddie le Gentil et Huxley


Je prend une douche, me rase rapidement, attrape une chemise, un jean et une paire de pompes et je suis partit pour mon premier jour de taff’. Je vais bosser dans un atelier de drogues. Amusant. Un travail que je n’ai pas encore eu la chance de faire. Une première.

J’arrive devant la porte blindé par un alliage de titane de l’atelier et frappe 3 coups (original…) comme indiqué sur la lettre que j’ai reçu en main propre d’un anonyme. Un grand black du genre bulldozer m’ouvre avec un air menaçant. Je lui montre la lettre, il plisse ses grands yeux et part dans un fou rire tel qu’il en chiale. Il m’invite à rentrer.

Le couloir mène sur une grande salle où sont disposées une douzaine de tables autour desquelles s’affairent une centaine de bonhommes et de bonnes femmes. Les uns coupent la came, d’autres la pèsent. D’autres encore l’empaquètent ou la goûtent.
Ensuite le grand black qui m’a ouvert me présente à un autre gars, tout aussi impressionnant mais avec de grandes locks couvertes par un bonnet vert, jaune et rouge et son visage était plus sympathique. Il me dit de le suivre. Nous montons deux volées de marches et nous arrivons dans les bureaux du premier étage. Sur notre droite, 5 ou 6 bureaux où travaillent les cadres, des bridés, qui gèrent tout le bordel. Le Taulier avait ses hommes partout, mais ces bridés là semblent être à leur compte. Il y a aussi un blanc, Eddie le Gentil.

Eddie le Gentil avait atterri ici par hasard. Les bridés avaient besoin d’un mec pour discutailler des tarots avec les gros clients de la ville. D’autres blancs.

Avant d’atterrir dans ce business, Eddie le Gentil vivait chez les « saloperies capitalistes » comme les surnomme le Taulier, à New York, aux United States of America. Ce nom fait rêver pas mal de monde par ici.

Eddie le Gentil bossait dans une joaillerie tenu par des juifs sur la 5e avenue, près de Central Park, de 9 heures à 16 heures. Le soir, il faisait des heures sup’ dans une superette de Little Italy. Elle faisait le coin entre Grand Street et Mott Street.
Le patron de la superette « The Happy Jew » s’appelait David Cronenberg. Ce type avait d’ailleurs une passion étrange pour les mouches qu’il élevait dans de grands aquariums. Eddie le Gentil a finit par le buter à grands coups d’un broyeur de diamants qu’il avait piqué à son autre boulot. De fait, il a du pointer ses 83 kilos de bidoche en territoire plus ou moins neutre, ici à Cape Town. Plus ou moins parce qu’il y a encore une paire de bleds où le Taulier n’a pas totalement imposé son emprise et où une révolte se fomente.

Quand il a débarqué dans le coin, son massacre (il avait aussi fait avaler leur bulletin de naissance à la bonne femme et aux deux rejetons de son patron) était déjà connu des mafieux du coin. On aimait pas beaucoup les juifs par ici. Moi je m’en tamponne le salsifis. ‘paraitrait qu’ils gouvernent le monde, que comme ils sont élus par un Dieu quelconque, y’a une loi qui les rend intouchables. Elle a été votée après moult négociations avec le Taulier. Alors forcément quand un cave en déglingue toute une famille, les Révolutionnaires (85% d’entre eux appartiennent ou sont liés à des Mafias disséminés partout à travers le monde encore libre) sont en joie. Ainsi, Eddie le Gentil est accueilli comme un héros.

Et en plus Eddie est diplômé de Chimie, un diplôme qu’il a gagné à Harvard ou je ne sais où. Eddie est donc un expert en tambouilles diverses et, de fait, un expert en fabrication de drogue. Sa spécialité étant un concentré de LSD25 dissous et inséré dans des graines de thé appauvri en tétrahydrocanabinol. J’ai pas bité grand-chose au pourquoi du comment mais c’est pour cette découverte qu’on a commencé à l’appeler Eddie le Gentil. Parce que sa came vous procure le plus agréable, délirant et sécurisé des voyages sur l’autoroute, là-bas, au clair de Lune.
En effet, on n’a constaté que très peu de décès par overdose ou accidents liés à une halluc’.

J’en vu un, d’accident, une fois, à Barça, en bas des Ramblas, près de la grande statue de Colomb, un explorateur qui a vécu il y a quelques siècles déjà. Je revenais d’une soirée incroyable saupoudrée d’une blanche féérie dans un club donnant directement sur la plage au Port Olympique. Quand nous sommes sortis, avec les Rainbow Men, et sommes arrivés sur la plage, un bain de minuit s’imposait. Aussi avec un des gars, on tombe les fringues et courons nus, les trois Mousquetaires au vent, vers l’eau noire gentiment éclairée par Artémis à moitié pétée de ce côté de la Réalité.

Et puis, l’ébriété aidant, je me viande la tronche sur des galets aussi glissants que tranchants. L’eau salée, venin de Poséidon, vient me taquiner un poil les diverses écorchures qui m’habillent maintenant. Je sors presto de la flotte qui pique et entreprend de me sécher avec ma chemise blanche, maintenant bonne pour la poubelle.

Je regagne la jetée, balance le torchon qui me servait de chemise à la poubelle, et prend la route pour rejoindre l’appartement que je partageais alors avec les Rainbow Men (je vous parlerais d’eux en détail mais plus tard, tâchons de ne pas trop nous égarer).

Et puis sur la route, il y a un attroupement. En bon humain que je suis, je ne peux m’empêcher d’aller y jeter un œil. Et là je vois un mec, deux cadavres à ses pieds, des coups de couteaux partout sur la gueule, dans le buffet et dans les couilles. Le mec est mis en joue par deux condés qui lui demandent de se calmer et de s’allonger sur le sol.
Le mec à côté de moi est un pote du cinglé. Il s’appelle Juan, le pote, pas le cinglé. Le cinglé s’appelle Miguel (c’est Juan qui me l’apprend). Juan me dit que Miguel a pris de la mescaline, beaucoup de rhum et quelques grammes de cocaïne.

Miguel est chargé à bloc et débloque complètement. Il s’avance vers l’officier de police McAllister, un irlandais, mains en l’air. Miguel saisit ensuite le canon du flingue avec sa bouche et mime une fellation goulue. L’officier McAllister le somme de reculer et de se coucher au sol, sans quoi il devrait l’abattre.

Mais Miguel continue à boulotter l’arme.
McAllister lui donne un dernier avertissement.
Miguel continue.
McAllister hésite.

Miguel en profite, abat brusquement ses mains et parvient à se saisir du pistolet, le retourner contre McAllister et à lui plomber les molaires de deux bastos. Le sergent-chef McLane, un autre irlandais, n’a rien vu venir non plus, les camés sont imprévisibles.
Il abat Miguel en lui vidant son chargeur en pleine poitrine.
McLane fond en larmes et se précipite vers le corps encore suffoquant de son co-équipier. L’officier-mort-en-héros-au-cours-de-son-service McAllister devait être un brave type.

Ce genre de trips qui virent au cauchemar arrive bien souvent hélas pour que quiconque de censé reste éloigné des dopes du genre acide, hallucinogènes et autres saloperies natives-américaines.

Mais ça n’arrivait pas avec la dope d’Eddie. Il a étudié toute sa vie pour rendre l’existence du camé plus facile et plus sure. Il est gentil Eddie.

Il me colle à la confection d’ acide lysergique diéthylamide, LSD 25, mais m’explique que ce nom peut porter à confusion puisque ce n’est pas un acide carboxylique. Mais ça, comme il le souligne si bien, je le sais surement déjà. En fait, j’en sais foutre rien. Je ne connais pas grand-chose de cette saleté sinon qu’elle existe depuis des temps immémoriaux.

Eddie le Gentil me présente mon collègue de travail. Un blanc, immigré lui aussi. Il s’est barré des ex-Royaumes Unis peut avant que le Taulier ne débarque pour y foutre un peu le boxon. Il s’appelle Huxley. Il connait bien les divers psychotropes pour en avoir consommés un paquet dans un but strictement scientifique (en réalité, il est tout aussi amateur de défonce que n’importe quel cave). Il a publié quelques bouquins du temps où on en avait encore le droit sur le sujet. On parle un petit peu en fumant une cancerette et en trinquant à mon nouveau job avec du sherry de contrebande. Huxley me demande de lui préparer quelques doses de LSD. Histoire d’évaluer mes compétences. Bon, allons-y. Je m’atèle donc à mimer un laborantin expert en conception de drogues synthétiques.

Je commence par suspendre 5,36g d'acide d-lysergique dans 125ml d'acétonurie. Je fais ensuite refroidir le tout à environ -20°C dans un bain d'acétone refroidi avec de la glace. Ensuite, laisser couler une solution de 8,82g de l'anhydride trifluoroacetique dans 75ml d'acétonurie . On surveille la tambouille pour qu’elle se tienne bien à -20°C pendant environ une heure et demie. Si tout est bien fait, tout le bordel se dissous et l'acide d-lysergique est converti en anhydride mélangé des acides lysergique et trifluoroacetique. L'anhydride mélangé peut être séparé sous forme d'huile en évaporant le dissolvant sous vide à une température en-dessous de 0°C.

Mais Huxley m’arrête et me dit que ce n'est pas nécessaire. Tout doit être maintenu anhydre. Mais ce n’est pas grave, ma méthode n’est pas mauvaise du tout, simplement la sienne est meilleure, me confie-t-il.

Enfin bref, continuons. Nous avons maintenant une solution d’anhydrides mélangée dans de l’acétonurie. On y ajoute alors 150ml d'une deuxième solution d'acétonurie contenant 7,6g de diéthylamide. Là, le mélange doit être tenu dans l'obscurité à la température ambiante pendant environ 2 heures.

Avec Huxley et Eddie le Gentil on sort sur la terrasse, derrière la maison, entourée de barbelés, de caméras et de gardes armés déguisés en vagabonds, pour s’en jeter quelques uns. Eddie le Gentil avait récupéré une bouteille en douce d’un whisky directement venu d’une distillerie en Ecosse. Il tient à nous faire goûter sa bibine. C’est bien aimable de sa part. On se vide la bouteille en se racontant un paquet de conneries et notamment à propos d’une gonzesse qu’Huxley avait connu.

« C’était du temps où tu pouvais encore t’envoyer des pétards longs comme ma queue dans les cafés d’Amsterdam. Je m’étais pointé là-bas pour rencontrer une pouliche appelée Cathy. Même qu’elle avait une sœur qui s’appelait Mary et qui tapinait aussi mais du côté de Lille.

Alors j’arrive à l’Abraxas, l’endroit où on s’était donné rendez-vous. Et je me pointe à l’heure convenue. Ce jour-là j’ai pas pris d’acide, j’voulais être sur de pas faire de conneries. J’ai retrouvé la prostipute au bar, en train de picoler du champagne qui était déjà sur ma note. Ca faisait pas une heure que j’étais descendu d’avion et j’en avais déjà pour le prix du billet en putain de champagne. Mais bon, j’avais dit que je me la jouerais roi du pétrole, même que j’avais revêtu mon plus beau costard.

Alors avant d’aller retrouver cette salope qui me filait déjà la gaule de Superman, je fonce aux toilettes prendre un petit acide, un truc vraiment léger, voyez, juste pour décompresser. Mais je décompresse trop alors je m’envois aussi dans les narines quatre ou cinq snifettes. Mais ça m’excite trop et j’éclate le chiotte en porcelaine tapissé de merde et de foutre et de dégueulis de toxico’. Faut que je me re-calme. J’ai plus d’acide. Et puis dans le fond d’une poche de mon costard blanc signé Armani, je retrouve une capsule de morphine que je me plante illico dans la jambe. Ok, là je suis prêt que je me dis, je pourrais encaisser n’importe quoi que je me dis. Mais en fait, non.

Maintenant que je suis opérationnel, je vais rejoindre la petite au bar et commande un whisky. Je l’avale cul-sec et lui dit qu’il est temps d’aller au lit. Elle proteste pas. En fait, elle me chope le gourdin, toujours au garde à vous, et m’entraine vers l’ascenseur tout en me masturbant. Dans l’ascenseur, elle s’agenouille et me taille la meilleure pipe de ma vie. J’ai jamais pris un pied pareil dans la bouche d’une nana. Une langue soyeuse, agile. Elle s’enroulait autour de ma queue comme un Fakir enroule la sienne autour d’un bâton. J’ai pas pu me retenir, je lui ai envoyé la purée en pleine tronche. Mais elle a aimé ça la petite. Ou si ça la dégoutait, elle en a rien montré.
C’était le plus beau voyage en ascenseur de toute ma vie. Par contre, je me demande, quand elle s’est mise à me déballer l’engin et à le pomper de toutes ses tripes, si elle avait vu la p’tite vielle qui observait la scène avec effroi, recroquevillée dans un coin de la cabine…Enfin bref, ça n’enlève rien à la magnificence du moment.

Après ça, on est entré dans le feu de l’action une fois dans ma chambre. Putain de dieu, c’était de la dynamite. Elle m’a demandé de la lui foutre dans le cul sans autres formes de préliminaires. Alors j’ai foncé….Sans savoir…Pendant que je l’enculais à sec, je voulais aller lui titiller un brin le con, voyez, et là, c’est le drame. En lieu et place d’un charmant sanctuaire, chaleureux, humide et accueillant, je me retrouve avec une queue à en faire pâlir la mienne de jalousie entre les mains !
J’étais en train de me taper un putain de transs’ ! Je l’ai cogné et l’ai foutu à la porte à coups de pompes dans le derche. Après ça, j’ai entendu dire qu’il s’était barré chez sa sœur, en France. »

Eddie et moi, on éclate de rire. Et puis ça me revient :

« Ah ! J’me souviens maintenant ! Un copain à moi, Billy, a bousillé une prostipute nommée Cathy du côté du Peuple Belge et on a jamais su pourquoi il avait ça…Maintenant tout s’explique… »

Eddie et Huxley me regardent avec des yeux interrogateurs. Je leur parle d’un pote Billy Boy, et de son frère. Billy Boy est assez marrant comme gars, un esprit libre, sans limites. Un mec qui vit sa vie à cent à l’heure sans se soucier de quoi sera fait le lendemain. Il parle, beaucoup. Et il vole des voitures aussi. Billy Boy a piquer sa première tire avant son dixième anniversaire. Il est toujours fourré avec son frangin, Jimbo. Lui c’est un sacré. Il parle jamais mais il pense beaucoup. Il parait peut être plus posé que Billy Boy mais croyez moi, ces deux gars sont de grands cinglés. Enfin bref, la dernière fois que je les ai vu, ils allaient faire le plein de dope chez Joe la Pince.

Joe m’a dit que les deux loustiques allaient se barrer hors de la ville, se mettre au vert quelques temps. Ils avaient besoin de toutes les saloperies que Joe pouvait leur fournir alors il leur a vendu la « Mallette LVP ». Cette mallette contient tout ce dont a besoin un junky pour une virée digne de ce nom. L’idée vient d’un bouquin de Hunter S. Thompson, Fear and Loathing in Las Vegas: a Savage Journey to the Heart of the American Dream, Las Vegas Parano pour faire plus court.

Dans la mallette on trouvait très exactement : 2 sacs bourrés d’herbe, 75 plaquettes de mescaline, 5 feuilles complètes d’acide en buvards, une salière à moitié pleine de cocaïne, une galaxie multicolore de remontants, sédatifs, hilarants, larmoyants, criants, en plus d’une bouteille de tequila, une bouteille de rhum, une caisse de bière, un demi litre d’éther pur, et deux douzaines de Poppers.

Joe m’a ensuite expliqué que Billy avait défenestré une prostipute du Peuple Belge qui s’appelait Cathy. Elle travaillait avec sa sœur Mary. Jimbo était dans une chambre en train de faire sa fête à Mary tandis que Billy Boy devait se charger du cul de Cathy. Et puis Jimbo et Mary ont entendu le bruit d’une fenêtre qui se brise. Quand ils sont arrivés dans la chambre, Billy Boy dansait le french-cancan sur son lit et Cathy était aller finir sa vie la gueule sur les pavés.

Quand à Mary, il semble que Jimbo lui ait réglé son compte en l’ouvrant du con aux nibards.

Une sacrée paire de cinglés, comme je l’ai dit.
Les deux heures sont passées et l’acétonurie est évaporée sous vide, laissant un résidu de LSD-25 et quelques impuretés. Je dissous le résidu dans 150ml de chloroforme et 20ml d’eau glacée. La couche de chloroforme se retire et la couche aqueuse est extraite à partir des fioles de chloroforme. Les fioles de chloroforme sont combinées et alternativement lavées avec quatre éprouvettes de 50ml d'eau glacée. La solution de chloroforme s’appelle alors Nac2so4, un anhydre sec, évaporé sous vide.

Il s’agit maintenant de purifier le LDS-25 en dissolvant le résidu dérivé du méthanol et en le dépouillant de l’acide lysergique dans une quantité minimum d'alcool. Ajoutez deux fois ce volume de solution alcoolique de KOH de 4N et maintenez le mélange à la température ambiante pendant plusieurs heures. Le tout s’évapore et nous n’avons plus qu’à récupérer le liquide, le mettre en bouteille et ensuite au frigo.

Le grand black hilare vient me chercher pour m’indiquer la sortie. Huxley me dit qu’on testera le produit demain et si l’avis est positif, on pourra bosser ensemble. Je remballe mon sac et je me tire de ce labo de cinglés.

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MessagePosté le: Ven 21 Mai 2010, 2:18 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Chapitre 4 : Mardi, le Chauffeur de taxi et Elliott le Chamane


Après le boulot je prend un taxi, direction le Neighbourood, un rad sur Long Street. Je demande au chauffeur, une barrique d’au moins le poids d’un cheval et sans un pet de poil sur la caillasse, si j’peux m’en griller une. Il me dit que ça lui pause pas de problèmes et même qu’il aime à regarder les gens aspirer la fumée pour nourrir leur cancer. Lui a arrêté de fumer il y a trois ans. Il ne me cache pas que ça n’a pas été une partie de plaisir, il a replongé plusieurs fois avant d’arrêter totalement. Et encore maintenant, il aime à s’griller une petite cancerette quand il est vraiment stressé ou énervé à propos d’une chose ou d’une autre. Sa femme le trompe. Et pas qu’un peu. Il me dit qu’elle aime à se coucher nu sous le premier venu, comme disait le Vieux Moustachu.

C’est pas de bol, l’ami. Bof, il se rattrape avec les prostiputes. C’est tout de même ironique comme situation. Il dort avec une fieffé salope chez lui mais ne peux la toucher et est donc forcé d’aller trainer dans des maisons closes pour se vider les balloches de temps à autres. Je lui propose un acide pour décompresser. Il me dit qu’il a arrêté la drogue il y a quinze ans de ça quand il a rencontré sa blonde plus chaude qu’un feu de forêt et que son salaire de chauffeur ne suffisait plus à couvrir ses p’tites excursions sur l’autoroute du Clair de Lune et la pédicure de madame. Et puis évidemment elle est tombée en cloque d’un p’tit merdeux. Il est même pas sur d’être le père.

« C’est une pine d’oiseau de toute façon », s’exclame-t-il.

De ce qu’il en sait :
« Mon rejeton vit dans un skouatte miteux du côté de Woodstock. Il se défonce au crack. Le crack c’est la pire des saloperies. Il suffit que t’en prennes une fois pour tomber amoureux.
Je me souviens d’un cave que j’avais connu du temps où je dealais vers Garden Center. Ce crétin était constamment défoncé au crack et quand il ne l’était pas…et bien j’peux pas vraiment te dire ce qu’il foutait parce que ça ne semblait jamais arriver. Enfin bref, le cave se pointe et me demande une dose. Il me file les 20 billets, j’me souviens parce qu’ils étaient tâchés de sang. J’ai préféré pas lui en demander la raison.

