Bonsoir à tous ! A l'approche de mes dix-sept ans, je vous présente un petit texte écrit en deux heures, top chrono. C'est mon premier dans cette section, j'espère que vous prendrez plaisir à le lire. N'hésitez pas à exprimer votre avis, bon ou mauvais !
Lettre à moi-même
ou Comment se réjouir du temps qui passe
Amiens, le 7 novembre
Mon cher Mikazuki,
Demain marque le jour de ton dix-septième anniversaire. Lorsque tu recevras ces lignes, tu seras en train de vivre pleinement ce jour, unique dans une vie humaine.
Pourtant, au lieu de ressentir de la joie à l'approche de cette date importante, je t'ai senti nostalgique hier.
Oui, mon garçon, tu regrettes déjà le passé, cette année qui s'en va, que tu considères, avec le recul, comme un concentré de bonheur.
En effet, si tu devais retenir une date de l'année de tes seize ans, ce serait laquelle ? Le 9 décembre, jour de ta promotion en tant que rédacteur au sein de l'équipe Captainaruto ? Souviens-toi de ce jour, tu étais allé à l'étage sitôt après avoir appris la nouvelle, sans prévenir, et t'étais vraiment lâché en hurlant - sans produire de son toutefois -, levant les bras au ciel. Le 19 mars, lorsque tu es revenu à la maison tout sourire de tes résultats trimestriels, parce qu'ils étaient inespérés ?
Ou bien le 18 avril, lorsque tu as publié ton premier dossier sur Internet ? A moins que ce soit le 4 juillet, lors de la fête clôturant ton année de Première, où tu avais même esquissé quelques pas de danse, ça ne te ressemblait pas. C'était une fête que tu n'es pas prêt d'oublier d'ailleurs ; mais "clôturant" n'est pas le terme juste, car tu as retrouvé l'intégralité de tes compagnons de route le 2 septembre dernier... Ou cette promenade à Bruges, à l'Assomption. Qu'il faisait beau ce jour-là, c'était un vrai plaisir.
Ou un autre jour ? N'importe lequel ?
De tous tes gestes, tu ne regrettes rien. Absolument rien, quoi que peuvent en dire les autres. Pas même les erreurs, car elles t'ont justement appris ce que c'étaient que des erreurs. Je crois que c'est là le problème : toi qui t'es découvert une passion pour l'écriture, tu ne veux pas refermer le chapitre 16 du grand roman de ta vie. Une vie on ne peut plus banale pourtant, rythmée par le train-train quotidien, mais qui te plaît pourtant, c'est la vie, simple, telle que tu la voyais, telle que tu la voulais.
Et au lieu de regarder devant tu ne fais que contempler le magnifique paysage que tu as laissé derrière toi. Tu voudrais arrêter un train nommé Temps de tes propres mains, et pourtant c'est impossible, tu le sais bien.
Tu voudrais limiter tes seuls gestes à remercier tous ceux qui ont planté avec toi des fleurs et des arbres dans ce jardin imaginaire. Dans la vraie vie, tu as connu des amis que tu critiques - gentiment - en permanence, mais pourtant, qu'est-ce que tu les apprécies ! Tu ne voudrais, à vrai dire, jamais les quitter. Ils s'appellent Joffrey, Samuel, Romain, Justin... Et tant d'autres encore, je ne pourrais jamais tous les citer.
En rentrant chez toi, le soir, s'il n'y avait pas la dose routinière de devoirs à faire, tu te jetterais presque devant le vieil ordinateur, celui qui est là depuis six ans et demi, celui qui met un quart d'heure à démarrer, qui se bloque pour un rien, mais que tu ne remercierais non plus jamais assez pour t'avoir emmené sur le forum de Captainaruto. Que c'est idiot ! Remercier un objet. Ha ! Ha ! Ha ! Toujours est-il que là-bas, tu as connu tant de personnes... C'en est d'ailleurs ridicule, pour la plupart, tu ne les connais pas plus que sous un simple nom d'emprunt.
Et pourtant, à ceux-là aussi, tu aimerais leur dire merci. A celle au pseudo' excentrique, et grammatialement incorrect, Je sais pas. A un autre, qui se nomme Mat. A un troisième, Piepie-kun... A tous, vraiment tous, du premier au dernier, même à quelqu'un que tu dis ne pas aimer en apparence, mais que tu aimes quand même au plus profond de ton âme pour t'avoir fait ouvrir les yeux sur certains sujets. Comment s'appelle-t-il, déjà ? Ah oui, Fabest, tu me l'avais dit.
Tu as partagé tant de choses avec eux. L'écriture par exemple, c'est ton seul public, ou presque.
