Ils sont là : face à face, face à face comme autrefois…
« Non, pas comme autrefois, se dit Sasuke, pas comme autrefois, j’ai changé, je suis plus fort et je… je… »
Il regarde un instant celui qui lui fait face, ce visage si familier et si distant à la fois, il ne distingue rien, rien qui ne puisse lui dire ce que « l’autre » ressent ; le miroir est sans reflet… peut-être craquelé, brisé, morcelé mais lisse, sans cassure apparente, sans cette putain de cassure qui le rendait lui, si faible ! Sans cette souffrance qui le rongeait jusqu’à lui trouer l’estomac ! Sans cette boule qu’il sentait rouler lourdement en provoquant des sombresauts inquiétants…
Il est là ! Putain, là ! Tout près ! Là ! Merde !
Balancement fragile du cœur fraternel : H ou A ? A ou H ?
Non ! C’est vraiment pas le moment ! C’est quoi cette interrogation stupide et importune ? Digne d’une sous-merde ! Il n’est plus rien pour moi, juste quelques morceaux de chairs assemblés sur des os, des muscles, du sang : je le haIS, le détesTE : MEURTRIR puis MOURIR et MOURIR et encore MOURIR, pour toujOURS, à jaMAIS !
Cette chose, cette chose face à lui, immobile, ce visage qui ne lui dit rien, ce regard figé, cette expression froide mais pas comme eux, pas comme ces blocs de glace à l’œil laiteux qui pleurent parfois ; pas comme eux… pas comme eux parce que lui est ce qu’il est, ce qu’il a choisit d’être alors, il ne pleure pas, jamais : les larmes : « connais pas. » ; les larmes : « ça a quel goût ? » ; les larmes, lui ?
…
Les larmes ? Tu ne me le demandes pas, mais je me le demande à ta place. Toi, la saleté, la moisissure qui reste ancrée dans mon organe poitrinaire, ancrée comme une sangsue avide et qui ne lâche jamais prise, toujours là, suçant et avalant sans pour autant s’ennivrer et perdre sa lucidité… Mais merde ! Pourquoi ?! Pourquoi est-il si fort à dominer ce qu’on appelle « les sentiments » ? HA HA ! En a-t-il seulement ? Sait-il ? Non, c’est certain, il ne sait rien, rien de ce que moi je sais, rien de ce qu’il m’a fait savoir ce jour là : ce mec est un mécanisme à lui tout seul, robotisé sans une seule réflexion personnelle…
C’est vrai ?
Non, justement, non !
Merde ! NON ! Il sait ! Il sait tout ! Et c’est pour cette raison qu’il a entaché l’éventail, entaché… L’éventail s’est totalement plongé dans un bain rouge, lourd, métallique et pesant. J’ai perpétué la tradition malgré moi, malgré ce que l’on s’est efforcé de me dire : trop tard… Mon cœur a sombré il y a bien longtemps, il s’est effrité et sa couleur naturelle s’en ait allé épouser le sombre, le visqueux, le noirâtre : trop tard.
Je…
- Sasuke…
Voix dure, mécanique, sans écho ; qui ne se confond pas.
- Sasuke…
ARRGGGHHHHHH !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
NON !
Pas ça ! Non ! Du… Du… Non !
Qu’est-ce qu’il se passe ?!
Lame blanche qui s’enfonce lentement, douloureusement ! J’ai si mal, si mal ! Mal à mon cœur, j’ai… SSSSSSSSI mal…
ARRGGGHHHHHH !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Ma tête, ma tête, ma têTTTTTTTTTTTEUh !!!
Trouée, trouée, ma tête trouée.
Le sang fuse de toute part, lac rougeâtre qui s’éjecte de ma bouche, amer et bouillant ; ma têTTTTTTTTTTTEUh !!! Qu’est ce qu’il m’aAAAAAAAAAAAAAARRRRRRRRRHHH !!
Ma tête, MA tête ! Encerclée par des bras gluants qui sortent par des orifices inconnus jusqu’aujourd’hui, des tentacules cervicales qui m’étouffent.
Mes yeux !
ARRGGGGHHHHHH !
Ils pendent de leur orbite, je les vois, je… IL… je.. IL … je…
Lui ! Lui !
- Sors ! Sors petite enflure, enfoiré de mes deux ! Sors de ma tête ! Sors ! Putain MAIS SORS !
- Sasuke…
- Sors, j’veux plus te voir, dégage je veux te voir crever, sors, j’veux plus te voir alors dégage mais putain reste s’il te plait ! Je t’en supplie, je t’en prie ! Reste ! Sors ! Sors ! Mais reste ! Que je t’arrange un peu ta cape et ton chapeau à clochettes !
- Sasuke…
- Tu l’as fait, t’as aucune idée de ce que tu as pu me faire endurer ! Sors de là, reste là !
- Sasuke, je…
- Ferme la connard !