Et puis le mec se défonce sous mes yeux.
Et puis je vois qu’il commence à partir en vrilles. Tu vois, le cerveau d’un cracker, il ne répond plus à aucune norme. Le crack est un stimulant. En fait c’est de la cocaïne modifiée. C’est l’arbuste de coca qui fournit la matière première. Il faut faire sécher 300kg de feuilles de coca pour obtenir 1kg de cocaïne. Ensuite cette dernière est retraitée chimiquement et donne au crack ses effets plus rapides et plus puissants. Le mec devant moi devient hyperactif. Il me jure être plus puissant et plus intelligent, et puis il se marre. Il se fend la poire sur tout et sur rien, notamment sur ma calvitie. Il me dit que ça fait 5 jours qu’il n’a pas dormi. Je le crois sur parole, quand tu prend cette saleté t’as plus besoin de manger ou de dormir. Ce qui explique les corps décharnés des accros. Et le mec commence à parler. Au début, je croyais que c’était à moi qu’il causait vu qu’on était rien qu’nous deux dans le parc de Garden Center mais j’me suis rendu compte qu’il taillait le bout de gras avec quelqu’un qu’il croyait être juste à côté de moi. Le crack provoque aussi des halluc’ et avec un loustique du genre de celui-ci, qui carbure à la dope, la schizophrénie est un mal courant.
Mais le crack ne fait pas effet longtemps tu vois, et le mec, après cinq ou six minutes de délires en tout genre, redescend brutalement et s’met à chialer et me supplie pour une autre dose. Mais il a pas de flouze alors j’lui suggère gentiment d’aller se faire foutre ailleurs. Le mec me dit de ne pas bouger de là, qu’il revient vite. Il se casse en courant vers Kloof Street. Il tourne le coin. J’entend un coup de feu suivit de cris de bonnes femmes effrayées. Et puis il arrive, couvert de sang, une liasse de billets en main. Les keufs sont après lui mais il continue à courir vers moi, les thunes brandit en l’air, funeste trophée. Et puis les keufs, ils l’abattent sans sommation, dans le dos. Le gars se cambre. Et je vois dans ses yeux que le mec il mate sa vie défiler et qu’il regrette. Il regrette d’être tombé là dedans, d’avoir vendu sa sœur à un mac quelconque pour se payer des doses. Et puis le mec, il tombe, faisant mine de me tendre les biftons. Mais j’ai pas pu en savoir plus, les condés arrivent et j’ai les poches, les chaussettes et le slibard bourrés à rebord de tout un tas de saloperies. Alors je me carapate vite fait bien fait.

Tout ça pour te dire que le crack, c’est vraiment la pire des merdes. »

Le temps qu’il me raconte sa petite histoire, nous arrivons à destination. C’est fermé. Putain de chierie de merde, j’me suis tapé les conneries du taxi pour que dalle ! Le zinc est fermé parce qu’un boxeur, Hurricane, aurait déclenché une fusillade la veille au soir. Le taxi s’est déjà barré. J’en prend un autre pour repartir. Je m’assois à peine qu’un autre mec entre et s’installe à côté de moi. Plutôt étrange comme mec. Un grand noir qui doit bien mesurer une tête de plus que moi, vêtu de quelques haillons dont les couleurs, étonnement, s’accordent relativement bien entre elles. Son crâne chauve est couvert par un bonnet rouge, lui-même couvert par un béret beige. Il porte tout un attirail de bagues, de bracelets et de colliers qu’ils s’amusent à faire tinter entre eux. Une longue barbe cache un visage buriné par les ans,
-ce qui me laisse penser que ce mec est au moins aussi vieux que Mathusalem, un cave chez qui je skouattais du temps où j’étais à Toulouse. Lui et moi partagions un appartement avec deux nanas venues de Serbie. C’était sur le boulevard Richard Wagner qui longe la Garonne. Chez Mathusalem, on retrouvait pas mal d’écrivains, de musiciens, de poètes ou de peintres. Tous des marginaux complètement cinglés qui n’ont jamais rencontrés le succès et qui passaient leur journée ici, dans ce petit appartement toulousain, à s’envoyer des acides et des barbituriques, et à refaire le monde à leur manière.-

Enfin bref, le mec se présente, il s’appelle Elliott. Il me demande si ça ne pose pas de problème de partager le taxi. Je lui demande où il va et il me dit qu’il va là où j’irai car les aliens lui ont dit de m’accompagner. Les aliens…Ouais les aliens. Selon Elliott, l’acrobate en slip qu’on appelait Jésus Christ était un alien et ils communiquent avec les humains par l’intermédiaire de leur esprit mais ces derniers ne s’en rendent même pas compte. Nous ne devons pas être effrayé par les aliens car ce sont comme des anges gardiens. Ils veillent sur nous et nous protègent des grands maux de l’existence.

« Quand j’étais encore un petit garçon, je vivais à Bindura, un petit bled à une cinquantaine de kilomètres de Harare, au Zimbabwe. Je n’allais pas à l’école, il n’y en avait pas à moins de cent bornes à la ronde. Alors j’allais à la chasse et à la pêche. Ou bien j’allais couper du bois dans la forêt ou puiser de l’eau au puits.
Un jour que je courrais la forêt, quelque part du côté du parc national Lower Zambazi, je me suis retrouvé né à né avec un Black Mamba. Une espèce qui est surement éteinte aujourd’hui, à moins qu’elle n’ait survécue à la Grande Chasse aux Serpents de Septembre, y’a douze ans de ça.
Le Black Mamba est une sacrée saloperie, le serpent le plus dangereux d’Afrique. Les ancêtres l’ont baptisés ainsi à cause du Mal qu’il abrite à l’intérieure de sa gueule toute noire. Cette bestiole, en une seule morsure, te balance environ 120mg de venin et se replie, attendant calmement que tu passes l’arme à gauche pour venir te boulotter. Son venin contient des neurotoxines et des cardiotoxines et seuls 15mg suffisent pour t’envoyer voir dans l’autre monde si tes ancêtres ont encore la pêche.

Je me retrouve donc en face d’un animal vraiment mortel. Il se dresse sur sa queue pour m’impressionner, et ça marche, j’en ai chié dans mon pagne. Il mesurait dans les trois mètres et avant même que j’ai pu esquisser un pas en retrait il me mord aux couilles. Ca faisait un mal de chien, comme si mes bourses s’étaient retrouvées sur un putain de grill. Et puis après ça, j’ai commencé à ne plus rien sentir dans les extrémités. Mes doigts, mes orteils, ma queue. Je pouvais plus tenir debout. Je suis tombé juste en face du Mamba qui m’observait de son regard vicieux, attendant mon dernier râle. Ensuite je n’arrivais plus à bouger, mes pensées sont devenues confuses et j’ai gerbé tripes et boyaux. Et puis alors que je sentais cette salope de Mort au-dessus de mon épaule, toute prête qu’elle était à me faucher, j’ai entendu un bruit bizarre et une ombre gargantuesque s’est abattue sur la jungle. Le Mamba a pris peur et s’est sauvé, me laissant crever ici pour rien. L’ombre se faisait de plus en plus grande et je sentais quelque chose s’approcher de moi. Mais là, je sais plus très bien ce qu’il s’est passé parce que je suis tombé dans les vapes.

Quand je me suis réveillé, j’étais noyé dans une cuve d’un liquide vert. Je me sentais plutôt bien là-dedans, même si j’étais encore un peu groggy à cause du venin. Je zieutais autour de moi, tu comprends, pas avec une curiosité malsaine mais plus pour voir où j’avais atterri exactement. On peut pas dire que l’ambiance était à la fête. Les murs étaient tous faits dans un genre de métal blanc et poli, barrés en largeur de deux bandes noires parallèles, espacées d’environ 35cm. A ma gauche, une étrange machine de laquelle jaillissait tout un attirail de tubes et de tuyaux plus ou moins épais. Beaucoup d’entres eux faisaient circuler un liquide rouge qui venait directement en moi. Ils étaient en train de changer mon sang, et donc de me sauver la mise.

Trois écrans géants, en face de moi, surplombaient tout un attirail de claviers d’ordinateur et de boutons de toutes les couleurs, de lumières qui clignotent. Il y avait deux mecs devant les écrans, qui me tournaient le dos dans des sortes de blouse violette. Du bas de la blouse, dépassaient des pattes velues avec des tentacules jaunes qui descendaient le long des chevilles. Je n’en croyais pas mes yeux au début. Et puis il y a eu une sorte de bip, signalant sans doute mon réveil puisque les deux simili-médecins firent volte-face pour s’approcher de moi.

Je vis leurs visages…Mon p’tit pote, c’est le genre de vision qui t’empêche de fermer l’œil pour au moins plusieurs mois. Ils n’avaient pas de visage. Seulement un trou béant dans la capuche violette de leur blouse. Rien d’autre que le néant. Que dalle quoi. Mon gars, j’ai eu une telle frousse que si je n’étais pas déjà dans une cuve de liquide, je me serais senti en train d’me pisser dessus. Et puis les mecs, enfin les trucs, enfin tu m’as compris, m’ont sorti de mon bain et m’ont allongé sur une table qui ressemblait pas mal aux tables en inox sur lesquelles on pose les macchabés, sauf que c’était pas froid du tout. Pas chaud non plus mais bien comme il faut, tu vois ?

Ensuite, ils m’ont parlé. Comme je te le dis mec, ils m’ont parlé mais pas en agitant une quelconque langue entre deux hypothétiques lèvres, non, ils m’ont parlé directement dans mon esprit. Mais je sais pas bien où. Ils ont su trouver la route qui menait à ma Légende et l’ont directement informé que j’avais été choisi pour être leur Messager. Ils m’ont sauvés la vie en nettoyant tout mon système sanguin et immunitaire et renvoyés sur Terre pour prévenir tout le monde que la planète allait partir en flamme et que tout allait péter dans un immense feu de joie ! Mais personne n’a voulu me croire et je passe pour un fou. Mais toi, tu me crois ? »

Nous sommes enfin arrivés à destination, une maison type coloniale sur Upper Buitenkant Street. Une nana en contact avec le boss a accepté de me loger. Ras la touffe du backpeckers. Elliott insiste pour m’accompagner à l’intérieur de la maison et y dormir pour quelques nuits. Pourquoi pas, plus on est de fous, plus on rit. Et j’allais bientôt découvrir que cette petite maison était déjà bien fournie en matière de fous, de cinglés, de sociopathes, de schizophrènes et de désaxés.

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Dernière édition par Chakal D. Bibi le Lun 24 Mai 2010, 7:27 pm; édité 1 fois
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MessagePosté le: Ven 21 Mai 2010, 2:22 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Viens au pays des Gnomes, la, la, la, la, la...


Chapitre 5 : Mercredi, Grimble Gumble


Encore une nuit qui s’achève. Le soleil se lève derrière les rideaux tandis que moi j’ai le regard baissé sur le drap à côté de moi. Il est plat. Aucune forme présente en dessous pour venir le gonfler. Rien. Que dalle. Nada.

Mais bon j’imagine que je ne dois surtout pas me laisser aller à la déprime et qu’un café serré pourrait me faire un grand bien. Je saute du pageot et enfile un jean et une chemise. Avant d’aller à la cuisine je fais un petit détour par la salle de bain, histoire de farfouiller dans l’armoire au dessus du lavabo, voir si je ne trouve pas de l’aspirine ou une saloperie dans ce genre. Je met la main sur le flacon et m’envoie deux dragées dans le cigare avant d’arroser le tout d’un coup de bière. De bière. J’ai *2 ans et j’ai des canettes de bières, au frais dans de la glace, le tout dans la cuvette de mes chiottes. Et un illuminé appelé Elliott persuadé d’être un Messager envoyé par les aliens dans ma baignoire.

Quand j’arrive dans la cuisine, je lance la cafetière et je m’écroule sur une de ces inconfortables chaises en paille à la con. Et c’est mal installé sur cette même chaise, la tronche dans le creux des mains et les cheveux qui poussent à l’envers, que j’essai tant bien que mal de reformer le fil de la soirée passée. Nom de dieu de merde, qu’est-ce que j’ai bien pu branler ?

Bon, rien de bien important j’imagine, sinon je m’en souviendrais. C’est vrai quoi, et puis qu’est ce que j’aurai pu faire de si gravissime ? Coucher avec une inconnue probablement même pas belle, voir carrément repoussante ? Et alors ? Faut bien les combler aussi, les pauvres.

Je me taperais bien un lait.

Il y a des matins, comme ça, où t’aurais préféré rester au lit. Pour des raisons diverses et variées. Ta copine t’as larguée, ta femme s’est barrée, t’as pas payé tes factures, tu t’es fait viré, remplacé, t’as perdu un être cher dans un horrible accident, t’as perdu un être cher dans un horrible accident provoqué par ta cupidité, t’as un cancer, deux SIDA, trois hépatites et l’herpès te ronge la queue, ta secrétaire te fait chanter, ton patron te fait passer sur le canapé, ton père se tape ta meilleure copine, ton copain t’as engrossé. Chierie.

Je me décide à me bouger au frigo et je trouve la bouteille de lait. Vide. Elliott entre dans la cuisine, la barbe couverte de lait encore frais. Chierie.

Je me met en route pour le boulot. Dans le couloir de l’entrée deux hollandaises rencontrées ici, Marte et Marcelle, dorment l’une sur l’autre, le paillasson comme matelas de fortune. En bas de l’escalier il y a Marine, Liza et Amélie, trois boshs, qui se réveillent doucement. Elles ont vraiment une sale tête. Ces filles vivent dans ce squatte depuis quelques mois déjà. On peut pas dire que ce soit la grande fête avec elles mais elles ne viennent pas m’emmerder…Pour le moment. Ca allait bientôt être une autre paire de manches, j’en ferai la découverte à mes dépends.

Je me pointe au labo sur Shortmarket Street. Je sais pas si c’est ma gueule en face de cul ou autre chose, mais le black hilare en me voyant se remet à se gondoler. Enfoiré.
Je passe la porte, les tables, je salue quelques magiciens mettant de la mescaline en flacon et me dirige en ligne droite vers mon atelier pour me mettre au boulot. Dans la sono, je met un Pink Floyd, le premier. Je vais voir au frigo si mes échantillons sont prêts. Ils le sont. Huxley arrive à ce moment-là. Il semble content du résultat. Maintenant, il nous faut essayer. Nous allons sur la terrasse derrière la maison et nous envoyons quelques milligrammes de la substance dans un verre d’eau.

En attendant que notre laisser passer pour l’autoroute du Clair de Lune ne soit validé, nous fumons un thé-roulé du Maroc. Et là, au bout d’environ vingt minutes, on passe les portes et ça devient du grand n’importe quoi. J’ai foiré les dosages. On est aspiré dans un terrier. Comme un terrier de lapins. Sauf que ce sont des gnomes qui vivent là. Et on ne tombe pas vraiment dans un terrier. Enfin on tombe, mais pas dans un terrier à proprement parlé. On tombe au milieu d’un village gnome dont les maisons sont taillées dans le tronc d’un immense arbre probablement centenaire, en fait millénaire. Celles-ci sont situées en hauteur et on y accède grâce à un ingénieux système d’ascenseur. Elles sont reliées entre elles par des ponts de bambous et de lianes. Ils sont malins les gnomes.

Celui qui s’avance vers nous nous dit s’appeler Grimble Gumble. J’ai déjà entendu ce nom quelque part. Il nous explique qu’ici on picole, on dort, on regarde le temps Passé. Enfin je vous raconte ça, je ne savais pas même pas que je parlais le brumgle (la langue des gnomes) alors je ne suis pas tout à fait sur de ce que nous raconte notre nouvel ami Grimble.

« Bienvenue les amis ! Bienvenus au pays des Gnomes ! Faites comme chez vous, je vous en pris. »

Alors ça c’est vraiment fort. Huxley et moi-même sommes tombés dans une sorte de paradis perdu, inconnu de tous et encore vierge de toute souillure humaine. Grimble nous fait visiter leur village (Slemdle) et nous explique rapidement leur histoire. Grimble a l’étrange et agaçante manie de commencer toutes les phrases qu’il nous adresse par un « voyez-vous ».

« Voyez-vous, ça fait un baille qu’on traine nos guêtres sur cette planète. On était déjà là quand vous, les humains, êtes apparus. Mais vous étiez un peu trop…Sauvage à l’époque, pas beaucoup plus qu’aujourd’hui ceci-dit. On vous a quand même appris un paquet de trucs utiles comme le feu ou s’assoir. C’est plus pratique pour chier, non ? S’assoir. »

Huxley demande comment ils s’en sont retrouvés à vivre en ermite.

« Voyez-vous, quand vous êtes arrivés dans les parages, des clans se sont formés. Et ces clans se sont combattus. Et nous on a été pris au milieu de tout ce bordel que vous aviez créé. Lorsque la Guerre des Massues commença, plus de la moitié de notre pacifique civilisation a été balayée par vos affrontements. C’était un sacré foutoir. J’étais encore un môme à l’époque mais je me souviens de tout, de chaque hurlement, de chaque larme, de chaque blessure, de chaque mort. »

Huxley et moi, on se jette un regard. Même si son histoire date d’il y a un paquet de siècles, difficile de lui expliquer qu’on y est pour rien…Que nous ne sommes né qu’il n’y a très peu de temps comparé à lui…Il continue à nous faire un cours d’histoire sur son peuple. Comme je le disais, leur société lorgne énormément sur la république oligarchique instituée à Rome en 509 avant l’acrobate en slip sur sa croix quand Tarquin le Superbe a été remercié pour ses services et destitué par l’aristocratie patricienne. Et Rome a donc été une république jusqu’à l’assassina de Jules César et la monté sur le trône du petit neveu (et fils adoptif) de ce dernier, Octave Auguste.

« Voyez-vous, nous disposons ici d’un Sénat qui élie chaque année deux Consuls qui se partagent les pouvoirs exécutifs et judiciaires tandis que le Sénat garde le législatif à sa charge. J’ai été élu il y a maintenant quatre mois, avec mon cousin, Juggle Gumble, pour occuper le poste de consul cette année. »

En se promenant dans les ruelles de Slemdle, je me rend compte que l’architecture romaine est aussi très présente et que l’aménagement de la cité avait beaucoup en commun avec les anciennes villes de Rome ou Pompéi. On trouve de tout ici, des résidences, des temples, des bains, des commerces. Il y a même un gnome qui vend une sorte de burger à base de viande de moineau dans un boui-boui. On trouve aussi des lieux de loisirs, comme des salles de jeux ou des fumoirs. On passe même devant un strip-club. Huxley veut aller y faire un tour mais je ne suis pas vraiment curieux de la nudité des femelles gnomes.

« Mais enfin mon p’tit pote, il faut élargir tes horizons ! C’est important de connaitre les différents fantasmes sexuels des endroits que tu visites. Je me souviens quand j’étais au Brésil, j’ai vu un show hermaphrodite. Et bien une fois que tu faisais abstraction des braque marres aussi large d’un cul d’obèse, tu ne pouvais que bander de plaisir en voyant la plastique parfaite de leurs nibards ou de leurs lèvres pulpeuses. »

Il peut bien raconter ce qu’il veut, je reste persuadé qu’Huxley est coincé dans un placard dont il a bien du mal à sortir…C’est quand même sa deuxième anecdote sur des transsexuels…

On continue notre ballade à travers Slemdle, Grimble nous racontant le temps béni de l’époque où ils regardaient défiler la chute des empires égyptiens, romains, byzantins. Ensuite, ils ont vu les barbares débarquer et puis ça été le Moyen Age et pour terminer, la fin de la quiétude et le retour de la guerre pour ces braves gnomes.
On a arrive au forum, centre de la cité.

Les gnomes ont vécu pendant un bail sur les terres d’Italie, de France et d’Espagne, mais ont du décarrer fissa aux alentours du XIIIe siècle.

« Voyez-vous, il y avait un chef religieux, Grégoire IX, qui semblait en avoir ras la tiare de ceux qui ne se ralliaient pas à son règne et à ses croyances. Nous avons nos propres idées et avons refusés de les renier. Alors Grégoire inventa un système pour nous chasser et nous mettre à mort en restant conforme à ses textes sacrés, l’Inquisition. Au début, c’était encore gérable, on était repris à l’ordre, banni dans le pire des cas mais rares étaient les mises à mort. Mais ensuite ça a dérapé avec le pontife Innocent III. Cet enfoiré de première a changé les procédures. Avec Grégoire, il fallait qu’on soit dénoncé pour être retrouvé. Avec Innocent, n’importe qui de suspect était aussitôt jugé et tué par des moyens tordus que les catholiques semblaient affectionner.