Mikazuki, pense que tout ce concentré de bonheur s'est produit. En un an seulement. Aussi, souviens-toi qu'en conséquence, cela peut se reproduire. C'est comme la guerre, c'est comme toutes ces catastrophes naturelles qui s'abattent sur le monde. Ce théorème indémontrable s'applique autant aux douleurs qu'aux plaisirs les plus fous. Et pour le monde, il y aura Obama. Tiens, là aussi, tu étais content de le voir sortir gagnant des élections mardi dernier, et même si ce n'est pas un Messie, il évoque pourtant l'espoir d'un monde meilleur.
Pourquoi être triste ? On dit que le chiffre 17 est un gage de bonheur, dans le monde arabe. Mais ça tu t'en moques, bien que tu sois très symboliste. Est-ce du à ton amour des chiffres et des mathématiques ? Tu auras 17 ans demain, et ces 17 ans verront l'année 2009 venir, celle que tu appelles déjà "l'année faste" sans même y avoir goûté.
Parce que c'est l'année du bac' surtout. Pour certains ça fait très peur, pour toi ça t'amuserait presque. Tu es même pressé d'être en juin prochain, tu as envie de triompher, de te battre. Tu ne veux rien d'autre. L'échec ?
404 not found. Tu as trop d'orgueil pour l'accepter... L'ennui est qu'il existe, tu dois le savoir. Et lorsque tu le subis, tu as parfois du mal à le surmonter. Mais tu corrigeras ce défaut, tu cesseras de te dire qu'une chose est gagnée à l'avance. Je te fais confiance.
Je crois que tu as changé, ces dernières semaines. Maintenant, tu veux croquer la vie à pleines dents, déclarer ouvertement ton amour pour elle, le crier sur tous les toits, sans commettre d'excès. Tu ne veux plus t'ennuyer, c'est une de tes résolutions. Tu veux aussi employer ton temps à aider les autres, il n'y a pas meilleur procédé pour améliorer ses relations avec autrui. A l'inverse, tu ne t'en voudras pas si l'on ne t'aide pas. Ton ancienne prof' d'histoire avait parlé de toi comme d'une éponge ; "Il accepte tout sans rien dire" avait-elle dit. Un bel exemple de philosophie persane. Et ça te plaît : le rôle de dirigeant te va mal, d'après toi. Tu préfères subir...
Non, le passé n'est jamais véritablement mort. Et toi, tel que tu es, tu retiens surtout le bon côté qu'il comporte. Dans tes souvenirs, il n'y a pas de place pour les malheurs. L'homme s'accommode devant tout ce qui l'arrange... C'est ce que tu voulais écrire dans ta dissertation de philosophie dernièrement. Tu ne retiens que les bons souvenirs... C'est comme ça. Ce qui est mauvais, on l'enterre, face contre terre. Et lorsque cela engage la faute d'autrui, il faut être prompt à pardonner. C'est ton principe, si je ne me trompe... Et d'une année à l'autre, c'est invariable chez toi.
Mais qu'est-ce qu'une année, d'ailleurs ? Quelque part, c'est encore une invention de l'homme. Au matin tu te seras levé en te disant "J'ai une année de plus par rapport à hier", alors qu'une seule journée t'en sépare... Si ! Tu as toujours 16 ans, quelque part.
Et même si tu te dis "mon pauvre ami, tu délires complètement ! Ah, on voit que tu vieillis toi !", cet ami te répondra : à chaque âge son lot de bonheur. Tu n'es qu'au petit matin de ta vie. Et que serait une journée sans que le soleil atteigne son zénith, sans l'après-midi, sans le soir ? La vie est identique à chacune des journées qui la composent. Tu as 17 ans ; cette année, tu auras peut-être ton ordinateur personnel, si tu décroches la mention Très Bien au bac'. Dans quelques années, ce sera le temps de la fac'. A une autre époque, tu trouveras du travail. Soirées en boîtes de nuit. Amour. Mariage. Enfant. Avec un S. Si, il y a encore tout ça ! Tu n'as rien vu du tout mon grand !
Et c'est pour ça qu'il ne faut pas être nostalgique. Il ne faut pas se murer dans le passé. Surtout pas maintenant. J'imagine un sourire naissant sur tes lèvres à la lecture de ces lignes : tant mieux !
Oh... Mais dans tout ça, j'en oublierais presque l'heure. Il me faut arrêter là mon bavardage, si je veux poster la lettre avant la levée.
Souviens-toi : aujourd'hui, samedi 8 novembre 2008, est jour de fête. Mais ça je pense que tu l'as compris maintenant. Et ce n'est pas seulement aujourd'hui que tu dois être heureux. Horace l'avait compris deux mille ans avant toi : carpe diem, profite du jour qui passe et ne pense à rien d'autre...
Passe une journée inoubliable,
Ego