- Sasuke…
- FERME LA BROYEUR DE CŒUR ! Tu m’as tué une fois, tué sans mourir, toi… toi… TOI !! T’es pas mort, pas mort pas mort, t’as toujours été vivant, là, là ! Là en dedans de moi ! Toujours là à me poursuivre, toi et ton regard qui bouge pas, toi et ta silhouette de mec mécanique, toi et toi, rien que TOI ! Elle est là ma haine ! Tu la voulais ?! Elle est là, matérialisée devant toi, cet enfant que tu portais dans tes bras vivants sans vie, cet enfant qui t’adulait plus que tout, cet enfant qui te regardait avec envie : cet enfant, il est là, devant TOI, NOIR, plein de SA haine, plein de ce que TU voulais !
- Sasuke…
- Tu vas t’en aller, t’en aller rejoindre les nuages rouges pour lesquels tu as bouffé père, mère et clan ! Et tu sais comment ? Je vais te bouffer ! Je vais te démembrer et te bouffer comme tu m’as bouffer, tu saisis connard ??? Tu SAISIS ?????!!!!!
Et il était encore devant moi, il ne bougeait pas, ne disait rien.
Juste ce prénom qui m’appartient… Répétition invariable, inlassable et monotone. Que veut-il ?? Me bouffer mon prénom aussi ?!
- Sasuke…
- Laisse moi, laisse moi, LaiSse mOi ! N’ouvre pas ta maudite bouche ! Laisse moi te bouffer tranquillement, te bouffer jusqu’à en crever véritablement. Enfin, je serais soulagé et bien sûr rassasié, je boirais ton sang, le notre, celui que tu as bu avant de t’en aller cette nuit là… T’en penses quoi ? Rien ! Comme d’habitude, tu dis rien, RIEN ! T’es gavant à la fin !
- Sasuke…
- Sasuke ? C’est quoi ? Mon prénom ? Désolé : connais pas…
- Sasuke…
Il n’arrête pas, n’arrête pas, veut quoi ? Maintenant ? Je crois qu’il est temps.
- Sasuke…
- Sasuke parti, Sasuke pas là : comprends tu ? J’pense pas que tu comprennes >< t’as vu mes yeux ? >< Tu captes ?? Nan, je pense pas alors je vais te montrer ce que ça signifie ça >< t’auras une bonne définition, t’inquiète pas pour ça…
- Sasu…
- Tu vois ça ? C’est une arme moderne ! Le top du top : la matraque électrique made in Je sais pas, c’est une dingopathe qui me l’a prêté, elle m’a dit que c’était pas mal avec de l’eau, vu qu’y’en a pas à Konoha, je l’ai remercié gentiment : elle est morte. Bah oui, fallait s’y attendre, je suis un Uchiha, un éventail entaché.
- Sasuke…
- La ferme, tu vois pas que ma bouche se gonfle ?
- Sasuke…
- Suiton no jutsu
Zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzttt zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzttt zzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzttt
Il est temps : je veux voir son visage s’animer de douleur, son visage se tordre de souffrance, celle-là même qui agrippe de ses doigts fourchus mon fichu cœur. Pas besoin de cet œil maudit, la matraque suffira, sauter et lui montrer que je peux faire mal, mal, très mal comme il m’a fait mal, mal, très mal, qu’il puisse voir ce gouffre noir, que ce gouffre puisse le happer comme il m’a happé et entouré de ses bras noueux :
ZZZZZZZZZZZZTTTTTTTTTT ZZZZZZZZZZZZZZZTTTTTTTTTT ZZZZZZZZZZZTTT
- Crève ! Chope et crève frérot de malheur !
- Sasuke…
- Ca suffit ! Crève, crève, crève !
Pourquoi est-ce qu’il ne crève pas ? Pourquoi son visage ne bouge pas, pourquoi malgré ces coups « zzzteux » reste t-il froid ? Sans animation, aucune mimique, aucun sourire souffreteux, aucune souffrance… Il est mort.
MORT MORT MORT
Il est mort, déjà mort…
Plus de « Sasuke »
Rien…
Plus rien…
Je… Je ne comprends pas… TROP brusque, trop vite, faut le secouer, il ne peut pas être mort, il ne doit pas être mort… Parce que… Je… ne… Faut le secouer
- Lève toi sac à merde, allez, lève toi et marche ! Répète ces 6 lettres qui forment mon prénom, allez REPETE ! Reviens ! S’il te plaît, prononce de ta voix sans timbre mon prénom, je t’en prie ! Allez putain ! Allez sac à merde ! S’il te plaît...
Je le secoue, ce corps sans vie qui se secoue seul; seul comme une poupée de chiffon, je voulais le bouffer, petit à petit, le sentir se casser par ma seule volonté... Il est là; là sans être là...
Qu'est-ce que je dois faire?
Je n'ai maintenant plus rien à faire et mes yeux... Mes yeux répandent un liquide transparent qui me pique le coeur, comme de petites aiguillettes qui s'enfoncent doucement...
Qu'est-ce que je dois faire?
Faut pas être fin pour savoir ça, même Naruto le saurait; MOURIR...
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Fille du 17 octobre./ "Souvent, mes couplets dépriment/"
La morve est glacée d'effroi.