Voyez-vous, il y a eu un guignol en soutane, Conrad Von Marbourg, qui était en charge du premier tribunal de l’Inquisition. Il avait tous les pouvoirs. Ce mec avait droit de vie ou de mort sur quiconque, du moment qu’il avait eu vent d’un éventuel soupçon, véridique ou non, à propos de la foie de n’importe quel gnome. Mais avec les gars, on lui a fait la peau par un beau jour de juillet, haha ! Il aimait à inventer de nouvelles tortures et moyens d’exécution. Mais voyez vous-même, nous sommes ici dans la Chambre des Souvenirs. »

Nous entrons dans une cavité creusée au fond de l’arbre et descendons des escaliers en spirale jusqu’à atteindre une chambre, faiblement éclairée de deux ou trois torches enflammées.
Sur les murs, sont dessinées des tas d’horreurs, mettant en scène des gnomes torturés et massacrés par des hommes en soutane noire et cagoule assortie.
Une des gravures représente un gnome, suspendu au plafond par les bras et dont les pieds pendaient à hauteur de molosses affamés qui lui dévoraient les jambes au fur et à mesure que les bourreaux laissaient glisser la corde.
Une autre démontre le supplice de la roue. Sur une autre encore, un gnome est assis sur une chaise et ses pieds sont fixés sur une plaque de métal. Au dessous de cette plaque, un foyer brûlant vient la chauffer à blanc. Ils rigolaient pas avec les gnomes les culs-bénis. Huxley prend à nouveau la parole.

« Mais pourquoi nous accueillir avec tant d’amabilité alors que vous semblez nous détester au plus haut point ? »

Question intéressante de la part de mon collègue. Il est vrai que Grimble nous lance des regards de haine et l’attise en venant contempler les gravures macabres de la Chambre des Souvenirs.

Mais on a pas vraiment le temps d’en parler parce que tout autour de nous est soudainement secoué. Un tremblement de terre à te retourner une île des Caraïbes. Et puis on est de nouveau sur la terrasse derrière la maison qui abrite le labo clandestin de Shortmarket Street. Eddie le Gentil fout des tartes à Huxley. Il le lâche alors que celui-ci émerge. Eddie se dirige alors vers moi mais je lui montre que je suis de retour aussi.

« Bon sang de bordel de merde, vous étiez passé où tas de cons ? »
« Eddie, ce mec a trouvé un pass pour Slemdle, c’était incroyable ! »

Etrange…Je me sens parfaitement relaxé et l’esprit net. Pourtant quand tu t’envoie un acide, t’en as pour dix bonnes heures de voyage. Je regarde ma montre. Ca fait plus de treize heures qu’on planait affalé comme des paillasses au bord du jardin. On est jeudi. Chierie.

« Slemdle ? Qu’est ce que c’est encore que ces conneries, tarés de drogués ?! Le nouveau, j’ai un job pour toi. Je veux que tu te rendes sur Harrington Street et que tu descendes quelqu’un pour moi. »

Après avoir jouer les petits chimistes, je dois maintenant jouer de la gâchette pour gagner l’entière confiance d’Eddie le Gentil. Bien qu’il me semble évident qu’il ne me fera jamais complètement confiance. Impossible dans ce milieu.





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Dernière édition par Chakal D. Bibi le Mer 02 Juin 2010, 11:32 am; édité 2 fois
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MessagePosté le: Lun 24 Mai 2010, 7:22 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Hey, hey, hey !!! Sortie en fanfare du chapitre 6 avec en héros principaux Helena Mijtus A.K.A La Secrétaire et Azeban le Raton Laveur !!!

Alors si venez vite lire ce nouvel épisode des tribulations de votre anti-héros à 4 pattes préférés !!

Et si vous n'avez pas lu les 5 premiers chapitres...Bah c'est pas vraiment gênant pour la compréhension générale du délire mais ce serait p'tet mieux de les lire quand même ^^ (en plus j'ai corrigé toutes les coquilles)

Et si vous trouvez que c'est un peu long et usant pour les yeux sur l'écran (et je vous comprend), vous faites comme moi avec les longues divagations de Saha', JSP, Fabest, GND, Sei', Hyrimoku, Tsoing et tant d'autres qui sont passés par ici, vous imprimez le texte et vous vous le lisez tranquillou tranquille au plumard Very Happy Very Happy

Bon allez, j'arrête mon numéro (chargé de comm. l'exige) et vous laisse à la lecture (ou pas) de ce sixième chapitre d'Un Chacal à Cape Town.





Chapitre 6 : Jeudi, La Secrétaire et le Raton Laveur


Mon ordre de mission est dans le genre simple et concis. J’ai une cible, je l’élimine et je rentre au bercail sans demander mon reste. Oui mais comme toutes les missions faciles, celle-ci allait joyeusement se transformer en bordel ingérable. A cause d’un foutu raton laveur.

Je me fais donc la belle après qu’Eddie nous ait copieusement enguirlandé comme des gosses, Huxley et moi, pour notre petite escapade spirituelle. Mais je ne ressens aucun mal. J’aurai du noter tous mes dosages, on dirait bien que j’ai inventé, sans le vouloir, une sacrée dope.

Ma cible se trouve sur Harrington Street. C’est environ à 20 minutes à pieds. Je vais marcher, c’est une belle fin de matinée. Je descend donc Shortmarket Street, traverse Loop et prend par le Garden Center pour rejoindre Buitenkant. Là je n’ai plus qu’à marcher cinq minutes vers le sud pour retrouver Harlington. La Secrétaire a établie domicile au 137 de la rue.

Cette rue ne m’inspire guère confiance. Voila tout à fait le genre de coin où je n’aimerais pas trainer de nuit. La plupart des bâtisses sont dans un état avancé de détérioration et les quelques badauds qui restent assis sur les porches des maisons n’inspirent pas une grande confiance…
Je trouve sans mal le bâtiment recherché et constate qu’il s’agit en fait d’une studio gallerie d’art. La Secrétaire, de son vrai nom Helena Mijtus, a son bureau au troisième étage. Avant de partir, j’ai parcouru son dossier en piochant dans les données fédérales. J’ai accès à toutes sortes d’informations grâce à mon job. Mes boss ont beaucoup d’influences dans diverses institutions mondiales. Ils sont partout, étendant leur toile à tous les niveaux, judiciaire, fédérale, monétaire et politique.

Helena Mijtus est âgée de 37 ans et a été mariée quatre fois. Elle est aussi la veuve de ses quatre maris.
Helena était originaire des Pays-Bas. Elle grandit au sein d’une famille en précarité constante, et ce à cause du très mauvais sens des affaires de son père, Sven, qui s’empêtrait dans des créations d’entreprises de plomberie toutes plus foireuses les unes que les autres. Adolescente, elle ne souriait pas beaucoup, ne riait jamais. Elle s’ennuie et déteste sa famille. Sa mère, Abigaïl, a été emportée par la maladie le jour de son treizième anniversaire et sa sœur, Johanna, a été violée, puis assassinée par son propre mari et deux de ses amis treize ans plus tard, jour pour jour.
Sven lui reprochait la mort de sa femme et de sa « Jojo » alors qu’Helena n’y était pour rien. Il disait qu’il serait le prochain, qu’il aller mourir le jour du 39e anniversaire de sa fille. Mais était-ce sa faute à cette triste Helena si son anniversaire semblait être un jour maudit pour les Mijtus ?
Entre la mort de sa mère et de sa sœur, Helena fit des études médicales mais, faute d’argent, du se rabattre sur une petite école d’infirmière à la place d’une grande université de médecine.

C’est après la mort de Jojo qu’Helena commença à vraiment perdre les pédales. Stimulée par un évident besoin de vengeance, elle s’intéressa de près à la confection de poison de toutes sortes. Le premier fut testé sur son propre père dont elle ne supportait plus les incessants reproches. Celui-ci mourut après avoir vidé cul-sec un verre de vodka empoisonné préparé par Helena. L’effet fut immédiat. Sven Mijtus eut à peine le temps de savourer la boisson qu’il tombait dans un dernier râle. Ensuite, Helena s’attaqua à son beau-frère et ses amis, responsables de la mort de sa chère sœur. Et puis elle dut quitter précipitamment les Pays-Bas après avoir passé avec succès et haut la main son diplôme d’infirmière.

Helena Mijtus était donc infirmière avant d’être la secrétaire d’Eddie le Gentil. Et c’était, parait-il, une grande spécialiste de l’euthanasie. Elle prit goût au meurtre et se découvrit même un don pour la confection et le dosage de poisons de toutes sortes, absolument indétectables dans l’organisme de la victime qui en aurait malencontreusement ingéré. D’ailleurs, par une étrange coïncidence, les quatre maris décédés d’Helena partaient à leur travail de plombier (ils étaient tous plombiers de profession) avec un thermos rempli d’un café fait maison par Helena. Il ne fallut pas longtemps à la Mafia de Cape Town, moins qu’à la police locale semble-t-il, pour faire le lien. Alors ils lui ont proposés le job de secrétaire d’Eddie. Pour elle, c’était tout bénéf’, elle pouvait se mettre à l’abri et continuer à se faire de l’argent. Mais il semblerait que ce n’était pas suffisant pour elle. Elle a piqué un paquet de frics et de dopes au labo. 250.000$ en liquide et 250.000 autres en cocaïne. Eddie n’a pas appréciée. Alors maintenant, je dois la faire disparaitre. Définitivement. Le plus simplement et proprement possible.

On finit fatalement par payer ses conneries un jour ou l’autre. Je me demande quand ce sera mon tour…

Je monte rapidement l’escalier délabré en béton fissuré jusqu’au troisième étage. Je sors mon flingue, un vieux colt à l’ancienne, et vérifie le barillet. Les six balles sont là et le canon est propre. Je suis sur le pallier quand j’entend une bonne femme hurler à la mort. Un bruit sourd retentit à travers la porte, comme un corps qu’on aurait projeté dessus. Je me décide à ouvrir et le spectacle qui s’offre à moi aurait fait cracher tripes et boyaux à plus d’un cave.

Les murs blancs sont couverts de sang et les rideaux tirent sur le tampax usagé. Au sol, mes pieds baignent dans trois ou quatre centimètres d’hémoglobine encore fraiche. Deux corps trainent au sol, le pantalon baissé, cul à l’air et la tête arrachée. En parlant des têtes, elles ne se trouvent d’ailleurs pas très loin. Les visages sont figés par la terreur et lacérés de part en part. Comme s’ils s’étaient pris une torgnole par Freddy Krueger.

Au fond de la pièce, une porte entrouverte, la poignée encore gluante du sang non-coagulée, donne sur un long corridor qui me fait songé au couloir de la mort. Sur les murs sont affichés des portraits morbides. Une femme nue, le ventre ouvert en deux au niveau de l’utérus, tient un bébé couvert de sang dont le cordon ombilical est toujours relié à la femme.
Un homme vêtu de cuir et cagoulé se la fait copieusement mettre entre ses deux fesses velues par une sorte de croisé de rhinocéros et d’écureuil...

Ces tableaux obscènes et immondes tapissent toute l’étendue du couloir, une quinzaine en tout. Je contemple cet art macabre, me perdant dans mes pensées quand le crie d’une femme retentit et me ramène sur la terre ferme. Je dois toujours buter la Secrétaire mais plus les choses vont et plus je me dis que quelqu’un est en train de se charger du boulot à ma place. J’accélère le pas et lève mon arme quand j’arrive au fond de la galerie des horreurs. Je pousse la porte brusquement et déboule dans la pièce, l’arme en joue. Mais je la baisse aussitôt quand je vois ce que je vois. Un homme a la tête écrasé sous un bureau, il est encore vivant alors que le poids de son fardeau pèse de plus en plus sur son crâne. Ses yeux, injectés de sang, sortent de leurs orbites et les os de son crâne craquent dans un bruit de gâteaux secs. Il finit par éclater dans une giclée de cervelle, d’os et de sang. Et ca salope mes fringues. Heureusement que j’ai laissé mon trois-pièces au placard ce matin. Mais quand même, ça ne se fait pas.

Je continue mon chemin et ouvre la dernière porte qui donne sur un petit bureau. Dedans je trouve la Secrétaire, le cul en buse sur un tapis persan beige et vert avec des nuances de pourpre. Un bruit émane d’elle, comme le vibreur d’un cellulaire. Sauf que c’est bien un godemiché qu’elle a planté dans le colon jusqu’à la garde. Un raton laveur monstrueux, mesurant dans les 150cm pour 62kg, semble prendre un plaisir malsain à lui déchirer les intestins avec son sex-toy.

Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?!

Le raton laboure avec ardeur cette pauvre Helena. Il prend tellement son pied, sa patte, qu’il ne me voit même pas. Je lève mon arme, bute le raton et achève Helena, encore suffocante. Mais l’animal n’est pas mort. Je lui ai pourtant collé un pruneau en pleine poitrine. Il se relève et me bondit dessus. J’esquisse quelques pas vers la gauche et le raton vient se flanquer dans le mur.

« Bordel de merde ! T’es qui enfoiré ? »

Evidemment il parle. Je lui retourne sa question.

« Je m’appelle Azeban. »

Nous nous regardons dans les yeux quelques secondes. Chacun sondant l’âme de l’autre. Je ne cille pas. Lui non plus. Il déclare le match nul. Je lui dis que je ne suis pas d’accord, que c’est moi qui devais liquider la Secrétaire.

« Cette salope ? Elle méritait ce châtiment. Elle a empoisonnée une petite rivière dans les terres du Nord des United States of America, ce qui a causé la perte de plus de la moitié de ma tribu. »

Alors il vient de là-bas…Il m’apprend ensuite que lui et les siens vivaient dans une petite forêt du Vermont, pas loin de la frontière avec la Nouvelle France (avant d’être conquise à son tour par le Taulier, la France s’était implanté au Canada et avait pris le contrôle du pays pour le rebaptiser ensuite. Je me souviens que c’était arrivé du temps de Zébulon 1er ) et qu’il a connu Helena à l’époque où celle-ci était encore une infirmière euthanasique. Elle était venue rencontrer Azeban dans le but de collecter de nouvelles herbes pour ses breuvages. Elle avait dit que c’était pour tuer le mal qui habitait son chat. Et Azeban l’a cru. Il lui a montré certaines plantes et quelques champignons assez toxiques pour tuer cuisinés avec habileté. Ce qu’Helena était tout à fait capable de faire.
« Un matin, Helena est donc partie à la cueillette pour récolter quelques denrées afin d’accomplir ses funestes projets de « marricide ». Elle passa la matinée à courir les bois et les montagnes à la recherche de son Graal. Quand elle l’eut trouvée, elle revint au village et s’enferma à double tours pendant deux jours et deux nuits.

Le matin du troisième jour, elle avait disparue et nous constations sans comprendre le décès de plusieurs raton laveurs. A la fin du troisième jour, plus de la moitié de la tribu avait été décimée. Il nous fallait éclaircir ce mystère le plus vite possible. Je n’arrivais pas à trouver d’explications aux décès de mes frères et sœurs, même en pratiquant des autopsies. Alors je me suis enfermé à mon tour pendant deux jours et deux nuits afin de méditer, espérant que les Dieux m’apporteraient une réponse. Ce qu’ils firent gracieusement.

Le matin du troisième jour, je sortis de chez moi avec la clé de ces mystérieux décès, l’eau ! Mais hélas, je le devinais trop tard, toute ma tribu avait succombée au poison que cette salope d’Helena avait mis dans la rivière pour tester sa recette…Depuis ce jour, je ne vis que pour la vengeance. »

Je comprend mieux maintenant la rage et l’acharnement d’Azeban à tuer la Secrétaire et ses collègues. Bien j’imagine donc que ma mission ici est terminée. Je n’ai plus qu’à me retirer avant que les condés n’arrivent. Je salue Azeban et lui souhaite bonne chance pour la suite. Il m’explique son projet de devenir un justicier, protecteur de la ville. Sa ville.

La morale de cette histoire, c’est qu’il ne faut pas faire chier un raton laveur.

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parpaing
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MessagePosté le: Mar 25 Mai 2010, 5:56 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Désolé de pas avoir posté plus tôt, j'ai juste lu le prologue et le premier chapitre par faute de temps, mais j'essaierai de lire la suite plus tard, éventuellement, j'éditerai mon message.
Je m'attendais à un truc un peu romancé, mais pas à ce point, plus grand chose à voir avec un journal de bord qui nous fera découvrir Cap Town Wink
Par contre, c'est comme d'habitude maitrisé malgré les emprunts qui font forcément penser à Clockwork Orange.
J'aime beaucoup les univers fictifs qui s'inscrivent dans une sorte de pseudo utopie qui lorgne plutôt du côté de la dystopie, donc le cadre est vraiment super. Le perso principal est également intéressant, et je le préfère aux autres personnages que tu avais décrit dans d'autres textes, dans lesquels il y avait pas mal de meurtres gratuits et qui tranchait (no pun intended) dans l'univers qui était décrit, le seul truc qui me "chagrinait" un peu.
Bref c'est bien écrit, et je crois que ce que j'aime c'est le style finalement très anglo saxon de tes textes: tu joues beaucoup sur les mots (cancerette), en emploie d'autres mais à raison ("la Légende" ma bien fait marrer), et il y a énormément de figures de styles, principalement métaphores et comparaisons, et j'ai adoré l'analogie entre le moustachu et l'entraineuse d'aérobic.
Que du bon donc, faudra juste que je trouve le temps de lire la suite et je t'en dirai davantage!
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MessagePosté le: Mar 25 Mai 2010, 6:40 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Wah bah merci beaucoup mec Laughing Ca me fait pléz' de lire une critique pareille ^^

Non, effectivement rien à voir avec un journal de bord bien que tous les personnages présentés sont des gens que j'ai vraiment rencontré dans les bars, taxis ou trains et avec qui j'ai discuté. Bien sur le trait est à chaque fois grossi mais la base est toujours réelle (genre Herbert s'appelait en fait Mathieu et allait au Japon retrouver sa compagne, le délire avec les gorilles de la sécurité c'est parce qu'à l'aéroport, à peine descendu de l'avion j'me suis fait emmerder par deux mecs qui voulaient absolument me porter mes valises pour "seulement" 15€ xD)

Enfin v'la, encore merci à toi Wink

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MessagePosté le: Mar 25 Mai 2010, 8:32 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Franchement t'as un super style, j'adore! C'est très bien écrit, c'est clair, précis, t'as la classe sérieux! Bien joué!

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MessagePosté le: Mer 26 Mai 2010, 7:06 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Allez hop hop, p'tit retour dans le passé de votre narrateur préféré Very Happy

Chapitre 7 : Vendredi, les Rainbow Men Part. I : Rakosta le Vert


J’ai fait mon rapport à Eddie le Gentil. Il s’est d’abord royalement payé ma tronche pour ensuite me gueuler dessus en me crachant au visage les grandes Eaux de Versailles saupoudré de son haleine déjà chargé de café et tequila. La journée s’annonce sympa. Je me fais chier comme un rat. On doit rester sobre Huxley et moi. Même pas droit à une tisane. Eddie le Gentil n’est pas si gentil que ça et nous tient à l’œil comme le pion du lycée me guettait pendant les heures de colle.
J’aimais bien le lycée, avec les Rainbow Men.

Ah le lycée…Quelle magnifique période que celle-ci. Je regrette pas mais j’en suis nostalgique. A l’époque, on avait juste à titiller un peu la Vie pour la provoquer et la rendre intéressante. C’est là bas que j’ai fondé avec cinq autres lascars dans mon genre, le gang des Rainbow Men. C’est un peu puéril mais c’était nous et personne d’autre. Nous contre le reste du monde. Nous foutant des bordels monstres dans les rues de Barcelone, Lille ou Bruxelles en prenant, quartier par quartier le contrôle de la ville. Je vais commencé par vous en présenter un. Si je fais les cinq d’un coup, ce chapitre va devenir indigeste.

Il y avait Rakosta le Vert, un mec qui venait des terres d’Andalousie, dans le sud de l’Espagne. Petit, il courrait les rues, jouant les pick-pokets et les piques assiettes pour survire.
Parce que du haut de son mètre 65 en comptant l’afro et ses 51kg tout mouillé, il en a chié le gaillard. Alors il s’est démerdé comme il pouvait et il a joué les voleurs à la tire jusque l’âge de 16 ans environ. Il trainait encore ses pattes du côté de Grenada. Là, il a fait la rencontre d’un vieux. Un prof à la retraite si j’me souviens bien. Et ce vieux, il s’appelait Ernesto. Un philosophe qui enseignait à l’université de Barcelone. Maintenant il n’y était plus. Enfin bref, ce vieux, Rako à essayé de le braquer mais, pour la première fois depuis ses 6 ans, il se fait prendre la main dans le sac ! Alors il se débat pour que le vieil Ernesto relâche prise mais il veut pas le lâcher.
Il regarde Ernesto droit dans les yeux et le mec lui dit :

« Dis moi p’tit gars, pourquoi t’es pas à l’école ? »
« Et qu’est ce que je pourrais bien y foutre à l’école vieux charlot ?! »

Le vieux reste parfaitement calme et se présente. Il demande son prénom au Vert, celui-ci lui dit d’aller chier dans un yaourt et le vieux se fend la gueule.

« P’tit gars, tu m’fais bien rire. Je t’emmène avec moi sur le continent d’en face et je vais t’inscrire dans mon école pour les mecs dans ton genre qui n’ont pas froid aux yeux. Le cursus se fait en six ans et quand tu seras sorti de là tu pourras te faire un beau paquet de pognon si tu as réussi tes examens. T’auras plus à jouer les crevards dans ce bled. Qu’est-ce que t’en dis ? »

Le gamin n’hésite pas une seule seconde. Il accepte l’offre aussitôt qu’il entend le mot « pognon ». Alors le voila partit pour le Togo et il intègre la Banana School.

Un nom qui prête à sourire, pourtant la Banana School était loin d’être chose facile et pour la première fois de sa vie, Rakosta s’est mis à utiliser la cervelle qu’il se trimballait pour être chose que ses p’tites combines.

Ici, on apprenait très vite toutes les combines possibles et imaginables pour arnaquer n’importe qui, de la grand-mère un peu sénile au ministère des Finances. Il sort dans le peloton de tête de promo au bout de six ans.

Tout cela peut sans doute paraitre contestable mais cette école, comme vous l’avez compris, est loin d’être une école ordinaire. Là-bas, les Révolutionnaires bâtissent le futur. Mais ceux-là sont une branche indépendante secrète. Je ne peux, hélas, vous en dire plus pour le moment.

Comme Rakosta, un paquet de gamins-vagabonds se sont fait ramasser par les recruteurs comme Ernesto et ont été ramenés à la Banana School avec la promesse d’un bel avenir s’ils sortaient diplômés. Mais cette école, c’est pire qu’un camp de marines ou de bridés.

L’examen final consiste à mettre en exécution tout ce que avez pu apprendre au cours de l’année. Alors il vous lâche dans un bled paumé d’Argentine. Vous êtes avec toute une équipe, contre une autre. Deux promos qui s’affrontent. Tout au long du cursus, les deux camps ont vécus ensemble, dormis ensemble, soufferts ensemble, baisés ensemble. Maintenant ils doivent se foutre sur la gueule en se servant de tout ce qu’ils ont appris durant les six dernières années…

All the children are insane
All the children are insane
Waitin’ for the Summer Rain,


Comme chantait le Lézard Roi pour signaler la Fin. Et bien ces cons, c’est exactement ce qu’ils ont fait. Ils ont tous pétés les plombs, ils occultent de leur coeur et de leur mémoire et de leur Légende ce qu’ils ont partagés et se foutent sur la gueule dans une symphonie magistrale de hurlement, de sang, de douleur, de déchirement et de tristesse. Toutes ces notes raisonnent dans le ciel de leur opéra tragique et se fracassent les unes contre les autres dans un tonnerre assourdissant.
Le Sourd n’aurait pas mieux fait.

Pour conclure, l’équipe de Rakosta a survécue. Nous avons donc obtenus notre diplôme avec mention. C’est dans cette école qu’on s’est rencontrés la première fois avant d’être séparés quelques temps par le destin.

Ernesto est allé le voir pour le féliciter et lui proposer un job en France, à la Ville des Lumières. Il devait intégrer un des quartiers, le 93 et écouler du thé produit par les associés d’Ernesto. Ce dernier n’avait pas menti. Il était bien partit pour se faire un beau paquet de pognon. Moi, j’ai été envoyé ailleurs, vaquant à d’autres occupations tout aussi moralement contestable.

On s’est retrouvé quelques années plus tard, au lycée.
Au début,on s’est longuement disputé le marché des cartes DBZ (pour environ 15€ vous aviez un sachet avec 5 cartes Dragon Ball Z et 5 thé-roulés). Finalement on s’est associé, en souvenir du bon vieux temps. Le nombre d’élèves pris dans les guerres de gangs diminués fortement la démographie et, en conséquence, la fréquentation des clients. Alors on s’est associés. On est rentré ensemble dans le business. Mais du coup, on était maintenant plus gros et on allait avoir besoin de renforts pour gérer les choses correctement. Du coup on a fait appel à El Razon le Rouge, un espagnol lui aussi qui a vécu dans les bas fonds de Barcelone, mais je vous en parlerais une autre fois.

Enfin bref, voila où s’égare mes pensées pendant que je me fais chier comme un paraplégique devant un film porno. Eddie me surveille toujours et Huxley semble nerveux. Il me dit qu’il ne tient plus et fonce au toilette se taper quelques railles. Il revient en bondissant partout comme un chihuahua en chaleur. Eddie se jette dessus et lui éclate la tête contre le mur. Je n’avais jamais vu Eddie dans une telle colère. Et pour cause, un de leurs labos, en Jamaïque a été ravagée par les militaires. Sauf que c’était pas vraiment des militaires parce que maintenant c’est un putain de fourguer d’opium qui contrôle le business.

Voila qui me rassure, les infos que j’ai envoyé à mes boss sont bien arrivées à destination. La machine se met en marche et je ferais bien de me tenir à carreau afin de ne pas éveiller les soupçons. Déjà qu’Eddie m’a dans le collimateur…Mais bon, je doute qu’il ne fasse le lien entre un labo en Jamaïque et moi à Cape Town. Je dois faire gaffe à mes arrières si je ne veux pas me retrouver avec les couilles dans un mixer et un flingue sur la tempe.
J’ai réussi à percer l’ordinateur d’Eddie cette nuit, chez lui, tandis que celui-ci était à un rendez-vous avec son père, Joe le Cabot.

C’était la nuit dernière, juste après avoir fait mon rapport de mission à Eddie

S’il avait remarqué une quelconque trace d’effraction, je me demande s’il le ferait savoir…Je ne sais pas vraiment comment la jouer avec ce cave alors on va y aller à la cool.

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Dernière édition par Chakal D. Bibi le Sam 29 Mai 2010, 10:27 am; édité 1 fois
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MessagePosté le: Jeu 27 Mai 2010, 7:13 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Parce que les flash-backs, c'est in Cool




Chapitre 8 : Jeudi soir, Chuck le Chasseur et un pauvre cave


Je suis sorti du labo vers 19 heures et j’ai descendu la petite rue de Shortmarket. Je savais qu’Eddie devait retrouver son vieux sur West Sommerset à 19h30. S’il voulait y être à l’heure, il avait intérêt à se magner le train. Il pleut, chierie.

Eddie le Gentil avait ses appartements sur Woodstock. Je ferai probablement mieux de repasser chez moi pour enfiler un gilet pare-balles. C’est un vrai nid à truands ce coin de la ville. Je veux dire, plus que partout ailleurs dans Cape Town. Si vous cherchez à faire buter quelqu’un sans vous salir les mains, filez lui rencard là bas.

Le truc, c’est que c’est pas tout proche du centre-ville et je commence à en avoir ma claque des cinglés que je rencontre dans les taxis. J’ai appris à braquer toute sorte de voitures, il est temps de mettre en application mes connaissances. Je me dirige donc vers une magnifique Durango rouge de la fin du XXe siècle. Mais il y a déjà un cave à l’intérieur. Je m’apprête à dégainer mais il me fait signe de la tête de monter. Je m’exécute, une main sur mon arme.

Il démarre sur les chapeaux de roue. Il porte un stetson noir avec une dent de requin fiché dans la bandelette de cuire qui cercle son couvre-chef. Il a une veste de cuire sans manche au dessus d’un marcel blanc, un blues jean et des santiags marrons. Un sacré nom de dieu de cliché ambulant. Il s’appelle Chuck. Je l’aurai parié. Et quand Chuck parle, tu la fermes et tu l’écoutes. Je l’apprend à mes dépends quand il me demande où je vais. Je lui dis que je vais à Woodstock, il veut savoir ce que je pourrais bien aller traficoter dans ce quartier. Il allait se lancer dans une anecdote, je lui ai dit de la fermer, il m’a éclaté la gueule sur la boite à gants.

Après ça, je l’ai fermée. J’aurai pu simplement lui coller une balle entre ses globes rougis par le whisky mais finalement je me dis que son histoire pourrait être marrante. Ce genre de mec, qui t’emplâtre le premier type venu, ne peut qu’avoir des histoires marrantes.

Et pour cause, il me sort tout un paquet d’histoires, depuis son adolescence au Texas jusqu’à son présent à Cape Town.

« Quand je suis arrivé ici, c’était un sacré beau merdier. Les frontières entre les différents gangs n’étaient pas encore définie, le gouvernement n’arrivait plus à lier les deux bouts et l’ombre du Taulier s’étendait au nord. Il pleuvait du sang par hectolitres dans les rues, une vraie boucherie. Tout le monde se foutait sur la gueule pour récupérer des miettes du gâteau. Les Révolutionnaires ont mis un peu d’ordre dans tout ce bordel. Ils ont usé de la manière forte en assassinant un par un les leaders ennemis. Les gangs se sont dissous, plus personne n’osait les défier. Ils ont assis leur règne sur la ville malgré la présence du Taulier, discrète, certes, mais réelle.

Enfin bref, moi j’ai longtemps joué de la pétoire pour gagner ma vie. J’ai été chasseur pour le MAC (Mouvement Anti-Camés). J’ai jamais bu blairer ces enfoirés de junky alors pendant quelques années, dans le Texas, au Nevada, en Californie et au Nouveau-Mexique, je dessoudais des drogués. Depuis cette voiture mon p’tit gars, j’en ai allumé un paquet. Dès que j’en voyais un qui s’allumait un thé-roulé ou se faisait une piquouze en douce au fond d’une ruelle, je sortais ma winchester et je lui plombais la huffe avant qu’il ait atteint le Nirvana l’enfoiré !

J’ai conservé chacune des douilles que j’ai utilisé dans ma Mission. Pour le moment, j’en totalise 2,847. J’espère atteindre les 3,000 avant de me faire zigouiller à mon tour.

Enfin je ne fais plus la chasse officiellement. Je me suis fait virer par le MAC après avoir fait un carton au fusil sniper dans un lycée où une demi-douzaine d’individus mineurs s’offraient une partie de pikouze générale. Mais il y a eu quelques balles perdues. J’ai du en descendre sept ou huit de plus.

Ils ont eu bien du mal à étouffer l’affaire les collègues, c’était un vrai boxon ! Ha ! Ha !
Ils m’ont fait passer un alcotest à mon retour. J’avais plus de 2,5g, ils m’ont dit que c’était intolérable, je leur ai dit d’aller se faire foutre. J’ai fait mon paquetage et j’ai débarqué ici où c’était la guerre civile. On risquait pas de m’emmerder pour quelques balles égarées.

Nom de dieu ! Quel pied cette époque ! Une putain de foutue vendetta qui a vu canner pas loin de 4,500 gars comme toi et moi, rêvant juste de toujours plus de libertés. C’était absolument dantesque comme truc. Une frénésie totale, la jouissance absolue. Et puis, un semblant de paix est revenu. Pour contrer la chute démographique j’imagine. Enfin, on peut toujours zigouiller qui on veut sans trop s’inquiéter des conséquences. Tiens, regarde celle-là par exemple. »

Chuck ralentit. Sur le trottoir, en face de nous, s’avançait une bonne femme toute chancelante. Elle s’arrête et sort une boule d’aluminium, une paille et un briquet. Elle regarde autour d’elle et se paye une défonce au crack à l’ancienne. Chuck sort son calibre et l’allume d’une bastos en pleine poitrine. La bonne femme s’écroule sur le trottoir, de la fumée blanche se faisant la belle entre ses lèvres gercées et craquelées. Quel fils de pute !

« Ha ! Ha ! Alors, t’as admiré le carton ? Ha ! Ha !”

Ce seront ses dernières paroles. Je sors mon calibre à moi et lui plombe la cafetière sans sommation. Ce genre de pourriture extrémiste ne mérite que de crever la gueule ouverte. Je le vire de la voiture et le laisse sur le trottoir, 400 ou 500 mètres après la bonne femme plombée.
Je me colle au volant et je met les gaz vers Woodstock. Ce n’est plus très loin.

J’arrive donc assez rapidement sur Victoria Road, juste avant l’intersection avec Attona Grove, devant la maison d’Eddie le Gentil. Y’a quelques mecs qui trainent dans la rue et qui ne me regarde pas d’un bon œil. Alors je continue tranquillement ma route, comme si je ne faisais que passer, sifflotant pour démontrer mon innocence.

Je fais le tour du pâté de maison et me gare un peu plus loin, en roulant feu éteint. Je sors discrètement de la voiture en jetant des regards par-ci, par-mi. Pas une chèvre qui pète. Alors je traverse la petite rue et saute le mur du jardin d’Eddie. J’me viande comme une merde sur la pelouse glissante, à cause du coup de pluie de tout à l’heure. Heureusement, il ne semblait pas y avoir d’alarme ici. Je remonte le jardin vers la porte de derrière. Là par contre, y’en a une. Je tâte les murs délicatement, comme avec une paire de seins ou un puceau avec sa queue, à la recherche du boitier électrique. Bingo ! Je l’ouvre doucement et traficote un peu les fils. Le système de sécurité devrait être HS. Je tourne la poignée de la porte et cette putain de saloperie d’alarme retentie ! Je sors le calibre et allume simplement le boitier. L’alarme ferme sa grande gueule. Je tend l’oreille, pas de mouvements, pas de sirènes, pas de pneus qui crissent…Que dalle…C’en est plus flippant que rassurant. Mais j’ai pas vraiment le temps de réfléchir à tout ça, ce con de Chuck m’a ralentit, Eddie peut rentrer à n’importe quel moment.

Le parquet craque derrière moi alors que je sors de la cuisine et longe le couloir pour prendre l’escalier qui s’y trouvait et grimper au premier étage. Je fais comme si je n’avais rien entendu et attend que l’enfoiré de fourbasse sournoise derrière moi soit le plus proche possible pour me retourner en dégainant et en lui braquant mon arme sur le rassoudok. Je le plaque au mur cet enfant de putain. Il est masqué, je lui vire le déguisement. C’est un pauvre mec d’une trentaine d’année, un peu paumé, mal rasé et puant l’alcool…Comme moi quoi. Toujours est-il qu’il a voulu me buter l’enfoiré.

« T’es pas Eddie le Gentil ?! »

Vraiment largué le gaillard. Je lui dis qu’il se gourre de personne et lui demande qu’il l’envoie.

« Va te faire foutre ! »

Mauvaise réponse, je lui colle une beigne à te décrocher la mâchoire et pendant qu’il crache ses molaires, ses glaviots et son sang, je lui repose la question.

« Tu t’es déjà fait défoncer l’popotin au clair de Lune ? »

En plus il se paye ma fiole. Il va prendre cher le petit. Mais d’abord, je récupère ce que je suis
venu chercher. Si Eddie débarque, vaut mieux qu’il me surprenne à péter le crâne d’un cave qui voulait sa peau qu’à farfouiller dans sa vie privée.

Son bureau est bien au premier étage, deuxième porte à gauche après l’escalier. N’allez pas vous planter comme moi en ouvrant la première à droite, ce sont les commodités. J’allume son ordinateur. Le mot de passe. Pas de panique, comme coup de théâtre, ça m’coupe pas vraiment la guibole. C’est majoritairement un truc en rapport avec la personne…Je lance un regard aux murs du bureau. Sur ma droite, il y a le portrait d’un démon japonais. En face, une photo d’un suka, un instrument de musique de la famille des vièles. Il date du XVIe siècle et contrairement à la croyance, ça ne signifie pas « prostitué » en russe ou en lituanien, mais en Polonais. Il avait disparu au XIXe siècle avant d’être reconstruit à partir de vieux plans.

« Onisuka »
Je suis un génie. J’accède aux données d’Eddie. Putain il est sous Linux, ce con ! Je pige rien. Il est où le menu…Merde ! Je dois me calmer et réfléchir. Linux est un équivalent de Windows. Donc tout doit être inversé. Sous Windows, le menu « démarrer » se trouve en bas à gauche alors sous Linux, il doit se trouver en haut à droite ! Putain, j’ai la pêche ce soir !

Je trouve un dossier intitulé « Natacha »…C’est tentant mais j’ai autre chose à glander. Je trouve le dossier recherché. Dedans sont référencés tous les sites de production d’opium de la famille d’Eddie. Je copie ça et « Natacha » sur une clé USB et je m’en vais retrouver mon p’tit pote que j’avais laissé ligoté à une barre d’acier. Il est toujours là, parfait, on va se défouler un peu.

Je suis venu en ce bas monde avec une saloperie dans la cervelle qui fait que j’aime bien hacher menu la gueule de mes semblables. Et bien là c’est exactement ce que je vais faire subir à notre ami...On s’en fout du nom, quand j’en aurai fini avec lui, plus personne ne pourras le reconnaitre de toute façon. Je lui colle un coup de cross sur la nuque et quand il tombe dans les vapes, je le rattrape sur mes épaules et le hisse difficilement. Il pèse son poids le fumier.

Je repars comme je suis venu. Mais au ralenti, à cause de l’autre zouave. J’en ai chié pour le faire passer de l’autre côté du mur. Je le calle dans mon coffre et le ramène au bercail’. J’aime bien prendre mes gourmandises à emporter et les déguster avec un peu de musique dans mon salon. Et c’est bien ce que je fais. Je le ramène chez moi tranquillement, faisant fis de mes colocataires et le bazarde à la cave, à défaut d’avoir mon propre salon. Là en bas, personne l’entendra gueuler et implorer ma clémence. Je vais clore ici ce chapitre parce que vous savez l’essentiel et que ça va vraiment devenir dégueulasse.

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MessagePosté le: Sam 29 Mai 2010, 8:08 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Hop, hop, hop !! Chapitre 9 out !! Par contre, pendant cette soirée, il s'est passé un truc que je n'avais pas prévu alors remontez rapidement au chapitre 2 pour une meilleure compréhension Very Happy

Merci et navré du désagrément, bonne lecture;






Chapitre 9 : Samedi soir, Michelle


Pour un paquet de gens, un peu partout à travers le monde et depuis un sacré bail déjà, samedi soir, c’est le grand soir. L’autoroute du clair de Lune est complètement encombrée par cet énorme part de la population qui se laisse aller à l’enivrement et l’éclatement de toute inhibition, juste pour ce soir.

Les raisons de cette dépravation généralisée sont variées et colorées. Il y a l’effet de groupe qui pousse à se beurrer la gueule quand on en aurait pas eu l’idée soi-même, il y a ceux qui veulent s’amuser, ceux qui veulent se libérer, ceux qui veulent se confesser.

Un homme qui ne boit que de l'eau a un secret à cacher à ses semblables, disait un syphilitique un peu fou, sans doute.

Il y a ceux qui n’ont rien de mieux à faire, ceux qui n’ont plus rien de tripant dans leur vie, ceux qui ont un heureux évènement à célébrer. Il y a ceux qui veulent se donner du courage, se filer un coup de pouce, se faciliter les choses.

Et pourquoi les en blâmer ? Depuis que ce foutu monde est monde, on a toujours cherché des moyens d’échapper à notre quotidien. Les premières traces de bières remontent à pas loin de quatre mille ans avant l’ère de l’Acrobate, en Mésopotamie. Ces cons-là avaient même élever la bière au rang de déesse. Et puis pas longtemps après, c’est un bridé des terres du Milieu qui découvrait les joies de la défonce au thé magique. Merci à eux.

Le goût frénétique de l'homme pour toutes les substances saines ou dangereuses, qui exaltent sa personnalité, témoigne de sa grandeur, disait encore le syphilitique. C’était dans le même bouquin d’ailleurs, Du vin et du hashish.

Moi aussi je vais aller me chercher une petite fracasserie de derrière les fagots. Et justement, les gonzesses de la maison où je crèche me propose d’aller à une soirée organisée par Pablo, le mec qui gère le marché de la musique à Cape Town. Il faut savoir que par ici, chaque marché est contrôlé par un mec qui a tous les pouvoirs de décision sur ce marché. Les Diadoques, comme ils s’appellent, se rassemblent tous les mois avec le grand boss du moment, Joe le Cabot pour faire le bilan des trente derniers jours.

J’accepte l’invitation et nous voila partis, bras dessus et déjà un peu saoul, à la fracasserie de ce brave Pablo. Quand nous arrivons, la grande grille blanche s’ouvre automatiquement et nous sommes invités à entrer.

A l’intérieur la fête bat déjà son plein. Deux grands mecs beurrés jouent au rugby avec une des serveuses déguisée en lapin ou en chat dans le salon. Ils se font de longues passes jusqu’à ce que l’un d’eux trébuche, foire sa réception, la serveuse allant ainsi se vautrer le nez en avant sur les murs impeccablement blancs du salon. Je me dirige au bar mais un mec m’attrape par les épaules et me refile une bouteille de bibine. Un bon dieu de vieux rhum ambré qui te réchauffe les amygdales et toute la tuyauterie.

La musique gueule à fond. Une espèce d’électro-trans-techno-house de merde. Ca me file la gerbe. Je m’allume une cancerette mais on me fait savoir que c’est interdit à l’intérieur. Putain d’enfoirés. Ca fait une paye qu’on a plus vraiment le droit de fumer dans les lieux publics. Ca encore, ça passe. Mais faut voir comment il est diabolisé le pauvre cave qui se sort une blonde en société. C’est un pestiféré. Une disgracieuse engeance pondue et couvée par la bonne femme de Satan en personne. Il existe même des villes où les fumeurs sont parqués dans des ghettos.
Le fumeur est le lépreux de notre génération.

En fait le fumeur a été une star, adulée par les foules, avant qu’on ne lui crache dessus. Le peuple l’a adulé quand il était James Dean, quand il est en fureur, John Wayne, après avoir buté des indiens ou Cary Grant, après s’être fait courser par un avion. Et puis c’est passé de mode. Y’a bien eu Bruce Willis mais bon…

Je sors dans le grand jardin derrière, peuplé évidemment par les fumeurs. La plupart, de thé-roulé. Sous un arbre, sur sa gratte, un mec joue Yellow Lemon Tree. Et puis à côté de ce gros con, il y avait un petit bout de femme aux cheveux courts et frisés. Son sourire suffit à illuminer la gueule de jeune qui se tenait le manche sous un arbre et les alentours. Ces yeux verts ressortent et s’accordent dans une parfaite harmonie sensorielle et sensuelle avec sa chevelure noir de jais et ses pommettes rosées.

Sous un cou nu où, fort heureusement pour moi, Adam ne ramène pas sa pomme, se dessine une poitrine des plus avenantes, proposant une gorge où il semblait faire bon vivre. Je suis de mon regard en-rhumé le sillage de ses courbes jusqu’à de charmants mollets sur lesquels tombés les bas de son innocente robe à fleurs. Je ne sais si c’est l’ambiance, l’alcool ou parce que j’avais une sacrée envie de me vidanger les balloches mais j’ai ressentie un truc pour cette fille. Un truc étrange. Pas de l’amour, non, faut pas déconner non plus, mais un truc, ça c’est certain.

Alors je suis allé la voir d’un pas chancelant, je lui ai dis,
« Bonsoir », et puis je me suis présenté et elle aussi. Elle s’appelle

« Michelle, comme la chanson. Je viens des United States of America. Du Wisconsin précisément, tu connais ? »

Ouais, j’y ai buté un mec une fois, pour une mission, il y a quelques années de ça. Un juif qui bossait pour nous à la compta mais qui faisait quelques détournements de fonds. Au début, c’était pas trop bourrin, quelques centaines par-ci, par-mi. Mais il a dérapé le pauvre et les centaines se sont transformés en milliers. J’ai eu ordre de le faire arrêter ses petites magouilles. Avec le recul, je me dis que j’aurai simplement pu lui péter les rotules ou lui couper un doigt, le plus petit, ça aurait suffit à le dissuader. C’était pas un mauvais gars, juste un gentil bougre qui essayait d’offrir le meilleur à sa famille. Mais tout ça je ne le dis pas à Michelle, ça reste entre vous et moi.

« Je suis arrivée à Cape Town il y a quelques années de ça, après que mon père ait été retrouvé pendu par les couilles à un réverbère, la tête plantée dans le cul et trouée par une lame d’au moins 30cm.

Mais ça ne m’a pas vraiment étonnée. Mon père ne gagnait pas beaucoup d’argent et magouillait pas mal avec des gars pas très net. Et puis brusquement, on a eu pleins de cadeaux. On allait au cinéma, au restaurant, en vacances. On a eu une nouvelle voiture, une nouvelle maison. C’était la belle vie. Mais je n’étais pas dupe. Maman le savait aussi mais ne voulait rien voir. »

Merde.

« Enfin, il m’avait laissé un petit magot alors je l’ai pris et je suis venu m’installer ici. Je me plais bien. Tu dis que tu viens de Lille ? Tu connais pas un certain Jules ? Non ? Tant mieux parce que c’est qu’un sale petit enfoiré de bouffeur de bites ! Je suis sorti avec lui pendant deux années entières et cette espèce de putain d’égoïste castrée me fait ce coup-là ! »

Bon, j’ai qu’une envie maintenant, c’est de lui faire l’amour sauvagement. Le truc, c’est que je dois me farcir toutes les conneries qu’elle aura envie de me raconter avant de me laisser venir faire un tour au Sanctuaire. Alors je lui laisse me parler de son ex-petit ami.

« Tu le connais pas alors ? Lille c’est grand comment ? Enfin bref, quand on s’est rencontré, c’était génial, je veux dire, on s’amusait, on s’envoyait en l’air, on sortait, on faisait tout un tas de trucs à deux. On s’aimait quoi. Et puis j’ai commencé à le voir changer. Il a commencé à écouter Céline Dion et Nancy Sinatra. Et puis il portait des sandales avec un pantalon blanc et une petite chemisette rose au col ouvert avec les lunettes de soleil perchées sur le crâne. Et puis, un soir, je le surprend en train d’essayer mes porte-jarretelles. Il me dit que c’est parce que c’est plus pratique pour faire pipi assis. Non mais quel con !

A l’époque on vivait dans un p’tit studio vers Green Point. Mais on était cosignataires sur le bail et financièrement je ne pouvais pas me permettre de le dégager à grands coups de pompes dans le cul. En plus, il aurait sans doute aimé ça le salopard. Figures toi qu’il s’était carré dans le cigare l’idée d’un changement de sexe. Comme quoi ma petite chatte rasée de près ne lui convenait pas vraiment, qu’il préférait se faire enfiler qu’enfiler, qu’il était plus receveur que batteur.

Et un jour, y’a même pas une semaine, il s’est ramené à l’appart’. C’était une blonde, sexy en plus. Des talons hauts de 25cm, une courte robe noire fendue, des lèvres pulpeuses, vu de l’extérieure c’était plutôt réussi. »

Oh putain…

« Je l’ai foutue dehors et maintenant il fait le tapin du côté de Long Street sous le nom de Mathilda. »

Je hais cette putain de ville ! Nom de dieu de bordel de chierie de merde ! Comment j’ai pu buter son père et baiser son mec ?! C’est quoi ce karma foireux ?

« Enfin toi, t’as pas l’air du genre à aimer les bites. Je me trompes ? J’en étais sur. Tu veux venir chez moi ? Mon lit n’est pas très grand mais surement assez pour nous deux ! »

Une invitation comme ça, ça ne se refuse pas. Et puis je me serai vengé de l’autre tarlouze en me tapant son ex. Oui, c’est un peu maigre mais c’est tout ce que j’ai, là.

On prend un taxi et on se dirige vers son appartement, un peu plus loin sur Green Point. Pour le moment, elle peut encore se permettre d’y vivre seule. Elle habite au quatrième étage d’un vieil immeuble qui en compte six, aux fenêtres protégées par des barreaux de fer et à la façade parsemée d’impacts de balles.

La déco de son appartement est plutôt pas mal, un peu trop de bibelots sur les étagères à mon goût mais c’est pas mal. Elle me propose une tasse de café, une bière, un whisky ? Va pour le whisky, sec. Elle me l’apporte et entreprend de confectionner un thé-roulé, c’est sympa, pendant ce temps je louche sur ses seins.

On papote encore le temps de fumer un peu et de se mettre à l’aise et puis on entame les festivités. Je passe ma main derrière sa nuque et l’embrasse à pleine bouche tandis qu’elle arrache ma chemise. Je cherche l’attache de son soutien-gorge que je finis par trouver entre ses seins. J’attrape le tout avec les dents et l’arrache sans retenue. Il faut que ça lime. Autant se donner à fond, sinon quel intérêt ? On est tous les deux, bientôt à poil, à se baver dessus et dedans, on va pas se la jouer porno pour mormons. Sa robe vole bientôt à travers la chambre. Je la prend dans mes bras et elle enroule ses jambes autour de mes hanches. Je la plaque contre le mur et vais visiter, sans prendre la peine de frapper à l’entrée, le Sanctuaire de mon éphémère dulcinée.

Elle lâche prise et m’entraine avec elle dans sa chute et viens me chevaucher sur la carpette, s’empalant sur mon membre comme la tête d’un bourgeois sur une pique. Tout est blanc autour de moi, cette gonzesse m’entraine carrément dans un autre univers. Y’a pas à chier, ça reste quand même la meilleure des défonces, une bonne vieille partie de ça va-ça vient des familles.

On continue nos jeux polissons et pervers pendant un bon bout de temps, elle me lessive la petite mais elle sait être motivante. Et puis au petit matin, on s’assoit sur la terrasse, enroulée dans une couette et on regarde le soleil se lever en buvant un café et en fumant une cancerette. Elle me dit qu’elle m’aime, je lui dis de ne pas s’emporter. Mais tout en disant cela, je me rend compte qu’elle ne me laisse peut être pas si indifférent que ça…Ceci dit, je ne le lui confis pas, je ne suis pas très à l’aise pour causer de ce qui me trotte dans le palpitant.

Il est temps pour moi de me retirer et de lui dire à bientôt peut être. Après tout pourquoi pas, ça me botterait bien de la revoir mais la belle semble satisfaite finalement et n’insiste pas malgré sa déclaration pour une date précise de rendez-vous. Elle me dit juste :
« See you my Don Juan ! »

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MessagePosté le: Lun 07 Juin 2010, 12:27 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Chapitre X !!! Un nouveau personnage apparait pour aider le narrateur dans sa périeuse mission...

Chapitre X : Dimanche 16, Scott Shelby


J’ai passé le reste du samedi après-midi écroulé dans le canapé. Le soir, je ne me bouge le cul que pour aller me pageoter. A partir de là, pas moyen d’avoir la paix, je suis emmerdé toute la nuit par un rêve qui revient souvent depuis quelques temps.

Je suis assis dans un rocking-chair en bois, sous une véranda branlante, devant une maison qui ne tenait pas plus en place. Le jardin à l’herbe roussie est complètement bouffé par la mauvaise herbe. Et ce n’est pas le rosier sans roses près de la boite aux lettres ou le saule pleureur qui a vraiment l’air de chialer qui améliorent le tableau. Dans l’allée, y’a une vielle Ford de 1964. J’ai dix ans. C’était deux ans pile poile avant que je ne me fasse la malle pour nul part. Je le sais parce que sur mon bras j’ai encore les points de sutures qu’on avait du me mettre après une baston au cran d’arrêt avec cet enfoiré de fils de putes de Danny le Poing. C’était pas un tendre celui-là.

Il rackettait les petits à l’école, je ne pouvais pas le laisser continuer. Il faisait chuter mon chiffre d’affaire. Comme les mômes n’avaient plus de blé, ils ne pouvaient plus se payer mes fausses cartes Dragon Ball Z et les Snikers que je piquais au foyer des collégiens et que je revendais en douce un peu moins cher. Un matin de mai…Ou un après-midi d’octobre, je ne sais plus, je suis allé trouver ce gros porc plein de bacon de Danny le Poing et je lui ai collé le mien dans son groin. Ca a pissé le sang de suite. C’était vachement impressionnant. C’était pas la première fois que je cognais un mec comme ça et que j’y prenais du plaisir. Bon dieu de merde que c’est bon ! Tu te sens revivre, tu sens que tu as le Pouvoir. N’importe lequel, celui qui te feras envie. Le mec, tu le cognes vite et fort, il est sonné et ensuite tu en fais ce que tu veux. Soit tu continues à lui balancer des tartes jusqu’à t’en péter les os de la main, soit tu l’attaches derrière ta voiture, pour aller faire un tour. Ou alors tu peux compter combien de briques tu peux lui casser sur le melon avant qu’il ne lâche la rampe.

J’y ai pas été aussi fort avec Danny, tous ces trucs, ça vient avec l’âge et un petit passage par la Banana School. Il a juste le nez en sang. Ca suffit pour réveiller la bête. Il sort son couteau, je dégaine le mien, nos lames se caresses doucement et résonnent entre elles, comme pour se défier, comme au début d’un combat entre Luke Skywalker et Darth Vador. Et puis il lance le premier assaut et me touche à l’épaule. Ca fait un mal de chien, je lui envoie un coup de genoux dans les rotules et je lui balafre la joue de haut en bas. On s’est tout les deux retrouvés au C.H.R de Lille mais l’histoire n’a jamais eu de suite. Nous refusions, lui comme moi, d’expliquer ce qu’il s’était passé.

Enfin bref, dans mon rêve, je suis sur ce con de rocking-chair à regarder les oiseaux piailler et les mouches s’enfiler quand j’entends le bruit caractéristique de ma mère qui se prend un gnon sur le coin de la tronche :
« Non, chéri ! Je suis désolé ! Je ne le ferai plus, non, je ne le ferai plus ! »

Et puis le pas lourd de mon éméché de père fait trembler le plancher et il se plante devant moi, du haut de son mètre 95 titubant, me cachant le soleil de sa masse laide et avinée.
Il veut me coller une baigne, je le plante en plein dans le palpitant. Je lis dans son regard que celle-là, il ne l’avait pas vu venir.

Et c’est là que je me réveil en général. Le plus étrange avec ce rêve c’est qu’il n’a absolument rien à voir avec mon enfance. D’autant que je me souvienne, j’ai une enfance radieuse, j’ai grandi dans un foyer aimant, c’était la bonne ambiance. Mes parents ramenaient de quoi manger, s’habiller, sortir, s’amuser, enfin tout quoi. Mes petits larcins, je ne les faisais pas par nécessité mais par ennui.

C’est peut être bien ça qui m’a traumatisé, l’absence de traumatisme.

Le temps n’était pas toujours au beau fixe dans la chaumière douaisienne mais c’est comme partout j’imagine. Par contre, je ne sais jamais si je dois parler d’eux au passé vu que je n’ai plus de nouvelles depuis qu’ils ont découvert ce que je traficotais en cachette pour gagner leur salaire mensuel en une semaine.

On est déjà dimanche et c’est cet après-midi qu’arrive ce bon vieux Scott Shelby. Un ancien inspecteur de la police de Los Angeles qui s’est convertit dans les activités douteuses des Révolutionnaires, d’abord comme agent double au sein des forces de police puis comme responsable du service de contre-espionnage de la Révolution, et en parallèle, professeur. Une grosse pointure, quoi. Scott Shelby n’est pas son vrai nom. Il est français d’origine et a changé son Benjamin Deblond en quelque chose de plus locale quand il est arrivé à Los Angeles.

J’ai fait sa connaissance à l’époque où je faisais mes études à la Banana School. Lui aussi était passé par là quelques années avant moi. Il a fait partie de la seconde promotion et c’était mon prof’ d’ « usurpation d’identité » et d’ « Histoire de la Mafia et des Révolutionnaires, de Jésus Christ à aujourd’hui ». On s’entendait plutôt bien, c’était le genre de mec qui en avait vu des vertes et des moins mûres. Il sait de quoi il parle et il en parle bien.

Il se rabine à Cape Town pour voir un peu les avancées des opérations. Il veut rencontrer Eddie le Gentil pour les affaires et Huxley, parce que de ce que je lui en ai dit, il lui est fort sympathique.
Moi je crois plutôt qu’il rapplique pour me surveiller, voir si je ne retourne pas ma veste, séduit par la vie de gangster et de baron de la drogue. La Mafia a son lot d’avantages et les Révolutionnaires ont peur que je ne sois séduit. Y’a pas de risques, ils sont tarés dans la Mafia. On ne peut faire confiance à personne, ils règnent à la manière du Taulier, par la peur.
Les Révolutionnaires sont pas des enfants de chœurs non plus, mais eux ils ont quand même pensé au fait qu’il valait mieux avoir le peuple avec soi que le contraire. Je compte bien rester de ce côté de la barrière. Mais ça, Scott peut pas en être tout à fait sur tant qu’il ne m’a pas collé au train le temps qu’il jugeras nécessaire.

Son avion arrive dans trois heures, j’ai le temps d’aller casser une graine. Je me taperais bien un burger. Alors je fais un p’tit détour par le Hussard, à Sea Point. Ca se trouve juste après Waterfront à l’ouest de la ville. Dans ce restau avec vue sur le stade de foot qu’ils avaient construit en 2010, pour la coupe du monde de football, ils vous servaient le plus maousse et succulent des burgers de la ville, accompagné de délicieuses frites dorées bien comme il faut avec une sauce aux quatre poivres et une salade de crudités. Le tout assorti d’une bière fraichement tirée. Un vin rouge aurait peut être été plus judicieux mais y’a pas à chier, je préfère la mousseuse.

Je suis assis près de la fenêtre et profite un peu du soleil avant de me bouger le cul à l’aéroport. Je m’allume une cancerette et le serveur vient me peller le fion en me disant que c’est « interdit dans l’enceinte du restaurant » et que je suis prier de bien vouloir sortir. Merde, je fume à la fenêtre, je dérange personne ! Pas moyen de le raisonner, je paye l’addition et je me casse sans laisser de pourliches.

Il fait un soleil de plomb. J’aurai du mettre un truc plus léger que cette putain de veste en daim. J’arrive à l’aéroport en nage, les grelots collés ensemble. Je cherche la porte A-8. C’est de là qu’il devrait arriver. J’ose espérer qu’il n’y pas eu de problèmes pendant le vol. Apparemment non, j’aperçois la fumée du gros cigare qu’il a toujours fiché dans le bec.

Il ne fait pas vraiment ses 42 ans, il fait plus vieux, caché dans son vieil imper beige recouvrant son habituel costume élimé gris avec une chemise blanche et une cravate rouge ou bleue, selon ses humeurs. Là, il a sorti la rouge, il est de mauvais poil. Sans doute parce que le soleil est encore là. Scott n’aime pas le soleil. Il ne supporte pas la lumière du jour et vie principalement la nuit. Ce qui explique sa gueule qui lui tombe aux genoux et les yeux au milieu du visage. Les yeux rougis par un trop plein de vodka, Scott n’en reste pas moins un foutu putain d’agent de la vieille école. Lui sa méthode, c’est tout à l’ancienne. Même internet et le téléphone portable, il s’en tamponne le salsifis. Comme beaucoup de flics repentis, Scott a une légère tendance à abuser de la boisson. Evidemment sa femme l’a quitté. Il ne sait pas bien pourquoi…Parce qu’il haïssait son job et qu’elle le sentait ou parce qu’il la haïssait elle de lui avoir pourri la vie et pondu deux mômes dégénérés et qu’elle le sentait aussi.

Sa femme l’a quitté, lui a quitté son job et rejoint les Révolutionnaires. Il a été recruté par Ernesto, d’ailleurs, un soir qu’il se pintait la gueule dans un rade d’Inglewood, à Los Angeles. Ernesto lui a proposé de rester dans la police mais qu’il bosserait pour la Révolution, que son boulot se serait de récupérer un maximum d’informations sur les United States et leur ennemi, le Taulier.

La Révolution est un camp à part, c’est la troisième roue du carrosse qui casse les couilles de tout le monde, le colocataire qui se la joue teneur de chandelles à ton repas de Saint Valentin avec ta blonde, le Ringo Star des Beatles, la petite sœur de ta copine qui veut absolument faire une dinette et toi tu le fais pour avoir l’air attendrissant avec la grande sœur sur qui tu fantasmes comme un dégueulasse depuis deux semaines sous la douche.

Les Révolutionnaires sont là pour foutre un grand bordel dans la Seconde Guerre Froide que se mènent les USA et le Taulier. Ils refusent les deux régimes et veulent maintenant faire les choses à leur sauce. Et c’est au milieu de ce foutoir gargantuesque que vient se placer la Mafia, bossant à droite et à gauche, pour le compte du plus offrant. Je dis ça pour que vous vous fassiez une idée de ce qu’est le monde aujourd’hui. C’est toujours les mêmes conneries mais cette fois les frontières sont définies. On sait à une vache près qui tape sur qui.
Je retrouve donc mon vieil ami et l’accueil bras ouvert. Il me jette son sac sans un regard.

« Emmènes moi dans un rade, j’ai besoin d’un verre, on taillera une bavette là bas. »

Ha ! Ha ! Il n’a pas changé d’un poil de cul ce cher monsieur Scott Shelby. Il est absolument inutile d’essayer d’engager un semblant de conversation maintenant. Scott déteste le soleil, ça lui file des migraines carabinées. Il préfère la nuit et les endroits sombres, paradoxalement, ça lui permet d’avoir les idées plus claires.

On entre dans un café sur Buitekant Street, pas loin de chez moi. C’est un petit bar lounge très propret et chaleureux avec sa peinture jaune pâle, son bar en vieux bois verni et ses sofas de cuir noir. La barmaid est absolument charmante et nous propose un sourire radieux dont l’éclat est accentué par le bleu ciel de ses yeux et par le blond vénitien éclatant de ses cheveux.

On s’assoit en gens civilisés (comprenez par là qu’on ne s’écroule pas comme des loques inutiles sur un sofa, les bras pendants entre les genoux et le dos courbé) et commandons une vodka et un scotch, sans glaces. Scott vide son verre d’une traite et le pose bruyamment sur la petite table en verre où reposent un cendrier et un vase de chrysanthèmes.

« J’ai entendu dire que tu te démerdais pas trop mal ces derniers temps. En fait, j’ai pu lire tes différents exploits à travers le monde. T’as dessoudé pas mal de salopards, dis moi. Tu crains pas le sur-ménage ? »

Je lui explique que je fais ce que j’ai à faire et c’est tout. Et puis ça paye plutôt bien, je voyage, je rencontre des gens, j’en baise certains et j’en bute d’autres. L’histoire classique de la vie de n’importe quel être humain.

« T’as le bonjour d’Ernesto au fait. Enfin j’te dis ça, il m’a transmis ses amitiés pour toi sur son lit de mort, il y a un an ou deux. Il est canné dans son lit, après avoir bataillé sec pendant cinq ou six mois avec un putain de cancer des poumons. Tu le crois ça ? Ernesto, se faire rattraper par la Mort avec un cancer quand il lui a échappé toutes ces années à cette pétasse… »

Ernesto est mort ? Bah merde…Non pas que je l’aimais particulièrement (faut dire ce qui est, ce type était un taré psychopathe et mégalo) mais c’est quand même grâce à lui que je suis ce que je suis aujourd’hui, alors apprendre son décès, forcément ça me fait un choc. Je paye ma tournée et commande une bouteille de Jack l’Eventreur, la nuit promettait d’être longue, surtout qu’il est à peine 18 heures et que je commence déjà à me sentir un brin pompette.

On a descendu la bouteille en évoquant de vieux souvenirs de la Banana, que devient un tel, où est passé machin, qui a passé l’arme à gauche, qui est passé à l’ennemi…Le genre de souvenirs qu’évoquent d’anciens camarades d’école avec leur professeur, quelques années après avoir fini leurs études. C’est plus ou moins la même ambiance, en plus morbide et sanguinaire, compte tenu de la nature de mes études.

Après ça, on a remonté Buitenkant en titubant. Mais au coin de la dernière intersection avant ma case, juste devant la petite superette tenue par une insupportable, austère et stupide grosse femme se vengeant de ses kilos en trop sur votre humble narrateur, on s’arrête net.

Il y a là garée feux éteints et le moteur aussi, une voiture des services de police du Taulier. Qu’est-ce qu’ils foutent là ces cons ? Ils ne peuvent pas savoir que je suis un Révolutionnaire…Si c’était ça, ils m’auraient déjà criblé de balles façon passoire. Ils doivent savoir pour Eddie alors…Si c’est bien ça, quelqu’un m’aura balancé…Mais qui ?

On continue à avancer l’air de rien. Scott a la main sur son flingue. Je lui fais signe d’abandonner l’idée. Il faut bien garder à l’esprit qu’on se doit d’être le plus discret possible et ne pas attirer l’attention. Mais au moment de sortir mes clés, les condés ont bondi hors de leur véhicule et m’ont plaqués contre le mur. Scott s’écarte, prêt à dégainer mais je lui fais signe de ne pas bouger.

Je me prends une belle volée dans la gueule, et puis les flics me passent les bracelets. Il m’emmène au poste « pour une durée indéterminée ». Ils ont des questions à me poser à un propos d’un mec qu’ils ont trouvés dans la cave.

Un mec dans la cave ?
Oh ! Putain ! Le gros con, j’ai complètement zappé le pauvre bougre que j’avais ramené de chez Eddie jeudi dernier. On m’a vendu…
Et merde…Qui a bien pu me balancer ? En montant en voiture, je jette un œil à la maison et j’aperçois mes colocataires. L’une d’elle a du tomber sur mon cher ami en allant chercher du lait ou du pinard.

Putain de Mata Hari…

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MessagePosté le: Lun 07 Juin 2010, 12:29 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Chapitre 11 !!! Les connaissez vous ? Very Happy

Chapitre XI : Lundi 17, Guy la Lame Tordue et Emile le Chauffeur


Après m’avoir roué de coups, insulté de tous les noms d’oiseaux imaginables et trainés, les yeux bandés, dans un camion pour rouler dix plombes avant de me lancer comme un sac à patates dans un bateau, j’arrive sur Robben Island. C’est une petite île, au large de Cape Town, dont la prison est spécialement réservé aux mafieux.

Bon, ils ne savent pas que je suis un Révolutionnaire, ça c’est un bon point, j’arrive dans une prison remplie de mafieux, soit mes ennemis, ça c’est un très mauvais point. Bosser pour Eddie le Gentil et connaitre Huxley ne suffiront pas à me couvrir longtemps. Ils vont forcément vouloir avoir des détails, plus qu’Eddie qui cherchait surtout un chimiste, le reste, il s’en foutait un peu.

Je pensais pouvoir me la jouer profil bas mais à peine arrivé je suis emmerdé par un cave, la moitié du visage arrachée, comme s’il s’était battu avec un clébard. D’ailleurs, il m’en parle de son visage.

« Tu vois ça, p’tit merdeux ? C’est une fierté ! Un souvenir de guerre du temps où je violais et poignardée des salopes en mini jupe à Paris ! Parce que j’ai jamais pu blairer les salopes en mini jupe…Et toi, t’es p’tet pas en mini jupe mais tu m’as l’air d’être une sacrée salope, j’me trompe ? Non, j’crois pas parce que j’ai du flair pour ces trucs là, tu peux me croire sur parole…Et j’sais pas encore, mais je sais déjà comment j’vais ta faire ta fête, Sacrée Salope ! »

Pendant qu’il débite ses conneries, on avance dans la file pour le contrôle médical et la fouille corporelle. Un jeune médecin fraichement sorti de l’école sort de l’infirmerie. Un gringalet avec du lait sous le nez (est-ce vraiment du lait ?), avec de fines lunettes carrés posées sur un nez aquilin. La mèche blonde qui cache la moitié du visage et les mocassins italiens vernis informent tous les sauvages présents ici que c’est un fils de bourge victime des affectations aléatoires et que c’est une proie facile. Il appelle le suivant, mon nouvel « ami ».

« Monsieur Guy G. ? »

Avant de partir, Guy me lance un clin d’œil. Si ce mec s’amuse un jour à m’agiter sa queue devant le museau, je la lui arrache et l’étouffe avec en la lui plongeant dans le gosier.

J’attends quelques minutes devant l’infirmerie et regarde autour de moi. On était une cinquantaine de gars fraichement débarqué, dont quelques célébrités. Des mecs dont la Révolution allait se charger. Ce n’est pas pour tout de suite on dirait.

Le docteur Gringalet sort à nouveau et m’appelle. Je tombe la chemise et le futal. Il me pose des questions sur des éventuels traitements et d’hypothétiques allergies, si j’ai un régime alimentaire particulier, si je suis accro à une dope quelconque, si je suis alcoolique, si je suis un pervers, si je suis homosexuel, pédophile, zoophile, nécrophile, scatophile. Si j’ai des problèmes cardiaques, des maladies vénériennes, un cancer, une maladie rare, une déformation génétique.
Non doc ! Rien de tout ça,doc !
Le jeunot m’ausculte brièvement et je passe à la fouille complète. Une espèce d’enfoiré de moustachu à l’air sadique et pervers me mate avec un grand sourire en faisant claquer les gants en plastique qui recouvrent des putains de paluches de gorille. Il tend deux doigts en l’air et les arrose copieusement de lubrifiant, qu’il étale dans un geste obscène sur toutes ses phalanges. Le moustachu m’invite à me pencher en avant et vient me titiller l’intimité de ses énormes doigts boudinés dont je sentais la pilosité exacerbée. Et il en profite l’enfoiré de salopard, pour s’payer une visite privée de mon colon, ajoutant un à un ses phallus de fortune. Je sens tout son poing me rentrer dans le cul mais je ne crie pas, putain non je ne crie pas ! En fait, je me concentre pour lui chier à la gueule dès qu’il aura retirer son membre.

Mais rien ne vient et cette espèce de salope d’empaffé de merde continue son cirque. Là je tiens plus. Je lui colle un coup dans les roubignolles et ensuite je lui fait sa fête. Je le roue de coup jusqu’à ce que les gardes n’arrivent et ne me calment à coups de taser et de matraque. Je tombe dans les vapes.

Quand je me réveille, je suis dans une suite individuelle (une cellule blanche capitonnée éclairée 24 heures sur 24). Rien de bien original. Y’a des trucs qui ne changent pas. Au moins, c’est plutôt confortable ces murs et ce sol en matelas. Je peux me jeter dedans autant que je veux, je n’ai pas une égratignure.
Mes bras sont maintenus sur mon corps par une camisole de force. Impossible de s’en sortir à moins de me démettre une épaule, comme le blanc cinglé dans L’Arme Fatale. Mais je ne sais pas remettre une épaule démise…Alors j’abandonne l’idée en attendant de trouver mieux.

Après tout, j’ose espérer que Scott fasse un rapport aux hautes instances et que mes boss me feront libérer. Normalement c’est jouable…Mais vont-ils prendre le temps de le faire ? Ca, j’en doute tout de même un peu.

Au bout de quelques heures, ou jours, ou semaines, j’en sais foutre rien, y’a pas de fenêtre pour voir le soleil se coucher dans les suites individuelles, je sors enfin de la suite individuelle. Deux cons de grumeaux m’emmènent à la douche et après m’avoir arrosé à lance-incendie, je suis invité à rejoindre mes nouveaux quartiers. La suite 27-C allait beaucoup me plaire, m’assure le maton en se gondolant comme un abruti. Cet enfoiré qui a raté le concours de la police et se retrouve à jouer les garde-fous ici se venge comme il peut sur cette vie qu’il déteste. Quitte à s’en prendre à ses pensionnaires. Il me présente mon compagnon de chambrée.

« Mais c’est Sacrée Salope que voila ! Je n’aurai pas osé espérer t’avoir dans ma cellule, rien que pour moi… »

Le maton referme la grille, faisant fit des menaces proférées à mon encontre. Je demande à changer de suite, il fait la sourde oreille. Tant pis, il semble qu’un de ses pensionnaires (on ne dit plus « prisonnier », c’est dégradant) va passer l’arme à gauche avant même de commencer à compter les jours qu’il lui reste à tirer ici.

« T’as pas pété un broque depuis tout à l’heure, je peux savoir pourquoi ? Tu crois p’tet que je suis un rigolo ?! Tu sais qui je suis ? Je suis le Tueur de l’Est Parisien ! Je suis pas Coco l’asticot, tu piges ? »

Je lui dis que oui, j’ai bien compris mais que je m’en foutais pas mal de ses menaces et qu’il devrait éviter de trop m’échauffer les esgourdes. Je lui dis aussi que je me souviens de lui. Ses exploits sont connus. Il rit à gorge déployée, semblant très fier que sa réputation de tueur et de violeur se soit répandue. Je lui précise quand même que je le connais surtout comme le gars qui a pas été foutu de tuer correctement plusieurs de ses victimes, les laissant gravement blessées, certes, mais suffisamment en vie pour témoigner contre lui, crétin.

« Espèce de petit merdeux ! Je sais pas si t’as une grosse paire de couilles ou si t’es juste complètement fêlé pour t’autoriser à t’payer ma tronche. En tout cas, tu peux être sur que tu vas y passer et tu verras si je te laisse suffisamment en vie pour témoigner ! »

Guy continue son soliloque mais je ne lui prête plus un pet d’attention, allongé dans mon lit, j’attendais simplement que le temps passe. Et puis le maton se pointe à nouveau et me tend un paquet.

« Pour toi. C’est arrivé la semaine dernière mais on ne distribue pas le courrier dans les suites individuelles. »

J’attrape l’enveloppe. A l’intérieure une lettre de ma femme et de ma fille. Sauf que je n’ai plus de femme et, que je sache, je n’ai pas de descendance. C’est en fait un message codé de la part de mes boss. La lettre est écrite de telle manière que seules les personnes connaissant le code peuvent déchiffrer le vrai message caché derrière des courriers anodins.

Ici, mes boss m’expliquent que je suis en prison pour une bonne raison. Je dois tuer deux mecs. Mon voisin de cellule et un autre mafieux qui réside ici depuis une dizaine d’année, Emile le Chauffeur. Emile est une espèce de taré de psychopathe pédophile qui a fait parler de lui à la fin du XXe siècle dans la région de l’Yonne, en France.

Je me retrouve dans cette prison sur une île au large des côtes de Cape Town parce que mes boss veulent que je zigouille deux caves. Putain de chierie ! Ils jouent avec mes couilles et j’aime pas trop ça, qu’on joue avec mes couilles. Scott Shelby, vieil enfoiré, tu n’étais donc pas là par courtoisie mais bel et bien pour veiller au bon déroulement des opérations. Et pendant que je suis dans cette suite avec Guy la Lame Tordue, lui se la coule douce dans mon plumard à siroter mon whisky et à fumer mon thé. Vieux filou.

C’est l’heure de la promenade et nos hôtes nous invite à rejoindre la cour de l’établissement. Enfin ! Je n’en pouvais plus de cette suite de très peu de mètres carrés que je dois en plus partagé avec ma future victime. Quoiqu’il serait certainement plus sage de liquider Emile le Chauffeur en premier, discrètement, ensuite je pourrais liquider Guy la Lame Tordue…
Il va falloir la jouer fine si je ne veux pas terminer mes jours ici. Il était clairement précisé dans la lettre de mes boss que j’étais seul pour cette mission. Mais si je la réussissais, une juteuse compensation m’attendrait au retour, ainsi qu’une prise en charge complète de ma retraite. Pour ce dernier point, ils ne prennent pas trop de risques les mecs, très peu d’entre nous atteigne la soixantaine.

Malgré tout, c’est un des avantages du rang des Révolutionnaires, on avait une vraie retraite, pas comme aux USA, où on se retrouve avec une bagatelle pour finir ses vieux jours après pas loin de 40 ans de bons et loyaux services, et chez le Taulier, tu peux toujours te gratter pour récupérer un kopeck. Quitte à crever, autant avoir les panards au soleil sur une plage de sable fin dans les Caraïbes à ce moment-là.

Putain, il pleut. 30 minutes de ballade par jour et il pleut à ce moment-là.
Karma la pute.

Enfin, je préfère avoir les chaussettes trempées que de rester dans la suite à écouter Lame Tordue me débiter ses conneries.

C’est quand même pas de bol, c’est le mois de mai, en Afrique du Sud et il pleut parce qu’ici c’est l’hiver. Bon ça n’empêche pas de bénéficier de pointe à 29°C mais quand même ! J’aimerais bien une petite canicule. Ca fait des plombes qu’on nous bassine du matin au soir et du soir au matin, absolument partout où vous foutez les pieds avec le réchauffement planétaire et on en est encore à espérer une bonne poussée de chaleur chaque été pour voir crever mémé et enfin toucher l’héritage, comme le disent plus ou moins les capitalistes d’outre-Ateulierique. Quand on est capitaliste, il faut avoir le sens du sacrifice et les anciens comprennent qu’ils faut savoir partir si ça peut aider la société.

Finalement, c’est un peu comme chez le Taulier, sauf que lui ne s’emmerde pas, les vieux, il les fait buter à la naissance.

A l’origine, c’est le Clown du XXe siècle qui avait sorti cette idée stupide dans un réquisitoire (anciennement « sketch »), comme ça pour déconner. Mais ce con de dictateur (navré pour le pléonasme) l’applique à la lettre. Ou plutôt l’appliquait. Il a freiné les massacres depuis quelques années pour repeupler un peu ses terres du Milieu avant que les gars de l’Ouest ne se mettent en tête de se rebiffer quand ils auront pigé qu’ils sont plus jeunes et plus nombreux. Mais pour le moment, ils sont encore un peu trop jeunes, et donc trop cons pour piger quoique ce soit à ce qu’il leur arrive.

Le vent de la révolte s’est éteint alors que le monde en a bien besoin. Je veux dire, ce n’est pas le même merdier que dans l’imaginaire d’Orwell mais c’est quand même un sacré merdier. Par exemple, je ne pourrais jamais plus le lire, son fameux 1984. Le Taulier, dès son arrivée, à cramer tous les livres jugés subversifs, contraires à l’éthique, fallacieux, tendancieux, salaces, vulgaires, outrageants, socialement inadaptés.

Mais bon, rendons à César ce qui lui appartient, ce génocide culturel était déjà en marche dès le début du XXIe siècle. La sentence impitoyable de la mort de la littérature était à cette époque rendue par la Société, à travers les médias qui eux-mêmes appliquaient la dite-sentence via la petite lucarne, les journaux et internet. Leur mission était d’annihiler progressivement le goût pour la lecture en la faisant passer pour ennuyeuse et risible.

Mais c’était beaucoup trop long pour le Taulier alors il a tout fait brûler, tous les bouquins de tous les pays conquis. Il était comme fou le mec. Néron qui se fendait la poire devant le bûcher d’une Rome, version papier et cuir relié.

Ce n’est pas vraiment un crime de lire, mais si vous vous faites attraper avec un livre entre les mains sur le territoire des Bridés, de L’Europe au Japon, assurez vous qu’il fasse partit de la collection «Les Dix Récits recommandés par le Taulier ». Ce sont dix livres qui parlent de la gloire de l’empire du Milieu. Ca démarre avec la jeunesse brillante à tous les niveaux (scolaire, sportif, privé) du Taulier, ça continue avec son incroyable ascension au pouvoir et ça se termine sur ses héroïques batailles, où chacun sait qu’il n’a jamais foutu un orteil. A la fin du volume 10, il y a une note en langage bridé qui se traduit par : A Suivre…
Comme s’ils attendaient la victoire totale du Taulier sur les Capitalistes pour écrire la suite en cinq volumes.

Plus de livres, donc. Les jeunes ne lisent plus, ne s’informent plus, se désintéressent de tout. Il n’existe plus rien dans le monde du Taulier, comme dans celui des Capitalistes, pour stimuler la révolte dans le cœur de la jeunesse. Même le rock est mort aujourd’hui.
Bob Dylan a été exécuté, Springsteen a eu un mystérieux accident de moto (un peu comme celui du Clown…) et Jagger et Richards sont morts l’automne dernier.

Une hécatombe de plus dans le paysage musicale, aujourd’hui le rock est mort. Et personne n’ose, ou même ne songe à prendre sérieusement la relève. J’aurai 27 ans cette année et j’ai de grandes chances de me faire planter par un cave avant d’achever ma mission, de foirer la dite-mission ou encore la réussir mais me faire attraper et ne jamais sortir d’ici. En parlant de ça, il faut aussi que je pense à un plan d’évasion…

La promenade est terminé, les matons nous font rentrer à la queue-leu-leu. On est tous aligné sur la ligne jaune, dos à nos suites, attendant le signal pour y entrer. En attendant que toute la populace carcérale soit bien en ligne, je jette un œil en l’air, à l’étage supérieur. Et là j’aperçois une tête connue. C’était la dernière sortie de la soirée alors il me faut attendre le petit déjeuner pour aller saluer cette vieille connaissance.

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MessagePosté le: Lun 07 Juin 2010, 9:58 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Hop hop hop !! Chapitre XII parce que j'ai plus le temps de dormir :p

Chapitre XII : Mardi 18, les Rainbow Men Part. II : Will le Rouge


Le lendemain matin, je retrouve comme prévu mon ami et ancien associé, celui que l’on surnommait Will le Rouge au sein des Rainbow Men. Je me pose en face de lui alors qu’il soufflait sur son Earl Grey pour le refroidir.

Will a toujours adoré le thé, infusé, fumé, inhalé, bu, mangé. C’est son péché mignon. Je l’ai connu y’a quelques années au lycée. Il venait d’être transféré depuis le collège de Naples, Italie, la ville qui l’a vu naitre et l’a élevé en bon petit gangster. J’ai jamais vraiment biché ce qui s’était passé, d’autant qu’il refusait d’en parler, mais il s’est barré de chez lui quand il a eu 13 ans, après s’être embrouillé avec ses parents.

Là, il a appris la vie dans la rue pendant quelques temps avant de mettre suffisamment de côté pour se trouver une piaule et arrêter de dormir dans les parcs où il survivait en vendant du haschisch et du thé. Ensuite il a pu reprendre les études grâce à l’argent d’un job qu’il s’était dégotté (ses premiers contacts avec ce qui allait devenir la Mafia) et il a obtenu une bourse pour venir étudier en France. C’était un expert en biologie, il pouvait faire pousser n’importe quel plant de thé dans n’importe quelle condition atmosphérique en bricolant au besoin des chambres d’isolation de fortune mais efficace ou des chambres d’aérations tout à fait performantes pour des bibelots bricolés à la va-vite. C’était aussi un petit génie en électronique. Une fois, il a fabriqué un godemichet à partir d’un lecteur CD.

Alex et moi, on a fait sa connaissance parce qu’on avait besoin d’un gros fournisseur, qui puisse nous approvisionner mensuellement et régulièrement, sans fautes, sans retards. Et pour ça, la rumeur disait que Will était le plus réglo. Alors on est allé le voir et on a passé un marché. Le groupe commençait à naitre.

Au début, on ne se voyait que pour le business et puis on s’est retrouvé dans le même cours d’Histoire. On s’est reconnu facilement parce qu’on était que deux à s’intéresser au Passé de notre espèce. Alors on a un peu plus sympathisé. Et puis après ça on a fait de la musique ensemble. C’était le bon temps.

Il lève les yeux et manque d’avaler sa cuillère en me voyant.

« Putain, j’te croyais mort ! »

Bah non. Je suis bel et bien en vie et bel et bien dans la merde.

« Hé ! Ca ne m’étonne même pas, j’t’ai toujours connu avec de la merde jusqu’au cou. »

Je lui demande comment il a fait pour se retrouver ici en pension complète. Je vois ça à son uniforme. Pour faciliter la justice, le Taulier a mis en place un système de peine sur quatre échelons :
- La pension Visiteur, entre 10 et 25 ans de prison, dont 5 avec sursis si vous avez un avocat à peu près honnête. Les uniformes sont kakis.
- La demi-pension, 50 ans de cabane, les uniformes sont marrons.
- La pension complète, 75 ans de cabane, les uniformes sont noirs.
- La All Inclusive, ancienne perpétuité, les uniformes sont gris.

Will m’explique la raison de sa présence en ses lieux,

« Après que tu te sois barré, le Noir a dissolu les Rainbow Men, d’ailleurs le Rose t’en veux toujours pour ça, alors je suis allé m’installer en Australie pendant quelques temps. Les Aborigènes ont repris l’île en main, ça été une incroyable révolution. »

Je le sais bien, ce sont les Révolutionnaires qui l’ont organisée. Mais je feins l’ignorance, après toutes ces années, je ne sais pas si je peux lui faire confiance. D’autant que je ne lui ai jamais confié mon appartenance à la Révolution, mais Will est un mec plutôt intelligent et il l’a sans doute deviné depuis longtemps.

« Là-bas, le Taulier n’a absolument aucune influence, c’était plutôt tranquille. J’ai mené une petite vie de peigne cul peinard. Je m’étais construit un petit pavillon à la campagne, je cultivais le thé et j’élevais des ornithorynques. Ca me changeait de nos activités avec les Rainbow Men.
Mais bien sur, ce petit paradis ne pouvait perdurer. Etant libre de l’emprise du Taulier et des Capitalistes, c’est devenu le refuge de tous les Mafieux de l’hémisphère Sud. Et puis j’ai fini par les rejoindre. Une famille est venu me trouver un jour avec un juteux contrat. Ils avaient entendu parler de nos exploits à Moscou en 2011, tu t’souviens ? Et il me voulait sur un coup qu’ils étaient en train de monter pour mettre hors d’état de nuire une famille rivale. J’ai accepté.
Et puis bien sur, ça a mal tourné, je t’épargne cette histoire, ca me file la gerbe rien que d’y r’penser. J’me pète la gueule avec un rhum que je fabrique moi-même dans la cuvette de mes chiottes pour oublier le naufrage de ma brillante carrière dans le grand banditisme. »

Il va me faire pleurer ce con. Je n’arrive pas à croire que le grand Will le Rouge ait pu échouer ainsi. Ce gars a toujours été un débrouillard, un vrai McGyver. Tu le collais dans une jungle avec un coton tige et un couteau suisse, le mec te construisait un hammam.

« Et toi, qu’est ce que tu fous ici ? La Mafia, c’est pas trop ton rayon si je ne m’abuse… »

Il me toise de son regard perçant derrière ses lunettes. Il sait. Il a toujours su. Alors je balance toute l’histoire. Je lui raconte tout depuis mon arrivée à Cape Town en tant qu’agent double au sein de la Mafia pour le compte de la Révolution. Je lui explique comment mes patrons m’ont envoyés ici pour que je zigouille deux gars et je lui explique que j’ai vraiment besoin de lui parce que tout seul, putain je doute d’y arriver. Il me répond simplement

« On peut toujours essayer. »

Fais le, ou ne le fais pas. Il n’y a pas d’essai.

« Alors faisons-le. »

L’idée est assez simple en fait. On doit s’arranger pour se retrouver chacun avec une des deux cibles à un endroit différent de l’établissement mais à la même heure. Les deux meurtres doivent avoir lieu simultanément pour empêcher les enquêteurs de faire le lien. Y’a déjà pas grand-chose qui lie les deux victimes et il n’y a aucune raison qu’ils soient au courant des mes relations passés avec Will.

A 17 heures, lors de la promenade de fin d’après-midi, Will et moi-même sortons dans la cour le plus naturellement possible et faisons comme si nous ne nous connaissions pas. Nous n’avons pas repris contact depuis la mise au point du plan. Pas la peine, nous sommes tout deux des professionnels et nous connaissons notre job.

Je vais donc à la rencontre de Guy la Lame Tordue. Je n’ai pas encore eu le temps d’approcher Emile tandis que le Rouge le connaissait déjà, et même qu’il s’entendait plutôt bien avec lui, ce qui faciliteras la mise en confiance précédent l’exécution sommaire qui lui paierait son billet de sorti.

Guy est bien content de me voir,

« Justement, j’cherchais après toi Sacrée Salope, viens donc faire un tour derrière le p’tit cabanon, j’te montrerais de quoi elle a l’air avant de te la foutre au cul ! »

Et en plus il va me faciliter le boulot ce con. Arrivé derrière le cabanon susnommé, je le laisse me matraquer à coups de poings, à défaut d’avoir sa Lame Tordue, histoire de lui faire croire qu’il est maitre de la situation. C’est très important avec ce genre de brute sans cervelle, leur donner une impression de ce qu’ils veulent, du respect et du pouvoir.

Il me met à genoux d’un coup de tatane dans les rotules et me sort son engin qu’il m’agite comme un sot devant le cigare. Comme je me l’étais promis lors de notre rencontre, je lui attrape la bite et la lui arrache à pleine dent. J’la recrache aussitôt dans ma main et la lui enfourne dans le gosier pendant qu’il hurle comme une thaïlandaise de 7 ans qui se fait péter la rondelle par un vieux porc en visite touristique.

Il s’étouffe avec sa queue.
Le violeur tué par sa propre arme.

Bon, j’ai réussi le contrat. Mais je suis couvert de sang et avec un macchabés dans cet état, difficile de faire croire au suicide. Je vire ma chemise et me nettoie rapidement le visage et les mains du sang de Guy. J’ai le visage tuméfié à cause de ces coups. Ca va forcément attirer l’attention. J’ai vraiment chié, là.

Je me faufile discrètement à l’infirmerie en broyant le coup du seul garde en place. Le docteur Gringalet classe des papiers et ne fait pas attention à moi. Je me saisis d’un scalpel sur le buffet en inox argenté et m’approche silencieusement du pauvre jeunot qui ne s’attend pas à ce qui va lui arriver. Je lui glisse la lame sous la carotide et lui intime de fermer sa gueule et de garder son calme, que tout se passera bien s’il s’en tient à ses deux consignes. Il me répond un « oui », étouffé par la peur et éraillé par l’angoisse. Je lui explique qu’il faut qu’il m’ausculte et conclu de mes blessures que j’ai simplement chuté dans l’escalier. Il noteras aussi que je suis arrivé il y a environ 20 minutes et que c’est Mr. Robertson, le gardien dans le couloir, qui m’a amené. La dernière fois que nous l’avons vu, il était donc bel et bien vivant et nous n’avons revu personne depuis. De plus, il fallait rapidement faire venir un hélicoptère pour m’évacuer car je devais être opéré d’urgence de l’appendicite.

Comme prévu, les sirènes ne tardent pas à faire un boucan d’enfer. Je ne sais pas ce qu’il en est pour Will mais les gardes débarquent dans l’infirmerie tandis que je suis assis, torse nu, sur un fauteuil tandis que Docteur Gringalet s’occupe de panser mes blessures. Il leur raconte toute l’histoire sans ciller, comme je l’a lui avais raconté. Vu les conditions de représentation, avec un scalpel sous les couilles en guise d’épée de Damoclès, le petit a fait preuve de talent et mériterait un oscar pour sa performance.

Les gardiens n’en demandent pas plus et vont voir ailleurs si le tueur, c'est-à-dire moi, y est.

Maintenant, il ne nous reste plus qu’à attendre après le Rouge.

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MessagePosté le: Lun 07 Juin 2010, 10:01 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Laissons un brin de répit à notre narrateur et laissons le Rouge reprendre le fil de l'histoire ^^

Chapitre XIII : Lundi 17, du côté de chez Will


Si on m’avait dit que je retrouverais ce con là pendant mon séjour à l’établissement pénitentiaire de Robben Island, je l’aurai pas cru. Déjà parce que le Blanc n’est pas du genre à se faire attraper pour rien, ensuite parce qu’il n’a rien à faire dans une prison pour la Mafia étant donné ses affiliations révolutionnaires.

Bien sur, il ne m’en a jamais parlé, mais je l’ai deviné à l’époque des Rainbow Men. Il était assez évident que lui et le Vert sortaient de cette école secrète et étrange d’Afrique du Nord où était formé le futur de la Révolution. Moi j’ai plutôt était élevé par la Mafia. Mes premiers amours avec le grand banditisme ont commencés dans mon village natale, avant de rejoindre Naples.

Je suis né dans un petit bled de la Sicile appelé Corleone, près de Palerme (environ une heure de route en voiture), à la fin des années 1980, comme tous les Rainbow. L’année témoin de nos naissances devait être maudite…Chacun d’entre nous s’est fait un nom dans les activités souterraines du monde comme nous le connaissions avant le Taulier, et même au sein de notre monde actuel. Enfin moi un peu moins, étant donné que je suis en cabane depuis un peu plus d’un an maintenant. Et le Pourpre a arrêté les conneries avant nous tous et élève des moutons en Alsace.

A Corleone, la vie était plutôt tranquille. Je passais mes journées entre l’école primaire du village, avec une dizaine d’autres enfants du pays, et puis le soir je rejoignais le foyer familiale. La mama nous cuisinait des plats de pâtes énormes, des morceaux de barbaques de 300g et des pizzas couvertes de tomates du jardin, de pepperoni, d’olives vertes, de mozzarella et de jambon de Parmes.

La vie était donc plutôt tranquille et puis l’année où j’ai soufflé mes dix bougies, il m’est arrivé un truc pas banal. J’étais parti faire une partie de sonnette à vélo du côté des vieux silos à grains avec Luigi, un copain de mon école qui habitait à deux pas de chez moi. Il était plutôt peureux et inutile et il faisait ce que je voulais, alors c’était mon meilleur copain.

C’était un après-midi dominical, je m’en souviens parce que la messe avait été particulièrement chiante cette fois-là, j’veux dire, encore plus que d’habitude mais j’étais obligé d’y aller à cause de ma mère. On est arrivé du côté des silos quand on a entendu des mecs se gueuler dessus à propos de je ne sais qui manquant de respect à un autre cave qui semblait être le patron.

On s’est approché, j’ai intimé à Luigi l’ordre de fermer son claque-merde. Le con n’arrêtait pas de pleurnicher en me suppliant de faire demi-tour. Et ça ne s’est pas arrangé quand on a vu deux types se faire descendre à coups de pétoires. Les détonations ont raisonnées dans un bruit assourdissant et j’étais en totale admiration devant la force de ces mecs-là tandis que Luigi chiait dans ses caleçons.

Et puis comme il n’arrêtait pas de couiner et qu’on était quand même assez proche de la scène, les gars nous ont repérés, mis en joue et nous ont ordonnés de sortir de notre cachette. C’est ce qu’on a fait. Celui qui allait devenir mon capo s’est approchés et nous a demandés ce qu’on branlait là et si on avait vu quelque chose. Luigi répondait par la négative tout en implorant pour sa vie. Mais moi, je voulais partir avec eux. J’ai tout de suite compris que c’était la Mafia et ce monde m’a toujours laissé rêveur.

« Moi j’ai tout vu, m’sieur ! Mais je ne dirais rien à personne m’sieur, j’veux juste travailler pour vous ! Je suis débrouillard et j’ai pas froid aux yeux, vous pouvez m’croire, m’sieur ! »

C’est comme ça que je me suis présenté. Le capo a éclaté de rire, m’a mis une arme dans la main et m’a dit qu’il avait besoin d’hommes, de vrais. Est-ce que j’en étais un ? Evidemment que j’en suis un ! Le capo semblait satisfait de ma réponse, mais me disait que ce n’était pas suffisant et que j’allais devoir le lui prouver en abattant mon amie chochotte ici présente en la personne de Luigi.

Alors je l’ai fait. J’ai allumé Luigi, mon inutile meilleur copain. C’était la première fois que j’utilisais une arme à feu alors je m’étais un peu foiré. Je lui ai collé un premier pruneau dans le bras. Il hurlait de douleur en tenant la plaie déchirée et brûlée, inondée par le sang qui affluait hors de ses veines. J’étais tout à fait confus. J’ai tiré une deuxième fois mais j’ai encore raté et il a reçu la dragée dans le genoux. Ca fait un mal de chien mais on n’en crève pas. N’empêche qu’il a la rotule complètement arrachée. Je tire une troisième fois et c’est la bonne. Alors qu’il se vide de son fluide vitale par le bras et le genoux, je lui explose enfin la tête. Des morceaux de crânes recouverts de sa tignasse brune volent dans toutes les directions en arrosant au passage les bas du pantalon de toile beige que m’avait offert mon père. Enfoiré.

Le capo s’appelle Reggi. Le parrain, c’était Vitto Gorigione, et Reggie m’a emmené le voir tout de suite après ça. Les mecs n’en revenaient pas qu’à 10 ans, j’ai déjà suffisamment de couilles dans le slibard pour allumer mon pote si on m’en donne l’ordre. Ils aiment ceux qui roulent au pas dans la Mafia. Je leur ai quand même dit que j’allais pas faire ça tout les jours non plus mais que je voulais bien bosser pour eux.

Ils m’ont collé à la r’fourgue de cancerettes. Je revendais des cartouches de Marlboro pour 25€ et des Lucky Strike pour 23€. Je prenais 15% sur chaque cartouche vendue et je peux vous dire que sur ce coup-là, Reggie m’avait fait une sacrée fleure parce que les cancerettes, ça rapporte un max’. J’ai fait ça pendant ça pendant deux ou trois ans, plus quelques boulots par-ci, par-mi au fur et à mesure que je prenais du galon. A cette époque, j’ai eu en tout trois caves à liquider, sans compter Luigi.

Et puis un jour, mes parents, qui avaient déjà de sérieux doute, probablement à cause de mes costumes trois-pièces signés par de grands couturiers, ont découvert le pot-au-rose en farfouillant dans mes affaires. Ils sont tombés sur mon revolver, mon couteau, ma pipe, mon oseille, tout quoi.
Alors forcément, on s’est pris le bec et j’ai fini par faire mon sac. J’avais mis pas mal d’argent de côté et j’ai pu partir à Naples. Là bas j’ai vécu pendant un temps dans les parcs, survivant en vendant des produits dont le port était prohibé. Et puis finalement, Vitto et Reggie m’ont retrouvés. Ils m’ont demandés pourquoi j’avais mis les voiles comme ça. Je leur ai expliqué que je m’étais fait coincer par mes parents et que j’ai préféré me faire la malle plutôt que d’avoir à répondre à des questions gênantes pour la famille. Ils ont appréciés le geste et m’ont dégotté un appartement, un job et m’ont même payé les études. J’ai donc fait le collège à Naples et j’ai décroché une bourse pour aller étudier dans un lycée en France. Justement Vitto voulait se lancer dans l’exportation. Je lui ai proposé d’être son revendeur à Lille et l’idée lui a bien plus. C’est comme ça que je suis arrivé dans le Nord et que j’ai fait la rencontre des Rainbow Men et du Blanc.

Et là, deux ou trois ans après la séparation du groupe, je le retrouve dans une prison pour mafieux à la pointe du monde…Je manque d’en avaler ma cuillère. Pourquoi est-il assis en face de moi ?

« Et toi, qu’est ce que tu fous ici ? La Mafia, c’est pas trop ton rayon si je ne m’abuse… »

Je le toise de mon regard perçant derrière mes lunettes. Il sait que je sais. Il le sait alors il finit par cracher le morceau et me propose de monter un plan pour zigouiller deux pensionnaires, son voisin de suite et mon pote Emile. Ca m’emmerde de devoir le liquider mais si ça peut acheter ma liberté, pourquoi pas.

On met au point ensemble un plan pour faire avaler leur bulletin de naissance à ses deux pauvres caves. Ils mourront au même moment, à deux endroits différents. Ils doivent mourir à 17 heures 15. Ensuite, on se retrouve à 18 heures à l’infirmerie et on s’évade en se servant du Docteur Gringalet qui nous feras passer moi, pour son neveu qui doit faire une journée d’immersion dans le cadre de ses études tandis que le Blanc joueras un mec en fauteuil roulant.

Plutôt simple. On se met bien évidemment d’accord pour ne plus communiquer jusque demain 18 heures, afin d’éveiller le moins de soupçons possibles. On se souhaite donc la bonne journée et allons vaquer à nos occupations chacun de notre côté.

Putain, si on m’avait dit que je retrouverais ce con là pendant mon séjour à l’établissement pénitentiaire de Robben Island, je l’aurai pas cru.

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MessagePosté le: Mar 08 Juin 2010, 3:30 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Parce que Cantat c'est un sacré poète.

Chapitre XIV : Mardi 18, Bouquets de Nerfs


Journée de la pleine Lune, au sommet de la Dune, à caresser de loin,
Ton chien.


Perché en haut des gradins du terrain de football en macadam, je dégustait un thé-roulé que j’avais réussi à monnayer contre le cul de mon voisin de suite en regardant les nuages gris passer au grès du vent, juste au dessus de moi, semblant se payer nos fioles à nous, pauvres pensionnaires privés de liberté.

Aujourd’hui, mardi, est un grand jour car je vais mettre fin à la vie d’un homme et par là même à mon emprisonnement. Tout cela est fort excitant. J’ai choisi mon arme, mes mains. Je vais le noyer dans une flaque d’eau et faire passer ça pour un suicide. Je suis allé le trouver pendant le déjeuner de midi et lui ai filé rencard à l’heure qu’on avait prévue le Blanc et moi, prétextant avoir terminé ma nouvelle cuvée de rhum et vouloir la lui faire goûter.
Emile le Chauffeur en est enchanté mais me précise tout de même,

« Vaut mieux pour toi que tu sois à l’heure pine d’oiseau ! »

On a sympathisé quand je suis arrivé. Bon je sais qu’il a massacré sept mômes (et encore ça, c’est la version officielle) un peu moisies du citron dans l’Yonne, en France, du côté d’Auxerre, mais ça n’empêchait pas le bougre d’être amical quand il était dans un bon jour. De savoir qu’il allait se pinter la carafe au rhum l’a mis dans un excellent jour.

Emile le Chauffeur est un pauvre vieux mec qui s’est retrouvé ici par un malheureux hasard. Il n’avait pas suffisamment bien planqué les corps de ses victimes qu’il ne pouvait s’empêcher de violer et de remplir de son mauvais vin avant de les abandonner, sans vie, la Légende complètement abattue par des coups de matraque emplis de haine. Il faisait systématiquement la connaissance de ses victimes dans le bus qu’il conduisait. Il les repérait, les observait plusieurs jours pour s’imprégner de leurs habitudes et faire monter la sauce.

Et puis il a fini par être relié à un réseau pédophile dont il contrôlait la vente des cassettes et des souvenirs pour la Mafia locale. Il a été arrêté et envoyé ici il y a plus de 20 ans. Il est un peu aigri comme homme, et un peu cinglé aussi, faut bien le dire.

Quand j’arrive à 17 heures, sous le porche, à la sortie des poubelles, derrière la cafet’ –y’a jamais personne, va savoir pourquoi-, Emile est déjà là.

« Qu’est-ce que tu foutais pine d’huitre ? T’avais dit 17 heures ! »
« Tout doux, il est à peine 17 heures passé de trois minutes. »
« Ce sont trois minutes de trop pine d’écureuil, il a intérêt à être bon ton rhum. Le dernier avait un goût de pisse. »

Il a une drôle d’obsession pour les pines d’animaux quand même…Je lui tend la bouteille qu’il m’arrache des mains. Il me tourne le dos pour siffler un quart du breuvage. Je lui attrape la gorge et sert bien fort jusqu’à que le mec s’écroule, dans les vapes. Je le retourne pour qu’il ait le visage dans une flaque d’eau, dans le macadam troué de nid de poule.

Il meurt en se noyant calmement. Je maintiens son visage dans 7cm d’eau, et me délecte de sentir sa vie s’en aller pour nul part. Je passe ma main dans le fond de sa gorge pour étouffer ses plaintes en pressant ses cordes vocales.

Trompe la mort et tais toi
Trois petits tours et puis s’en va,
J’opère tes amygdales, labyrinthique
Que dalle
Mais plus rien n’égale, je sais
Je n’ai offert que des Bouquets de Nerfs


Je me barre fissa pour rejoindre l’infirmerie. Je longe silencieusement les couloirs en prenant garde d’éviter les grumeaux qui couraient dans tous les sens. Et puis la sirène retentit.

Juste avant d’arriver à l’infirmerie, je vois un corps de maton inerte, gisant sur le sol, la nuque brisé. Sans doute le Blanc. Des bottes raisonnent dans le couloir d’en face. Je me planque dans un placard. Heureusement dans ce genre de situation, il y a toujours un placard à balais ouvert.

Les bottes se dirigent vers l’infirmerie, j’entends le doc expliquer des trucs mais je n’arrive pas à saisir ce qu’il raconte. En tout cas, les bottes s’en vont. Je sors de ma planque et je retrouve le Blanc, se mettant en tenue pour son rôle de pauvre malade qui doit rapidement être opéré de l’appendicite. Le docteur Gringalet a déjà appelé un hélicoptère et signé les papiers nécessaires. Une blouse blanche avec le nom de « Stagiaire » cousu sur la poitrine a été préparé à mon attention. Je me change rapidement et on se fait la malle.

On passe sans problèmes les contrôles d’identités, ils étaient bien trop occupés à fouiller tous les pensionnaires pour savoir qui avait une cisaille capable d’arracher la bite d’un mec aussi horriblement. On atteint le toit de la prison assez rapidement par l’ascenseur où l’hélicoptère est en train de se poser. C’est drôle mais le pilote n’a pas vraiment l’air sobre…Il cache tant bien que mal sous un Borsalino élimé des cernes plus profondes que le Grand Canyon et porte un vieil imper beigne au dessus d’une chemise blanche tâchée et d’une cravate bleue.

Le Blanc s’exclame,

« Shelby ! Bordel de foutre de merde ! J’aurai du me douter que c’était toi ! »
« Fermes donc ton claque-merde et montez ! »

On grimpe rapidement à bord de notre arche de Noé et on s’envole loin de cette île, au nez et à la barbe des matons qui arrivent seulement sur le toit. On allait avoir besoin de nouveaux papiers…
On atterrit dans la savane au nord de Cape Town. Là, nous attendent une jeep et une moto, ainsi qu’un mec, probablement un Révolutionnaire.

Quand on descend de l’avion le mec vient nous accueillir et nous remet à moi et au Blanc, une enveloppe contenant nos nouvelles identités et un joli paquet de pognon pour redémarrer dans la vie.

Le mec en costard Armani et lunettes Ray Ban explique au doc qu’il pourrait bien acheter son silence mais qu’il ne lui semble pas être le genre de type capable de faire taire sa langue de pute alors il lui colle une bastos dans le crâne et laisse les hyènes et les vautours rôdant pas loin se charger de le faire disparaitre.

Il s’excuse auprès du Blanc en lui disant qu’ils n’avaient pas bien le choix, que c’était le seul moyen d’être sur. Scott va rester avec lui quelque temps à Cape Town, mais en renfort cette fois. Ensuite, il me propose de rentrer dans l’équipe. Je refuse poliment. Je vais plutôt retourner en Australie, retrouver ma petite vie de peigne-cul auprès de mes ornithorynques. Je fais donc mes adieux au Blanc, une seconde fois, je le remercie pour tout et je me casse en chevauchant la moto dans le soleil couchant.

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MessagePosté le: Mar 08 Juin 2010, 3:37 pm    Sujet du message: Répondre en citant

Chapitre XV : Mercredi 19, Sal Paradise


Le Rouge est partit, j’ai passé deux jours en prison et après une évasion extraordinaire, me voila revenu dans les rues puantes d’urine encore chaude, aux trottoirs parsemés de clochards sous des journaux ou des cartons, essayant de dormir ou de récupérer quelques piécettes auprès des pèlerins, moi y compris, qui continuent leur route sans même poser un regard sur la misère humaine qu’ils foulent du pied.

Je fais comme eux, et devant cette vieille édentée qui me tend la main en crachant la moitié de ses poumons, je redresse le col de ma veste et je baisse mon chapeau sur les yeux.

Je vais m’rincer les molaires dans un bar sur Greenmarket Square avant de remonter Shortmarket et d’aller expliquer à Eddie le Gentil en quel honneur je m’étais payé quelques jours de congés. Je suis en retard d’environ 64 heures, je peux bien prendre une demi heure de plus pour m’envoyer une mousse.

C’est plutôt bien éclairé dans ce petit rade qui vends toutes sortes de spécialités à base de poisson. Je peux pas blairer ça la poiscaille.

Je m’assois au comptoir, près de l’électrophone qui diffuse un vieux jazz bien péchu qui te balance un It comme je l’aime servi par Mark Murphy ! C’est un bon classique celui-là. De 81. Y’a quelques années déjà, j’étais pas encore né. Par contre, je ne me souviens pas du titre de l’enregistrement…C’est en hommage à un mec, un écrivain…Mais il est trop vieux pour qu’on en parle encore…L’écrivain en question est soit parti de sa belle mort, soit parti la bouche plein de racines de pissenlits après la rafle du Taulier il y a deux ou trois ans. Les libres penseurs ont été poursuivis et déportés, leur existence tout simplement rayée, effacée. Tout le monde prétend n’en avoir jamais entendu parler. C’est arrivé juste comme ça. Les gens ont oubliés, moi y compris. Au début, je pensais que ça prendrait une blinde avant que le diagnostique d’amnésie générale ne soit proclamé mais en à peine deux ans, on était tous groggy, comme si on s’était pris un crochet du gauche par Alzheimer en pleine carafe.

Je commande une mousse et, dans un geste de rare bonté, me sentant probablement coupable d’avoir ignoré cette pauvre vieille qui me demandait juste de quoi bouffer, j’en pays une à mon voisin d’infortune. Le bonhomme lève la tête et me remercie d’un simple hochement de tête avant de se présenter,

« Je m’appelle Sal Paradise. Alors, toi aussi tu t’es égaré Sur la Route ? »

Encore un illuminé. Un vieux. Vraiment vieux. Il a l’âge d’être déjà mort. L’âge d’être né au début du siècle précédent. Tiens, mettons 1922. Il a la peau creusée de larges sillons bruns dans une peau jaunie. Il n’a presque plus de dents, les gencives saignantes, « comme un terrible saxophoniste que j’ai connu », et l’iris des yeux presque blanc. Quelques rares cheveux transparents parsèment son crâne constellés de tâches marron claires. Ses mains sont néanmoins robustes et il semble tenir droit sur ses guibolles quand il se lève pour changer de disque. Il remplace Murphy par Gillespie qui se ballade avec sa trompette dans les rues de Paris.

Tandis que le dit-Gillespie nous raconte son amour nommé Lorraine ou sa lune nommée Nocturne, Sal me repose cette étrange question,

« Alors, toi aussi tu t’es égaré Sur la Route ? »

Pourquoi me demande-t-il ça ? De quelle route veut-il parler ?

« A une époque j’avais un chez-moi. J’te dis ça c’était y’a bien longtemps, mais du genre vraiment éloigné, quand tout n’était pas rose mais qu’on savait encore gueuler, ou à défaut, faire chier les trois quarts des Etats Unis en ne marchant pas droit, en allant dans notre direction à nous, c'est-à-dire partout. »

Qui ça, « nous » ?

« Eux et moi enfin ! La fine équipe ! Y’avait d’abord Dean Moriarty avec qui j’ai vécu un bout de temps un paquet d’aventures sur la Route. Parce que sache-le, pour la route, Dean est le type parfait, car il y est né, sur la route, dans une bagnole, alors que ses parents traversaient Salt Lake City en 1926 pour gagner Los Angeles.

Mais Dean a pris sa propre Route et a roulé jusqu’à son horizon.

Quand j’ai rencontré Dean c’était l’été et ça faisait même pas deux ans qu’Hiroshima et Nagasaki avaient été rayées de la carte. Je sortais d’une maladie et ma femme venait de me foutre à la rue. Et c’est là que j’ai rencontré Dean. Un grand malade, un enfant de la Vie, un vrai de vrai mon gars. Lui il saisissait sans arrêt le It, tant qu’il le pouvait, tant qu’il l’a pu.

Ensemble on est partit et on a croisé pleins de gens comme nous, des poètes, des écrivains, des rebelles, des révoltés contre un monde qu’on ne comprenait plus. Mais on n’était pas nombreux et nous, tout ce qu’on voulait, c’était pouvoir vivre l’instant, le moment présent, cette gorgée unique qu’il faut savoir prendre le temps de déguster sans trop s’y attarder pour ne louper aucun des autres délicieux moments qui se profilent à l’horizon. Et cela requérait l’absolu nécessité d’emmerder royalement les bonnes mœurs et autres usages bien établis.

Et il n’y avait pas que ce fameux Dean ! Y’avait aussi Old Bull Lee, un écrivain dont le grand péché était d’aimer un peu trop le sucre brun. On a vécu ensemble pendant un temps, à Mexico. Même que j’ai écrit un de mes premiers romans dans ses toilettes ! J’aimais Old Bull Lee et je crois, non je suis sur en fait, qu’il m’aimait aussi.

Jamais je ne pourrai oublier l'horreur indicible qui glaça la lymphe de mes glandes quand le mot honteux surgit dans mon esprit torturé…J’étais un homosexuel, m'a-t-il dit une nuit.

C’était le plus sombre des Anges que je connaissais. Il a passé beaucoup de temps sur la Route, s’est arrêté une époque pour épouser une fille avec qui on avait vécu et avoir un fils. Mais sa femme, il l’a tué d’une balle dans la tête en jouant les Guillaume Tell alors il a du reprendre la Route et il est partit pour l’Amérique du Sud trouver son salut et puis il est partit à Tanger où il resta allongé dans un petit appartement minable pendant plus d’un an sans bouger de cette position sinon pour aller faire le plein d’héroïne ou de morphine. Je l’ai retrouvé là bas, avec un autre Ange, Carlo Marx, on l’a aidé à faire le tri dans un foutu bordel de manuscrits divers et il en a fait un Festin Nu des plus succulents.

Carlo Marx était différent en cela que lui était un poète. Et il était Shivaïste aussi. Tu sais ce que c’est qu’un Shivaïste ? Non bien sur que non, tu es trop jeune. Au mieux tu as vaguement souvenirs d’en avoir peut être bien entendu parler.

Shiva est la déesse hindoue de la destruction, de la fécondité et du cannabis. Mais tout ça, la religion et la philosophie, le Taulier les a simplement supprimé. Comme les Capitalistes d’ailleurs. Carlo ne les aimait pas bien non plus et a souvent protesté de vive voix contre la morale puritaine qui voulait condamner l’homosexualité, encourager la guerre et punir les camés.

Il racontait dans un de ses poèmes, un Hurlement en fait, que lui et les autres Anges restèrent debout en fumant dans l'obscurité surnaturelle des chambres bon marché flottant par-dessus le sommet des villes en contemplant du jazz, qui ont mis à nu leur cerveaux aux Cieux sous le Métro aérien et vu des anges d'Islam titubant illuminés sur les toits des taudis,

Lui aussi a été jusqu’au bout de la Route avant d’être rattrapé par la Mort drapée cette fois-là d’un grand C.

Les Anges étaient fous, ils étaient vrais.

Les seuls gens vrais pour moi sont les fous, ceux qui sont fous d'envie de vivre, fous d'envie de parler, d'être sauvés, fous de désir pour tout à la fois, ceux qui ne baillent jamais et qui ne disent jamais de banalités, mais qui brûlent, brûlent, comme des feux d'artifice extraordinaires qui explosent comme des araignées dans les étoiles, et en leur centre on peut voir la lueur bleue qui éclate et tout le monde fait « Waou ! ».

Et puis y’avait moi aussi. Il parait que c’est moi qui ai entrainé tout ce petit monde en excursion sur la Route mais c’est faux. On était juste des vagabonds rêveurs et on s’est trouvé à un carrefour et décidé de poursuivre une Route commune pendant quelque temps.

On a vécu un paquet d’aventures extraordinaires ensemble et c’est une époque de ma vie que je regardais avec nostalgie quand je suis allé reposer mes guêtres à Montréal. La Route me manquait. Car la Route vois-tu,

la Route, c’est la Vie,

alors pour vivre, je me devais de la reprendre, de larguer une fois de plus les amarres, jeter mon balluchon sur une épaule et mes regrets et mes attaches par-dessus l’autre pour repartir.

Repartir sans jamais se retourner, c’était ce qu’on se disait à l’époque, apprécier l’instant que nous procuraient nos vibrants voyages à pieds, en bus, en voiture ou à l’arrière d’une bétaillère entre Chicago et Frisco. Le but importait peu, ce qui comptait c’était de rencontrer toute sorte d’individus, ceux qui nous voyaient comme de doux cinglés, ceux qui nous voyaient comme de dangereux criminels aux idées subversives, ceux qui nous jalousaient, ceux qui nous enviaient, ceux qui nous haïssaient et, mes préférés, ceux qui s’en foutaient.

On en a vu des choses, des rues sordides de Denver au soleil de la Californie en passant par les déserts du Mexique et les montagnes de l’Amérique Latine. Le froid de l’Illinois et la neige de New York. Les rues illuminés de Paris et le Satori qu’on y trouvait. La drogue de Tanger et l’extase de la poésie, du jazz, de la contre-culture, de l’alcool et des femmes, pubères ou non. A l’époque on ne s’en préoccupait guère dans les bordels mexicains de Monterrey et de Saltillo, près de Mexico.

En fait, ce qu’on a tous recherché, toute notre vie, c’est un endroit où on puisse être nous, les exclus du rêve américain, vivre tranquillement au grès de nos désirs, le p’tit coin de paradis qui diffère selon les individus. Et ben nous c’était la Route. Et quand on décide de la quitter on se perd et on meurt dans le désert sans jamais savoir ce qu’il y a au bout de cette putain de route.

Moi je n’ai jamais plus quitté la mienne, je suis allé au bout. Et je suis revenu. Et maintenant je n’ai plus rien d’autres à foutre qu’à m’envoyer des choppes en écoutant du jazz et en racontant ma p’tite histoire à qui voudra bien l’entendre.

Alors, toi aussi tu t’es égaré Sur la Route ? »

Putain, j’en sais foutre rien mais ce qui est sur c’est que ce mec a du voir de ses yeux et de son cœur et de sa Légende plus que n’importe qui. Son voyage infini en quête d’un lieu idéal est finalement celui de tous, moi y compris, mais nous manquons de la paire de couilles dans le futal nécessaire pour envoyer chier le confort d’un chez-soi et d’une retraite complémentaire et partir à notre tour à la recherche de notre Best Place.

Ou alors peut être que les bobos, les bien pensants, les conformistes, les moutons, les traders, les négociateurs, les militaires, les policiers, les politiques, les extrémistes ont trouvés dans leur vie monotone, fade, commune et grise leur Best Place à eux, peut être n’ont-ils pas le besoin de courir une longue bande de macadam anthracite, qu’ils ne se posent même pas la question et qu’ils sont heureux comme ça. Après tout, c’est en se conformant qu’on est compris, et donc accepté, et c’est quand on est accepté qu’on est heureux.

Mais pour des gars comme les Anges Vagabonds, qui ont le désir de vivre comme ils l’entendent et non comme l’establishment en vigueur l’exige, il faut se bouger le fessier et aller de l’avant, quitte à en crever poignarder dans son sommeil sur le banc d’une gare, à voir son cœur lâcher après une piquette trop chargée, à perdre son manche dans le con syphilitique d’une catin de Bogota ou sentir que le moment est venu et qu’il faut maintenant quitter la Route.

Magnifique.

Ces mecs dont me parle Sal, ces Anges, ils semblaient avoir tout compris. Ils étaient écrivains, auteurs, poètes, musiciens ou même cinéastes. Tous ressentaient le monde et la réalité et les décrivaient comme ils les voyaient, en trempant leur plume non pas dans l’encre
ou dans le sang mais dans
la Vie.

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Chakal D. Bibi
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MessagePosté le: Sam 12 Juin 2010, 7:46 pm    Sujet du message: Répondre en citant

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The Weeding-Dress

The bride-to-be lies in her bed
listening to
Festivities below
He steals her – in a dream


La Robe de Mariée

Etendue sur son lit la future mariée
écoute les
Festivités en bas
Dans un rêve – il l’enlève


Jim Morrison, La Nuit Américain, 1971

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